Le débat à la Haute assemblée a porté sur cette question également – une sénatrice de la commission des Lois a même demandé la modification des délais de prescription. Or, en matière de délits, la prescription de l'action publique est de trois années et nous restons dans ce cadre. Nous avons préféré créer les conditions permettant à la victime de déposer plainte le plus tôt possible, plutôt que d'allonger le délai durant lequel elle pourra porter plainte. En effet, même en cas de délai bref ou moyen entre les faits et le dépôt de la plainte, il est parfois difficile d'apporter des preuves – c'est ce que nous rapportent les victimes ou les associations. Il est donc probable que plus le délai sera long, plus il sera difficile à la fois d'apporter des preuves et de trouver des témoins. Il ne nous semble dès lors pas pertinent d'allonger le délai de prescription. Le but n'est pas d'attendre que la victime, épuisée, ait fini par démissionner pour porter plainte, mais de faire en sorte qu'elle soit protégée du harcèlement sur son lieu de travail. J'y insiste : le temps n'est pas nécessairement l'allié de la victime.
Monsieur Fenech, si nous n'avons pas transposé la directive européenne, c'est qu'elle nous semblait précisément fonder l'incrimination sur des éléments trop subjectifs, qui ne sont pas, pour autant, invraisemblables : ce n'est pas parce que la victime ressent le harcèlement qu'il n'existe pas. Mais il valait mieux fournir au magistrat des éléments objectifs. C'est pourquoi le texte du Gouvernement employait le mot « comportement », qui a été remplacé par « propos et agissements » au Sénat. Toutefois, je comprends vos observations sur la trop grande part d'appréciation laissée au juge.
M. Raimbourg a raison de souligner la nécessité d'accompagner la sanction d'une réprobation sociale. C'est pourquoi, en sus de la loi et de la politique pénale explicitée dans la circulaire d'application, la ministre des Droits des femmes aura la responsabilité de toute une série de politiques publiques, solidairement avec d'autres membres du Gouvernement.
S'agissant de l'assimilation de l'acte unique au harcèlement, je pense, moi aussi, qu'elle ne fait pas courir le risque d'une déqualification d'infractions plus graves mais permettra de mieux sanctionner le harcèlement sexuel commis de manière non répétée.
Nous avons veillé à ce que la rédaction ne prête le flanc à aucun reproche d'imprécision.