Intervention de Pierre Rémy

Réunion du 28 mai 2015 à 12h00
Mission d'information commune sur la banque publique d'investissement, bpifrance

Pierre Rémy, directeur général de Keensight :

Je prendrai un exemple pour illustrer le rôle de Bpifrance. Nous avons été actionnaires d'une société, LDR Médical, basée à Troyes, qui fabrique des implants pour la colonne vertébrale. C'est une société qui est aujourd'hui cotée au NASDAQ, où elle capitalise plus d'un milliard. Au cours de cette aventure de dix ans, elle est passée de zéro à quatre cents salariés, dont les deux tiers sur le territoire français, tout en réalisant 90 % de ses ventes à l'international. Le marché français de la chirurgie du dos est relativement petit en volume, et c'est par ailleurs le pays où les prix sont sans doute les plus bas, ce qui est très bon pour la dépense publique mais n'aide pas au développement de l'écosystème.

Le dispositif médical est l'un des secteurs où la France possède un très grand savoir-faire. La chirurgie du dos a été inventée en France, portée par une société française, Sofamor, qui a été rachetée par l'Américain Medtronic, devenu le leader mondial de la chirurgie du dos, un marché de 7 ou 8 milliards de dollars dont il occupe la moitié grâce à l'acquisition il y a une vingtaine d'années de cette société française. L'essentiel du savoir-faire est passé aux États-Unis ; l'activité française de Medtronic a beaucoup diminué au fil du temps.

Avec LDR Médical, nous avons recréé un acteur mondial dans ce domaine. Créer un tel acteur demande beaucoup de capitaux. Un essai clinique coûte 50 millions de dollars. Les quelque 80 millions de dollars investis ne pouvaient être trouvés sur place. Bpifrance a apporté 5 millions d'euros, nous avons trouvé des capitaux extérieurs, et la société a levé des capitaux aux États-Unis. Nous avons ainsi créé beaucoup de valeur, de même que beaucoup d'emplois en France, avec des capitaux – ainsi que des payeurs, puisque les produits sont vendus aux États-Unis – essentiellement américains. L'effet de levier pour le pays est donc excellent.

Le problème, c'est que nous étions soumis au bon vouloir d'investisseurs américains. Si nous ne les avions pas trouvés, l'entreprise n'aurait pu exister. C'est un peu dommage de ne pas avoir les capacités d'accompagner de tels projets. Il faut trouver les moyens de combler le manque d'ETI dans le tissu industriel français.

Chez nos voisins, les fonds longs se trouvent dans les fonds de pension. Notre système d'assurance vie en est un peu l'équivalent. On pourrait donc prévoir des incitations pour que l'assurance vie investisse dans le private equity. Alors que les actifs non cotés représentent 10 % des actifs des fonds de pension, ils sont infimes dans l'assurance vie. Les contraintes réglementaires pesant sur les assureurs leur permettraient toutefois difficilement d'investir dans cette classe d'actifs.

Nous avons, en ce qui nous concerne, un profil très industriel. La plupart des gens de l'équipe ont passé une dizaine ou une quinzaine d'années dans l'industrie, notamment à l'étranger.

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