Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, madame la présidente de la commission des affaires européennes, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, nous sommes réunis ce matin pour l’examen en première lecture par votre Assemblée, des projets de lois autorisant la ratification de deux accords d’association conclus par l’Union européenne avec l’Ukraine, d’une part, et la Géorgie, d’autre part.
Dans les situations difficiles que traversent l’Ukraine et la Géorgie, l’examen de ces textes revêt une importance toute particulière. La mobilisation de votre Assemblée pour vous en saisir dans des délais brefs est un message fort d’amitié, de soutien et de solidarité à leur égard.
Très similaires, ces accords visent à établir une « association politique et une intégration économique » entre l’Union européenne et, respectivement, l’Ukraine et la Géorgie. Ils constituent de puissants leviers de modernisation et de réforme au service des citoyens ukrainiens et géorgiens, et dans l’intérêt de la stabilité du voisinage de l’Union.
Les accords d’association permettent d’améliorer le cadre de nos relations par deux biais. Le premier consiste à renforcer le dialogue politique et la coopération en matière de réformes intérieures, de politique extérieure et de sécurité, dans un large éventail de domaines d’intérêt communs.
Ce dialogue est fondé sur les valeurs et principes fondamentaux de l’Union européenne, à commencer par le respect des valeurs démocratiques, des droits de l’Homme, de l’État de droit, de la bonne gouvernance et du développement durable.
Le deuxième biais tient au développement des échanges commerciaux, alors que l’Union européenne est le premier partenaire commercial de l’Ukraine – 31 % des échanges commerciaux –, comme de la Géorgie – 27 %.
L’accord permettra en effet à terme une libéralisation quasi-totale des échanges, assortie d’un calendrier de diminution des droits de douane, calendrier asymétrique afin de prendre en compte les différences de développement économique entre l’Union et ses partenaires.
En contrepartie, l’accord d’association prévoit la reprise progressive et la mise en oeuvre par l’Ukraine et la Géorgie de l’acquis européen en matière de réglementations, normes et standards. C’est le coeur du dispositif : pour chaque domaine, les accords décrivent le périmètre et le calendrier de l’acquis à reprendre, véritable feuille de route pour les réformes que les gouvernements ukrainien et géorgien se sont engagés à mener.
Sont concernées, de manière non-exhaustive, les normes en matière sanitaire et phytosanitaire, de droit du travail, d’égalité entre les femmes et les hommes, de propriété intellectuelle et particulièrement de protection des indications géographiques.
La ratification des accords d’association avec l’Ukraine et la Géorgie revêt donc un triple enjeu.
Le premier est de manifester concrètement, au-delà des déclarations, notre soutien à la démocratie, au développement économique et social et à la stabilité de nos voisins. Je sais que vous êtes nombreux, dans cette Assemblée, à partager cette préoccupation.
Pour les autorités et les citoyens ukrainiens et géorgiens, l’Europe et le lien avec l’Union européenne sont synonymes d’État de droit, de démocratie, de liberté, de solidarité, de lutte contre la corruption mais aussi de nouvelles perspectives sociales et économiques. Notre responsabilité est d’encourager cet élan réformateur.
Le deuxième enjeu est de souligner l’engagement de la France en faveur d’une politique européenne forte et ambitieuse pour soutenir le développement et la stabilité de son voisinage oriental, dans un contexte marqué par la crise en Ukraine mais également par la persistance de conflits gelés dans la région.
C’est le message qu’a souhaité adresser le Président de la République en participant au sommet du partenariat oriental les 21 et 22 mai derniers à Riga.
Le troisième enjeu, enfin, est de consolider nos relations bilatérales, notamment en intensifiant nos échanges économiques.
Les entreprises françaises, qui comptent parmi les principaux fournisseurs et investisseurs dans ces pays, croient au potentiel de l’Ukraine et de la Géorgie. Elles profiteront de l’amélioration attendue de l’État de droit, de conditions d’investissement facilitées ainsi que des avancées réglementaires permises par l’accord dans de nombreux domaines, par exemple en matière de protection des indications géographiques. La France y a accordé une attention particulière au cours des négociations.
Ce lien privilégié tient aussi à l’action inlassable de la France en faveur du règlement des conflits aux frontières de l’Union européenne. Il y a six ans, la France, qui assurait alors la présidence de l’Union européenne, conduisait une médiation décisive lors du conflit russo-géorgien d’août 2008. Elle n’a cessé, depuis, de rappeler son attachement à l’intégrité territoriale de la Géorgie, où j’ai eu l’occasion de me rendre plusieurs fois car, à l’époque, je siégeais au Conseil de l’Europe.
Depuis le début de la crise en Ukraine, la France se mobilise sans relâche pour obtenir une solution pacifique durable. La situation reste aujourd’hui très fragile dans l’Est de l’Ukraine et de fortes tensions persistent. Le processus de sortie de crise, négocié le 12 février à Minsk avec le Président de la République, la Chancelière Merkel, le Président Porochenko, et le Président Poutine, est la seule feuille de route pour la paix. Nous tenons à ce qu’elle soit pleinement respectée d’ici à la fin de l’année, dans ses aspects sécuritaires comme politiques : le cessez-le-feu, le retrait des armes lourdes, le volet politique concernant le statut futur des régions de l’Est, le respect de l’intégrité territoriale, de l’indépendance et de la souveraineté de l’Ukraine.
M. Laurent Fabius a accueilli le 23 juin à Paris ses homologues allemand, ukrainien et russe pour faire le point sur la mise en oeuvre des mesures agréées. S’agissant de la Géorgie comme de l’Ukraine, les accords d’association doivent affermir la souveraineté de nos voisins et renforcer leur attractivité.
Je voudrais être complète et dissiper devant vous deux motifs d’interrogation qui ont été soulevés par certains lors des débats en commission.
Permettez-moi, tout d’abord, de préciser que ces accords ne prévoient pas de perspective d’adhésion à l’Union européenne. Ce n’est pas leur objet et il n’y a pas d’ambiguïté sur ce point. Le Président de la République l’a rappelé lors du sommet de Riga : l’association n’est pas l’adhésion.
Deuxième motif d’interrogation : les liens avec la Russie. Je veux là aussi être très claire. Pour la France, comme pour l’Union européenne, la conclusion de ces accords d’association avec l’Union européenne n’implique en aucun cas que l’Ukraine et la Géorgie doivent renoncer à leurs relations avec la Russie. Les accords ne les remettent nullement en cause.
Les Européens l’ont dit également lors du sommet de Riga : le partenariat oriental n’est dirigé contre aucun pays et ne vise pas à créer de lignes de fracture sur le continent européen. Son seul objet est la modernisation politique et économique de nos voisins au bénéfice de tous, au service et dans le respect de la souveraineté de chacun.
Les consultations trilatérales conduites par la Commission européenne avec l’Ukraine et la Russie sur la mise en oeuvre de l’accord d’association doivent permettre, à cet égard, de rassurer la Russie quant à l’impact potentiel de cet accord sur son économie, et de mettre en évidence la compatibilité entre un rapprochement économique de l’Ukraine avec l’Union européenne et le maintien de relations commerciales étroites avec la Russie.
Tels sont, mesdames les présidentes de commission, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, les grands objectifs des accords d’association entre l’Union européenne et, respectivement, l’Ukraine et la Géorgie, qui font l’objet de ces projets de loi.
En apportant votre soutien et votre approbation à ces textes, vous témoignerez de l’amitié profonde qui lie la France et ces pays. Vous soutiendrez le développement de ces pays dans le cadre d’une relation nouvelle qu’ils ont souhaitée avec l’Union européenne et contribuerez à renforcer la stabilité et la paix aux frontières de l’Union européenne.