Intervention de Odile Kirchner

Réunion du 4 juin 2015 à 11h00
Mission d'information commune sur la banque publique d'investissement, bpifrance

Odile Kirchner, secrétaire générale du Conseil national de l'industrie :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, je suis heureuse de pouvoir évoquer devant vous la question, extrêmement importante pour l'industrie, du rôle de Bpifrance. Permettez-moi cependant de débuter mon intervention par quelques mots sur le Conseil national de l'industrie, qui reste méconnu.

Créé à la suite des états généraux de l'industrie qui se sont tenus en 2009, il a pour objectif de fédérer les acteurs industriels – fédérations professionnelles, chefs d'entreprise et organisations syndicales de salariés – autour d'une vision partagée de l'avenir de l'industrie en France et des principaux enjeux industriels du pays, afin de renforcer le tissu productif et de retrouver des perspectives de croissance de l'activité et de l'emploi industriels.

Le conseil assume une double mission. La première consiste à éclairer les pouvoirs publics et à leur adresser des recommandations, émises de façon indépendante et approuvées par chacun des collèges, sur les politiques publiques concernant l'industrie et sur les actions prioritaires à mener pour la renforcer. Le Conseil national de l'industrie est donc un lieu de dialogue social qui favorise la convergence de vues des fédérations professionnelles et des organisations de salariés sur les principaux enjeux industriels du pays.

Sa seconde mission est plus directement opérationnelle, puisqu'elle consiste à participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des politiques de filière au travers de quatorze Comités stratégiques de filière (CSF). Ces derniers sont également des instances tripartites : ils sont composés de représentants des entreprises et des fédérations professionnelles, des syndicats de salariés et des pouvoirs publics – c'est-à-dire de l'État et, de plus en plus, nous l'espérons, des régions – ainsi que des autres acteurs économiques concernés, tels que les pôles de compétitivité. Les membres de chaque comité s'accordent sur une vision partagée des enjeux de la filière et sur les actions à mettre en oeuvre. Formalisées dans un contrat de filière, qui comprend des engagements de l'État et des industriels, ces actions visent notamment à renforcer la cohésion de la filière et à améliorer la compétitivité et la performance des entreprises, en particulier les PME et les ETI, dans les domaines de l'export, de l'emploi et des compétences, de la formation, de l'innovation, de l'accès au financement et du développement de l'économie circulaire.

Je précise que le lien entre le CNI et les CSF, d'une part, et le Parlement, d'autre part, a été récemment renforcé. En effet, sur la proposition de M. Jean Grellier, député et membre du CNI, et avec l'accord de MM. Brottes et Bartolone, un référent parlementaire, désigné parmi les membres de la commission des affaires économiques, a été nommé auprès de chaque CSF. Ainsi, Mme Valter est référente du CSF nucléaire et M. Giraud référent du CSF ferroviaire. Nous jugeons cette évolution très positive, dans la mesure où elle permettra une meilleure compréhension et une meilleure prise en compte des enjeux industriels du pays.

Les quatorze contrats de filière ont permis l'élaboration, depuis 2013, de 360 actions dont l'état d'avancement fait l'objet d'un rapport semestriel : 72 % d'entre elles ont été réalisées ou sont en cours de réalisation, 12 % sont entravées par divers obstacles et 14 % restent à lancer.

Parmi ces actions, celles qui visent à améliorer l'accès des entreprises au financement portent, tout d'abord, sur la création de fonds dédiés, tels que le Fonds de développement des entreprises du nucléaire (FDEN), le fonds Croissance Rail, consacré aux entreprises du secteur ferroviaire, ou le Fonds d'avenir automobile (FAA), qui a succédé au Fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA).

Un deuxième type d'actions consiste à améliorer l'information des PME sur les outils de financement adaptés à leurs besoins et leur formation à l'utilisation de ces outils.

Enfin, un troisième type d'actions concerne le financement de l'innovation, dont Bpifrance est un acteur central. S'il convient de saluer le développement des projets collaboratifs et le foisonnement des outils de financement de la recherche et développement, on peut regretter que le nombre des acteurs engendre une certaine complexité, même si les pôles de compétitivité jouent très bien leur rôle à cet égard.

Quelles sont les attentes des PME en la matière ?

Premièrement, le montage des dossiers est parfois trop complexe. Il faut donc encourager des initiatives telles que celle qui a été prise par le Programme d'investissement d'avenir (PIA) pour alléger les dossiers de financement des PME. Deuxièmement, ces dernières recherchent avant tout un partage du risque. Or, on observe que la part des subventions diminue fortement au profit d'avances remboursables. Troisièmement, il est important de financer non seulement la R&D, mais aussi la phase d'industrialisation et le lancement sur le marché des produits innovants. À cet égard, il nous paraît important d'encourager le développement de financements adaptés tels que les Prêts pour l'innovation (PPI) de Bpifrance. Enfin, il convient de prendre en compte l'innovation non technologique, par exemple en matière de marketing ou d'organisation, comme le fait Bpifrance depuis peu à travers le concept d'innovation nouvelle génération.

J'en viens maintenant aux questions que vous nous avez adressées. La première porte sur le lien entre les comités stratégiques de filière et les 34 plans, devenus les dix solutions, de la Nouvelle France industrielle.

Il importe, tout d'abord, de bien comprendre les rôles respectifs de ces plans et des CSF. Ces derniers sont chargés de mettre en oeuvre des actions destinées à renforcer la cohésion et la structuration de la filière, alors que les plans ont pour objet de fédérer des acteurs industriels, c'est-à-dire les chefs d'entreprise, pour accélérer le développement d'objets ou d'activités industriels dans des secteurs particulièrement porteurs où la France dispose d'un avantage compétitif. Leurs objectifs sont donc complémentaires. La solution mobilité écologique, par exemple, concerne le véhicule consommant moins de 2 litres aux 100 km, les bornes électriques de recharge, le véhicule dit « autonome » – afin de ne pas laisser Google prendre le leadership dans ce domaine – et les solutions de stockage de l'énergie.

Si l'identification des 34 plans est en partie issue de la réflexion des CSF, l'ensemble du dispositif est coordonné par la direction générale des entreprises et par le cabinet du ministre de l'industrie, en liaison avec les autres ministères impliqués. Les chefs de projet de chaque plan ont cependant pu présenter leur feuille de route aux comités stratégiques de filière concernés et il est prévu, dans le cadre du nouveau dispositif annoncé par M. Macron le 18 mai dernier à Nantes, que les CSF continuent d'entretenir une relation étroite avec les solutions pour une Nouvelle France industrielle. Par ailleurs, les relations entre les solutions et les CSF ont été clarifiées. Ainsi, certaines compétences des CSF que les chefs de projet estimaient nécessaires à l'accomplissement de leur mission – notamment en matière d'évolution de la réglementation ou de création d'une offre de formation – ont été réaffirmées. Au demeurant, les mêmes acteurs occupent parfois des fonctions dans l'un et l'autre des dispositifs : c'est le cas de Jean-Philippe Girard, ici présent, qui est à la fois vice-président du CSF agroalimentaire et chef de projet de la solution agroalimentaire. Nous cherchons donc à faire avancer ces deux actions au profit de l'industrie française ensemble et en bonne intelligence, en nous soutenant mutuellement.

Je veux dire un mot du plan Usine du futur, devenu la solution Industrie du futur, qui a la particularité d'être transversal et dont l'ambition a été étendue, puisqu'y ont été associées l'ensemble des fédérations professionnelles concernées par la modernisation de l'outil productif et la création d'une offre technologique française pour l'industrie du futur. Une confédération a été créée, qui regroupe ces fédérations professionnelles et les acteurs académiques qui porteront le déploiement du plan. Le ministre, qui présidera le comité de pilotage de cette solution, a demandé au CNI de s'impliquer dans le groupe de travail consacré à l'évolution des métiers et des formations.

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