Monsieur le président, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, monsieur le président de la commission du développement durable, mesdames, messieurs les députés, je remercie tout d’abord le groupe socialiste de l’Assemblée, notamment Sébastien Denaja, d’avoir déposé cette proposition de loi. Je me félicite également que Philippe Duron ait accepté d’en être le rapporteur, car il a fourni une nouvelle fois un travail de grande qualité.
Je veux ensuite saluer devant vous la démarche qui a permis d’aboutir à cette proposition de loi. À la suite de tensions, dans le port décentralisé de Port-la-Nouvelle fin 2013, liées à certaines ambiguïtés des articles du code des transports, le Gouvernement a joué son rôle de facilitateur du dialogue en mettant en place un groupe de travail destiné à évaluer l’opportunité d’une évolution des règles d’emploi des dockers. De cette mission est sorti un texte équilibré entre les positions des différents acteurs oeuvrant pour le développement de nos ports : les entreprises de manutention, les industriels implantés sur les terminaux et les représentants des ouvriers dockers. Cet équilibre a été obtenu par un dialogue riche et constructif après près de trente réunions de travail tenues entre février et juillet 2014.
L’objectif était bien de concilier des enjeux essentiels à l’attractivité de nos ports et à leur développement économique : la sécurité des personnes et des biens, fondée sur la qualification et le professionnalisme des dockers ; la liberté d’entreprendre ; le respect des travailleurs et de leurs conditions d’emploi. Il s’agit donc aujourd’hui de permettre la réalisation du consensus obtenu. Il faut, à mon sens, saluer cette démarche vertueuse dans laquelle les pouvoirs publics interviennent en soutien au dialogue des acteurs économiques et sociaux. Ces dispositions législatives contribueront, en sécurisant juridiquement le régime de priorité d’emploi, à pérenniser l’emploi des dockers. Le savoir-faire et l’expérience de cette profession sont un atout précieux en matière de sécurité pour nos ports.
La proposition de loi, issue du dialogue social, doit aussi contribuer à améliorer la fiabilité et la compétitivité de nos ports, sujet auquel je suis très attaché. Les ports constituent en effet des maillons essentiels de notre chaîne de transport. L’emploi direct qu’ils génèrent est d’ailleurs estimé à 40 000 emplois. Vous le savez, les premières années d’existence des grands ports maritimes qui ont suivi la loi de 2008 portant réforme portuaire ont permis d’asseoir leur rôle d’ensemblier des activités de la place portuaire, garant de leur développement économique. Les résultats sont encourageants, mais il nous faut encore poursuivre les efforts. Les trafics conteneurisés sont en hausse, avec une croissance annuelle moyenne de 5,3 % depuis 2012, soit plus que l’augmentation moyenne sur les ports européens de la façade Manche-mer du Nord. Le développement d’un système logistique compétitif et durable intégrant la chaîne logistique de bout en bout doit permettre de renforcer l’attractivité des ports auprès des chargeurs et des armateurs.
C’est le travail que nous avons effectué avec le nouveau cycle qui s’ouvre. Les instances de gouvernance des ports ont été renouvelées et de nouveaux projets stratégiques ont été définis dans chaque grand port maritime. C’est aussi, par exemple, la raison pour laquelle nous avons entamé une dynamique visant à renforcer la coopération portuaire avec les ports décentralisés et les ports intérieurs qui sont des maillons complémentaires de la chaîne logistique. C’est, enfin, la raison pour laquelle des efforts sans précédent sont prévus pour accompagner financièrement ces différentes initiatives. Ainsi, au titre des contrats de plan État-région 2015-2020, les ports représentent un volume d’investissement de 1,6 milliard d’euros contre 1,1 milliard d’euros pour les contrats de plan 2007-2013. En outre, au plan européen, la France a déposé vingt-trois projets portuaires et fluviaux dans le cadre du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe. Les résultats de l’appel à projets européen sont attendus dans les tout prochains jours.
Le Gouvernement a une stratégie globale de développement de l’attractivité et de la compétitivité de nos ports, pour permettre de transformer l’essai de la réforme portuaire en réussite et de donner à la France, en métropole et dans les outre-mer, une place de premier rang dans le commerce international. C’est dans ce contexte qu’il faut envisager l’évolution législative proposée. Elle consiste à clarifier, simplifier et moderniser le régime d’emploi des dockers qui est aujourd’hui assis sur le statut de docker intermittent. Ce régime, antérieur à la réforme de 1992, aura pourtant totalement disparu d’ici à 2017. L’insécurité juridique actuelle est source de conflits dans les ports.
La proposition de loi instaure : une définition de l’ouvrier docker professionnel fondée sur l’existence d’un contrat de travail à durée indéterminée, soumis à la convention collective nationale unifiée « ports et manutention » ; une consolidation du principe de priorité d’emploi pour les ouvriers dockers ; une définition modernisée du périmètre dans lequel devrait s’appliquer la priorité d’emploi des ouvriers dockers, fondée sur le service au navire ; une charte nationale pour les nouvelles implantations industrielles dans les ports maritimes de commerce, comportant une obligation de négociation entre les différents acteurs de la place portuaire et des engagements réciproques de compétitivité, de fiabilité sociale et de respect des emplois portuaires et des clauses de la convention collective nationale.
La commission du développement durable a adopté la semaine dernière, à l’initiative du rapporteur Philippe Duron, un amendement demandant la remise d’un rapport au Parlement sur la mise en oeuvre de cette charte nationale. Je me félicite de cette initiative qui permettra un retour d’expérience sur le dispositif proposé. Ainsi, parce que le Gouvernement considère que cette proposition de loi participera à une situation stable et apaisée des acteurs économiques dans nos ports et donc à un avenir serein, je l’espère, il est favorable à son adoption et souhaite que les groupes parlementaires de l’Assemblée nationale puissent soutenir ce soir la fructueuse démarche de dialogue social qui a mobilisé toute une année les différents acteurs portuaires.