Intervention de Marie-Françoise Bechtel

Réunion du 1er juillet 2015 à 8h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Françoise Bechtel :

Monsieur le ministre, je salue votre discours mesuré et maîtrisé sur un thème qui le mérite. Vous avez distingué le quantitatif du qualitatif dans votre appréhension de l'immigration, et souligné la nécessité à la fois d'endiguer des flux et de traiter humainement et dans le respect de l'État de droit les personnes concernées. Vous avez décrit un système qui n'est pas une révolution mais une évolution rendue nécessaire par les règles européennes et par le changement des situations que nous rencontrons. Ces dernières ne sont pas toujours neuves comme l'atteste l'afflux des migrants en 2011.

Ma longue pratique de ces questions, en qualité de juge notamment, m'a convaincue qu'il n'y a pas une immigration, mais des immigrations. Les situations de migration sont diverses et renvoient à des réalités nuancées que la loi doit parvenir à appréhender bien que les termes de celles-ci se caractérisent non par la complexité mais par la généralité. Nous éprouvons des difficultés à faire appliquer le cadre de la loi à des situations complexes et humaines.

Monsieur le rapporteur, M. Jean-Pierre Chevènement avait intégré le passeport talent dans la loi du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile, dite loi Reseda. Nous sommes tous soucieux de favoriser l'attractivité du territoire et séduits par l'idée d'attirer les meilleurs. Mais cette politique présente un paradoxe avec celle du codéveloppement. Si l'on veut tarir l'immigration, il faut permettre aux pays d'émigration de se développer, ce qui nécessite le concours de leurs élites. Je ne prétends pas avoir la solution à ce problème difficile mais il convient de ne pas l'éluder.

Le véritable parcours du combattant que constitue le parcours administratif du demandeur de titre de séjour doit être simplifié. Je me demande s'il n'y aurait pas lieu d'aller plus loin même si cela relèverait de l'application de la loi et d'une circulaire. Où en est le guichet unique pour les étudiants que nous avions tenté de mettre en place au tournant des années 2000 ? L'idée de délivrer sur le campus même le titre de séjour était audacieuse et avait fait frissonner l'esprit universitaire. Les oppositions avaient été importantes mais devons-nous pour autant renoncer ?

Les directives ministérielles ne sont pas appliquées uniformément par les préfectures. Certaines d'entre elles, trop nombreuses, exigent des étrangers des démarches ou des pièces justificatives que la loi ne requiert pas. Nous avions tenté de mettre en place une formation des personnels de préfecture dans ce domaine mais la restriction des dépenses publiques a des conséquences sur le nombre, la motivation et la formation de ces agents. Or ceux-ci sont indispensables pour que les titres soient délivrés de manière humaine, raisonnée et en conformité avec la loi. La loi et rien que la loi, voilà quelle doit être notre boussole en la matière !

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