Intervention de Philippe Baumel

Séance en hémicycle du 25 juin 2015 à 9h30
Accords d'association ue-euratom-ukraine et ue-euratom-géorgie — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Baumel :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mesdames les présidentes de commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, j’évoquerai surtout l’Ukraine dont l’étymologie« U-Kraïna », littéralement le pays de des confins, rappelle qu’elle a toujours été tiraillée entre plusieurs influences, polonaise ou russe, orientale ou occidentale, comme en témoigne son histoire. La situation actuelle, de plus en plus instable et inquiétante, rappelle s’il en était besoin le poids de l’histoire comme les relations complexes qu’entretient ce pays avec la Russie voisine. En raison de l’annexion de la Crimée par la Russie et de la perte de contrôle d’une partie de la région du Donbass, l’Ukraine est confrontée à une crise majeure et doit relever simultanément un défi économique immense. En dépit des accords de Minsk et de Minsk 2, la situation reste confuse dans l’Est du pays et de fortes tensions persistent autour de Donetsk et Marioupol. D’ores et déjà, les combats ont fait plus de 6 100 morts. Avant-hier, alors même que les chefs des diplomaties russe, ukrainienne, française et allemande se réunissaient à Paris pour évoquer les accords de paix, les combats s’intensifiaient dans la région de Donetsk. Les quatre ministres ont cependant appelé à une désescalade rapide, sans réel écho à ce jour.

Ce matin même, la Russie se prétendait impuissante à bloquer les volontaires russes qui partent au combat. L’Union européenne a donc décidé dès lundi de prolonger jusqu’en 2016 les sanctions économiques visant la Russie dont le rôle dans le conflit ukrainien n’est malheureusement plus à démontrer. Il faut aussi rappeler que la politique de voisinage de l’Union européenne, dans cette affaire, n’a pas été à la hauteur, se résumant à une gestion bureaucratique sans véritable vision politique dont nous mesurons aujourd’hui toutes les cruelles conséquences sur le peuple ukrainien. Tel est le contexte de fortes tensions dans lequel nous examinons les accords d’association avec la Géorgie et l’Ukraine dont l’objectif est de renforcer le volet oriental de la politique européenne de voisinage envers six anciennes républiques soviétiques, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Moldavie, la Géorgie et l’Ukraine. Les négociations d’un éventuel accord d’association avec l’Ukraine ont commencé en 2007 et celles de son volet commercial en 2008. Nous connaissons le rôle de l’accord d’association dans la crise politique ukrainienne. Le refus de l’ex-président ukrainien Viktor Ianoukovytch de le parapher en novembre 2013 a été à l’origine de manifestations ayant mené à la « révolution de la dignité » ou de Maïdan en février 2014.

Le nouvel exécutif ukrainien a aussitôt repris la négociation de l’accord d’association qui a été ratifié le 16 septembre 2014. Celui-ci n’est évidemment pas responsable de la situation actuelle dont les racines profondes sont d’abord à chercher dans les divisions internes du pays, dans sa mauvaise gouvernance, en particulier au cours des années ayant précédé la récente révolution, et dans l’attitude de la Russie. L’accord constitue la dernière phase d’un processus qui pour être long et difficile n’en a pas moins montré le profond désir de l’Ukraine de s’ancrer dans les valeurs européennes et de nouer avec l’Union européenne un partenariat privilégié. Il vise à établir une association politique entre l’Union européenne et l’Ukraine ainsi que leur intégration économique et constituera un puissant levier de modernisation et de réforme. Les accords d’association avec la Géorgie et l’Ukraine que nous examinons comportent surtout des clauses économiques et commerciales mais leur portée politique est majeure. Les trois volets à peu près identiques des deux accords sont destinés à renforcer le dialogue et les réformes politiques, promouvoir la coopération et le commerce et enfin favoriser l’adoption d’une grande partie de l’acquis communautaire. Le premier volet vise à approfondir le dialogue politique entre l’Union européenne, l’Ukraine et la Géorgie, notamment en matière de réformes intérieures, de politique étrangères et de sécurité.

Le troisième volet porte sur la nécessité de renforcer la coopération en matière de liberté d’établissement des entreprises et de prestation de services, de protection de la propriété intellectuelle, de politique industrielle, d’énergie, d’environnement, d’éducation et de culture. Comme l’ont clairement rappelé Mme la secrétaire d’État et M. le rapporteur, les accords ne prévoient aucune adhésion à l’Union européenne. Il s’agit d’accords de voisinage visant à développer la coopération entre l’Union européenne et les deux pays. Il faudra cependant construire sans délai une autre politique de voisinage de l’Union européenne et travailler à une autre stratégie relationnelle avec le grand voisin russe. Dans le contexte que connaît l’Ukraine, les accords d’association sont nécessaires au renforcement de ses liens avec l’Union européenne et la France et même indispensables pour reconstruire la stabilité du pays et faire face aux défis économiques. Il existe là-bas une forte demande d’Europe, ne la décevons pas et votons sans réserve les accords d’association !

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