Intervention de Georges Fenech

Réunion du 17 juillet 2012 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech :

Nous ne pouvons que nous féliciter de la diligence avec laquelle vos deux ministères cherchent à combler un vide juridique intolérable. Toutefois, errare humanum est, perseverare diabolicum, comme dit l'adage latin. Vous nous saisissez d'une nouvelle rédaction de l'article du code pénal incriminant le harcèlement sexuel parce que le Conseil constitutionnel a invalidé la rédaction précédente, en raison de son imprécision, contraire au principe de légalité des délits et des peines. Or la nouvelle rédaction me paraît tout aussi imprécise.

Si on comprend bien ce que peuvent être des actes ou des propos dégradants ou humiliants, portant atteinte à la dignité, il en est tout autrement du deuxième cas d'incrimination prévu, à savoir que ces actes ou propos créent à l'égard de la victime « un environnement intimidant, hostile ou offensant ». Il s'agit là de termes à la fois flous, puisqu'ils ne font référence à aucune notion connue en matière pénale, et éminemment subjectifs. Du reste, madame la garde des Sceaux, vous avez noté dans votre intervention liminaire que peu importait le mot employé à partir du moment où il est compris par le magistrat. Je ne suis pas certain que le magistrat comprenne ce qu'est un ressenti intimidant, hostile ou offensant, du fait que le ressenti varie d'une personne à une autre. Certes, la rédaction proposée par le ministère provient directement de la définition du harcèlement sexuel donnée dans les directives européennes de 2004 et de 2006. Toutefois, vous n'avez pas hésité, à juste titre à mes yeux, à vous écarter de ces directives en disposant à l'article 222-33 que le harcèlement suppose des agissements répétés, alors que les directives considèrent comme harcèlement un seul comportement non désiré à connotation sexuelle. Afin de respecter le principe constitutionnel de légalité des délits et des peines, il serait, de mon point de vue, prudent sur le plan constitutionnel de s'écarter également de la directive en supprimant cette deuxième incrimination d'une très grande imprécision matérielle, susceptible, je pense, de relever d'une appréciation purement subjective du juge.

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