Intervention de Élisabeth Guigou

Séance en hémicycle du 25 juin 2015 à 9h30
Accords d'association ue-euratom-ukraine et ue-euratom-géorgie — Présentation commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères :

Si cette politique est aujourd’hui l’objet d’une révision générale en vue d’une réforme profonde, c’est bien, hélas, parce qu’elle a échoué.

À l’Est, en particulier, elle n’a pas su offrir d’alternative crédible à l’élargissement et a gravement péché par la méthode. Elle a été menée de manière bureaucratique, sans vision ni leadership politique, sans lien suffisant avec la politique étrangère et de sécurité de l’Union et les diplomaties des États membres. Elle ne s’est pas adaptée aux situations particulières des partenaires, a proposé à tous le même accord d’association et a ignoré leurs propres voisins – en l’espèce, évidemment, la Russie. À ce titre, la politique de voisinage a sa part dans le déclenchement des événements en Ukraine. Depuis lors elle a, malheureusement, montré son impuissance relative puisque c’est finalement l’initiative de deux États membres, la France et l’Allemagne, et non celle de l’Union qui a permis de lancer le processus de Minsk en vue d’un règlement du conflit du Donbass. Et nous savons que le processus de Minsk est la seule chance pour la paix : il doit donc être appliqué.

Il nous faut donc, c’est le premier point, une politique de voisinage complètement rénovée, assise sur une vision stratégique, avec une direction politique forte, un volet sécurité renforcé, des priorités recentrées, une prise en compte des réalités géopolitiques et une réponse beaucoup plus différenciée aux attentes de nos partenaires, à la fois les gouvernements et les sociétés civiles. Cela vaut à l’est, mais aussi, bien sûr, au sud de l’Union européenne.

Second point, la refondation de la politique de voisinage ne nous permettra pas d’éluder définitivement le débat sur l’élargissement de l’Europe.

Nous allons aujourd’hui approuver les deux accords d’association en sachant qu’ils ne préjugent en rien – ils le disent textuellement – de la perspective d’une éventuelle adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie à l’Union européenne et qu’ils sont également dépourvus de tout lien avec la question de la candidature de ces pays à l’OTAN. Il est très important d’établir cette distinction car il y a eu trop de confusion au cours des dernières années, comme si le processus d’association devait inévitablement conduire à l’adhésion à l’Union et que celle-ci devait inévitablement conduire à l’adhésion à l’OTAN. Cette distinction est maintenant faite et je m’en réjouis.

Mais ces questions peuvent d’autant moins être ignorées que les intentions des gouvernements ukrainien et géorgien sont tout à fait claires et affichées. S’agissant de l’Union, leur objectif avoué est de mettre leurs pays respectifs en position de présenter leur candidature d’ici quelques années.

Pouvons-nous écarter d’emblée ces futures candidatures ? Je crois que l’idéal européen et les traités européens ne nous le permettent pas. Mais pouvons-nous attendre tranquillement que des candidatures se déclarent sans nous soucier du contexte géopolitique ? Ce serait aller de nouveau au devant d’une crise grave.

C’est pourquoi je crois qu’il est essentiel que l’Union européenne cherche, même si c’est difficile, à rétablir le dialogue avec la Russie et à définir un vrai partenariat avec ce pays.

En disant cela, et j’en terminerai par-là, madame la présidente, je ne suis pas contre l’idée d’un éventuel élargissement à l’est de l’Union à long terme, je suis au contraire convaincue de servir ainsi l’Union. Car quand bien même elle surmonterait tous ses problèmes internes, qui l’amènent aujourd’hui à freiner le processus d’élargissement, qui peut raisonnablement imaginer une adhésion de l’Ukraine qui se ferait dans un contexte de crise entre l’Union européenne et la Russie ?

La Russie est un partenaire économique et politique majeur. Il faut maintenir le dialogue afin, espérons-le, lorsque la crise en Ukraine sera surmontée, dans le respect de son intégrité territoriale, de construire ce partenariat Union européenne-Russie que nous appelons de nos voeux.

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