Intervention de Bernard Rousseau

Réunion du 24 juin 2015 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Bernard Rousseau, responsable des politiques « eau » de France Nature Environnement, FNE :

Membre du comité de bassin Loire-Bretagne, administrateur de l'Agence France Nature Environnement, je suis aussi administrateur de l'ONEMA – mais le conseil d'administration ne se réunit plus, du moins pour l'instant, avec les membres non nommés. Je souhaite, pour ma part, aborder certains aspects de la gouvernance de l'eau au niveau des comités de bassin, éventuellement au niveau des SAGE, et poser une question qui n'avait pas été débattue à l'occasion de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) de 2006 : quel est le rôle du monde associatif dans les comités de bassins ?

On y rencontre différents acteurs : des élus – le système de représentation n'est pas parfait, mais la situation est en passe de s'améliorer du fait de l'organisation des nouvelles structures, EPCI à fiscalité propre et autres –, des représentants du monde économique et quelques représentants de la société civile. Or leurs intérêts ne sont pas du tout les mêmes. Les représentants de la société civile sont les « bénévoles » du système. Que faut-il attendre d'eux ? Sont-ils là pour dire ce que les autres acteurs n'ont pas envie de dire ? Doivent-ils faire des propositions ? Sont-ils condamnés à être toujours minoritaires quand il y a vote ?

La question est fondamentale pour les institutions de bassin. On pourrait en effet considérer que le rôle des associatifs – consommateurs, environnementalistes, pêcheurs, ceux qui s'occupent de sports d'eau vive – est de sensibiliser les autres acteurs à la protection de l'eau et de l'environnement. Mais la technique du tour de table, où tout le monde se dit tout, aboutit toujours à un vote. Voilà pourquoi, avant la conférence environnementale de 2013, nous avions rédigé une note dans laquelle nous nous interrogions sur l'intérêt de mélanger le collège des usagers économiques avec celui de la représentation civile, et nous proposions la création d'un quatrième collège.

Cette proposition, qui nécessitait de passer par la loi, n'a pas été retenue. On a préféré créer, au sein du collège des usagers, trois sous-collèges : celui des acteurs économiques industriels, celui des agriculteurs et celui des acteurs de la société civile. Malheureusement, les vice-présidents étaient toujours désignés par le collège réuni des élus et des acteurs économiques. Dans un tel système, les représentants de la société civile, minoritaires, ne peuvent être désignés, sauf s'ils possèdent quelque influence par ailleurs. On l'a vu dans certains bassins.

Cela nous amène à nous interroger sur la nature de la mission des représentants des associations, dont certains ont des doubles ou des triples appartenances. Pour défendre la société civile, pour être plus intéressants, plus productifs, et peut-être moins conformistes, ils doivent tenir un discours neutre, et non le discours d'intérêt économique que tiennent, très légitimement d'ailleurs, les représentants de l'activité économique.

Grâce aux « amendements Batho », la loi sur la biodiversité a permis certaines avancées, dont la création d'un quatrième collège dans les comités de bassins. Pour notre part, nous aimerions que la mesure soit étendue au conseil d'administration des agences de l'eau. En effet, tout ce qui concerne les interventions, les financements ou les retenues sera plutôt traité au conseil d'administration et dans les différentes commissions, alors que tout ce qui concerne les zones vulnérables ou les SDAGE sera plutôt traité au niveau du comité de bassin.

Le poids de l'État est-il suffisant ? Plusieurs rapports considèrent qu'il n'est pas assez représenté. On ne peut dissocier cette question de celle de la désignation des membres dans le comité de bassin ni de celle la représentation du monde associatif dans le conseil d'administration. Va-t-on modifier les règles ? Cela suppose une analyse et un débat général, prenant en compte les avantages et les inconvénients de chaque solution.

La gouvernance des comités de bassin est donc une question importante, eu égard à l'importance des sommes en jeu – et tant que l'État n'en prélève pas trop chaque année. Mais il faut également se pencher sur la politique de l'eau à l'échelle locale. Certes, 85 % de la surface du bassin Loire-Bretagne est couverte par des SAGE, mais les résultats sont-ils vraiment si différents entre les endroits où il y a des SAGE et ceux où il n'y en a pas ? Voilà pourquoi, tout en étant favorable aux SAGE, je milite pour une évolution de la gouvernance.

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