Intervention de Charles de Courson

Réunion du 1er juillet 2015 à 10h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

L'analyse du projet de loi de règlement comme des comptes nationaux nous conduit à plusieurs constats. En premier lieu, les dépenses publiques – qui incluent les crédits d'impôts – continuent de croître deux fois plus vite que le PIB en valeur.

À en croire le Gouvernement, l'ensemble des dépenses publiques ont augmenté de 0,9 % en 2013, ce qui est vrai hors crédits d'impôt : si l'on inclut ces derniers, la progression s'établit en réalité à 1,6 %, contre une croissance du PIB de 0,8 % en valeur. Autrement dit les dépenses publiques croissent deux fois plus vite que le PIB. L'an dernier, le différentiel était de 0,7 % : 1,8 % de progression des dépenses contre 1,1 % de croissance. Bref, il ne faut pas s'étonner que le poids des dépenses publiques continue d'augmenter : hors crédits d'impôt, celles-ci passent de 56,2 % du PIB en 2013 à 56,3 % en 2014, et de 57 % à 57,5 % si l'on inclut les crédits d'impôt.

Je ne suis pas sectaire, M. le secrétaire d'État le sait. Des efforts ont été consentis, mais ils demeurent notoirement insuffisants.

Sur les prélèvements obligatoires aussi, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Hors crédits d'impôt, ils passent de 44,7 % à 44,9 % du PIB – soit à peu près 4 milliards d'euros supplémentaires de pression fiscale –, et de 45,5 % à 46,1 % en incluant les crédits d'impôt. Il est donc faux de dire que les impôts baissent : je ne cesse de le répéter depuis vingt-deux ans que je siège dans cette commission. L'actuel Gouvernement ne fait que freiner l'augmentation de la pression fiscale, sans inverser la courbe.

Pour couronner le tout, les déficits publics sont ramenés de 4,1 % en 2013 à 4 % en 2014, soit une diminution de 0,1 % seulement, qui au demeurant tient entièrement à la stabilisation des comptes de la sécurité sociale et, surtout, à la réduction du déficit des collectivités locales de 8,5 milliards en 2013 à 4,5 milliards en 2014 – en d'autres termes de moins 0,4 % du PIB à moins 0,2 %. Le gain de 0,2 point, obtenu par conséquent grâce aux administrations publiques locales, s'explique d'ailleurs par la chute des investissements, elle-même liée au cycle électoral et, dans une moindre mesure, à la réduction des aides.

Pour ce qui est de l'État et de ses administrations publiques centrales – APUC –, le déficit augmente, passant de 68,7 milliards d'euros en 2013 à 71,8 milliards en 2014, soit une progression de 3,1 milliards. Globalement, pour l'ensemble des dépenses, le gain n'est guère que de 1,6 milliard, sachant que le déficit, pour la sécurité sociale, est réduit de 600 millions seulement ; d'où une réduction des déficits limitée à 0,1 %. C'est dire la gravité de la situation !

Je remercie notre rapporteure générale d'avoir calculé l'évolution des effectifs de l'État et de ses opérateurs, comme nous le demandions depuis des années. La baisse était de 17 200 en 2013 et de 5 000 en 2014 – lorsque la droite était aux affaires, le nombre de postes supprimés par an était de 30 000. Monsieur le secrétaire d'État, si d'un côté je vous félicite de ne pas pourvoir les postes qui sont ouverts et de vous être converti à la baisse, de l'autre je ne peux que regretter que vous ne soyez pas assez dur avec vos collègues. Allez au-delà : une réduction de 5 000 postes, ce n'est pas suffisant compte tenu de l'état de nos finances publiques – même si vous faites croire à nos collègues de la majorité que vous stabilisez les effectifs. Fermez les vannes !

Enfin, je m'interroge sur l'écart croissant qui existe entre le déficit effectif de nos finances publiques et le déficit structurel. Sachant qu'en 2014 le déficit effectif était de 4 % et le déficit structurel de 2,1 %, l'écart est de 1,9 %, contre 0,7 % en 2011, 1,2 % en 2012, et 1,5 % en 2013. Si la théorie des cycles économiques était encore valable, il devrait y avoir une inversion. Or, ce n'est pas du tout ce que l'on constate. Je le répète, pour la quinzième fois au moins ici…

Ces concepts sont devenus totalement inopérationnels. Pire, les gouvernements successifs, l'actuel comme les précédents, ne cessent de faire croire à ceux qui n'y comprennent rien – il faut reconnaître que la distinction entre le déficit structurel et le déficit conjoncturel n'est pas évidente – que la croissance potentielle sera de l'ordre de 2 %, voire 2,5 %.

Mes chers collègues, je vous recommande de lire l'excellent ouvrage qui vient de paraître sur la croissance zéro. Vous verrez que son auteur dynamite toutes ces croyances qui ont conduit le pays à lui faire croire qu'il était plus riche qu'il ne l'est en réalité.

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