Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 17 juillet 2012 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice :

Monsieur Tourret, la non-rétroactivité est une conquête démocratique sur laquelle il n'est pas question de revenir. La rétroactivité n'est du reste envisageable que lorsque la nouvelle loi est plus douce que la précédente. Or tel n'est pas le cas ici.

L'application du principe de non-rétroactivité ne traduit évidemment aucune indifférence à l'égard des victimes. Si nous avons travaillé aussi vite et si, comme le Sénat mais dans des conditions encore plus difficiles, vous avez accepté la procédure accélérée, c'est parce que nous voulons réduire autant que possible la période actuelle de vide juridique et donc d'impunité conjoncturelle.

Monsieur Goujon, les classements, vous le savez, doivent être motivés. Je me suis engagée devant le Sénat, et je le fais à nouveau devant vous, à demander par circulaire au parquet d'informer, par écrit, les victimes pour lesquelles l'action publique a été éteinte qu'elles peuvent saisir les juridictions civiles. J'ai demandé par circulaire le 7 juin dernier au parquet de faire remonter les réquisitions et décisions : sur 130 procédures, une quinzaine seraient concernées en tout, cependant que cinquante ont déjà fait l'objet de requalification. Certes, saisir une juridiction civile n'a pas la même portée pour les victimes que la procédure pénale, qui permet de faire reconnaître le préjudice subi et de sanctionner l'auteur si sa culpabilité est reconnue. Toutefois, la procédure civile leur permet d'être dédommagées. Il faut savoir que le délai de procédure entre le dépôt de la plainte, l'audiencement et le prononcé du jugement est d'environ vingt-sept mois – davantage s'il y a appel, ce qui est le cas dans 25 % des affaires – et que le coût varie entre 13 000 et 20 000 euros : percevoir au civil des dommages et intérêts est donc loin d'être négligeable.

Pour les personnes qui, sans relever de l'aide juridictionnelle, ont déjà beaucoup dépensé, nous avons déjà réfléchi avec certains députés à la possibilité de les faire bénéficier de cette aide sans condition de ressources.

Je tiens également à noter que la question de la réparation intégrale a été évoquée au Sénat.

Je rappellerai enfin que le code pénal prend en compte l'intentionnalité dans le délit.

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