Intervention de Gilles Benhamou

Réunion du 6 décembre 2012 à 9h30
Mission d'information sur les coûts de production en france

Gilles Benhamou, président-directeur général du groupe Asteel Flash :

Créé en 2000, le groupe Asteel Flash est aujourd'hui le numéro 2 en Europe du manufacturing électronique. Présent dans huit pays – France, Chine, États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, République Tchèque, Tunisie et Mexique –, il emploie 5 700 personnes, dont 1 200 en France, 2 000 en Chine et 1 000 aux Etats-Unis. Sa dimension internationale lui permet d'apprécier les données du marché du travail qui sont de nature à influencer le coût de production et la compétitivité. Le chiffre d'affaires réalisé en France ne représente plus actuellement que 22 % de celui du groupe.

L'une de nos préoccupations essentielles est relative aux distorsions en matière d'approche des marchés, qui existent entre notamment les Américains, les Chinois et les Français. Si nos industriels français développent tous leurs marchés dans des pays étrangers qui imposent eux-mêmes des règles significatives de « local contain », comment voulez-vous, à terme, avoir une industrie en France ? Quels que soient nos efforts en matière de prix ou de réduction de salaire, rien n'y fera si une telle distorsion subsiste. On ne créera pas d'emplois si l'on n'a pas de marchés en France. Même nos radars civils sont implémentés en Malaisie ! Avant de réduire le coût du travail, commençons donc par appliquer les mêmes règles que les autres pays ! Et je ne fais pas allusion uniquement aux pays en voie de développement. Moi, je n'ai aucun souci, je sais prendre les marchés en Californie, dans le New Jersey, mais je ne sais pas les prendre en France ! Commençons par nous poser concrètement les vraies questions sur les marchés publics et ceux des collectivités locales !

Par ailleurs, la flexibilité de l'emploi est un facteur essentiel qui conditionne la décision du groupe de créer des emplois en France ou de délocaliser. Nous ne pouvons en effet être compétitifs sur des marchés à fortes variations si le coût d'un licenciement représente dix années de salaires. Le personnel et la direction d'une entreprise doivent pouvoir établir des règles souples et citoyennes pour tenir compte de ce phénomène.

S'agissant des coûts de production, je félicite le Gouvernement pour sa décision. J'appelle en outre tous les journalistes ici présents à continuer à parler de l'entreprise et de la compétitivité qui a fait l'objet d'un parfait mutisme durant des dizaines d'années. Il a fallu attendre la parution d'un rapport évoquant la perte d'un million d'emplois industriels pour commencer à se réveiller ! J'en profite pour souligner que la mesure qui vient d'être adoptée aura pour effet de réduire les charges sociales non pas de 6 %, mais de 9 %, car le crédit d'impôt est exonéré fiscalement – 9 % de réduction de charges sociales sur les salaires et 33 % d'impôt, il reste 6 % en bas de ligne ! Ma seule réserve tient au fait que, contrairement à ce que préconisait le rapport Gallois, à savoir une concentration de l'effort sur les entreprises compétitives et industrielles, les mesures actuelles ont un champ d'application tellement large que leur impact sur la relance de la compétitivité ne sera sans doute pas significatif – seulement 20 % des entreprises bénéficiaires sont concernées par la compétitivité. Pour avoir un effet de levier nettement plus important, il aurait fallu concentrer les aides sur les entreprises compétitives.

Tels sont les trois thèmes qui me tiennent à coeur.

Enfin, je défie n'importe quel député d'arriver à établir un bulletin de salaire tellement c'est compliqué ! J'aimerais bien que l'on ait un peu conscience du travail que cela représente pour des entreprises auxquelles, du reste, des inspecteurs de la sécurité sociale n'hésitent parfois pas à appliquer des pénalités après six mois passés à procéder à des vérifications ! Et je ne parle pas du travail que cela représente pour les petites entreprises de moins de dix personnes ! Il y a donc beaucoup de sujets pratiques à traiter si nous voulons relancer notre industrie et créer de l'emploi.

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