Vous m'avez déjà auditionné en ma qualité de président de la CCI de Grenoble et je reviens devant vous avec ma casquette du MEDEF, puisque j'y suis notamment conseiller de Pierre Gattaz.
À quelques différences marginales près, je suis d'accord avec tous les propos que vient de tenir mon ami Philippe Guillaume. Pour le MEDEF, les CCI sont des partenaires privilégiées : elles sont notre bras armé sur le terrain national ou local.
Au niveau local, 75 % des CCI sont présidées par des membres du MEDEF, parfois de manière conjointe avec des membres de la CGPME. Le MEDEF est donc très impliqué dans la vie et les instances des CCI, et les relations sur le terrain sont très efficaces. Au niveau national, depuis 2013, Philippe Guillaume et moi-même, nous sommes entrés au comité directeur de CCI France, en tant qu'observateurs, ce qui montre bien le lien qui peut exister entre nos organisations et le réseau des chambres. Nous y donnons le point de vue de nos organisations professionnelles sans participer à la prise de décision. En outre, les présidents des différentes organisations se rencontrent environ trois fois par an pour faire le point.
Cette relation est très étroite car nous menons le même combat – le développement des territoires et donc celui des entreprises qui y sont implantées – même si les modes d'action sont un peu différents et complémentaires puisque le MEDEF et la CGPME se placent sur un terrain politique alors que les CCI sont des structures opérationnelles.
Quelle est notre appréciation de la qualité des services rendus aux entreprises par le réseau des CCI ? Comme le montre l'enquête évoquée par Philippe Guillaume, les entreprises apprécient les services des CCI quand elles les connaissent, mais les chambres consulaires doivent améliorer leur communication. Ce travail d'information est déjà engagé et il prendra une nouvelle ampleur dans les CCI de demain, telles qu'imaginées par le réseau. Ces nouvelles CCI, complètement révolutionnaires, marqueront une rupture par rapport au passé.
Quelles sont les principales missions que les CCI doivent remplir pour accompagner les entreprises dans leur activité ? Les CCI remplissent d'abord une mission de formation puisqu'elles arrivent en deuxième position dans ce domaine, après l'éducation nationale. Elles jouent un rôle en matière d'information par le biais de leurs observatoires économiques, de leurs études et publications. Elles constituent aussi un appui pour les entreprises qu'elles aident notamment dans leur développement à l'international, une nécessité pour les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Par exemple, CCI International s'est allié à Business France et à MEDEF International pour leur proposer Stratexio, un programme d'accompagnement sur trois ans. Voilà un travail concret de mutualisation destiné à aider les entreprises.
Les CCI suivent en quelque sorte deux modèles : certaines agissent comme des sociétés de services, c'est-à-dire qu'elles vendent des prestations, apportent une valeur ajoutée et peuvent, dans certains cas, jouer un rôle important de développement économique ; d'autres se situent davantage dans l'accompagnement des entreprises, en contrepartie de la taxe perçue. Or la baisse des financements remet en cause l'accompagnement gratuit et pousse au développement de services à valeur ajoutée, donc rémunérés, notamment dans l'aide à la conquête de marchés à l'étranger. J'ai en tête l'exemple d'une métropole qui a confié au réseau des CCI l'accompagnement à l'international de ses entrepreneurs. Dans ce genre de cas, il est normal que les CCI soient rémunérées.
Dans la réforme des territoires en cours au niveau de l'État, l'accent est mis sur les régions, qui représentent un poids économique important. Les CCI, tout comme le MEDEF, devront calquer leur organisation sur ces nouvelles régions pour que les échanges puissent se faire aux bons niveaux, tout en conservant un contact de proximité avec les entreprises. Pour travailler tout à la fois à l'échelon régional et en proximité, dans un contexte de baisse de financements, les CCI vont devoir rationaliser leur fonctionnement : mutualiser certains services, spécialiser certaines structures, etc. Dans la nouvelle région Rhône-Alpes, par exemple, il va y avoir dix-sept CCI dont seulement trois ou quatre feront de l'appui au développement international.
La réforme territoriale et la baisse des financements conduisent donc à une mutation profonde du réseau des CCI, qui n'ira pas sans périodes pénibles et plans sociaux.
S'agissant des mesures adoptées dans le cadre des deux dernières lois de finances, le MEDEF est totalement en phase avec la CGPME. Pour compléter le propos, je précise que nous ne sommes pas opposés à une diminution de la taxe puisque nous plaidons pour une réduction des charges qui pèsent sur les entreprises. En revanche, nous sommes choqués par la brutalité de ces mesures qui ont mis les CCI dans une situation où elles n'ont plus les moyens d'assurer leurs missions de base. Pousser les CCI à faire un effort de rationalisation n'a rien d'anormal aux yeux des chefs d'entreprise que nous sommes. Cette approche nous semble naturelle à condition que les évolutions aient un sens et qu'elles s'effectuent après un préavis minimum. Quant aux 500 millions d'euros prélevés sur les réserves des CCI, ils sont peut-être nécessaires au financement du budget de l'État, mais nous aurions apprécié qu'ils soient affectés au monde économique.