Intervention de Alain Tourret

Réunion du 1er juillet 2015 à 8h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

Les grandes migrations actuelles diffèrent de celles que nous connaissons depuis plusieurs dizaines d'années ; elles s'inscrivent dans un climat de crise mondiale marqué par l'appauvrissement des pays d'accueil et de départ. Les difficultés sont plus fortes dans les pays d'émigration qui subissent des chocs économiques violents dus notamment au réchauffement climatique. Celui-ci entraîne la désagrégation de ces pays puisque des centaines de milliers d'habitants des campagnes rejoignent les grandes aires urbaines avant d'émigrer.

En tant qu'humaniste, je rappelle avec force que l'étranger veut tout simplement vivre ; il a le droit de vivre. L'appel de l'éden, de la prospérité, de la protection par la santé, des anciennes sociétés coloniales se mêle à celui des familles déjà établies dans les pays d'accueil. Si l'on suit M. Ciotti et ses amis, l'étranger constitue un risque pour nos sociétés. Cette idée est totalement fausse ! L'étranger n'est pas un élément de désagrégation de nos sociétés mais un facteur de leur enrichissement. C'est une évidence s'agissant des étudiants, des médecins et de tous les cadres que nous accueillons avec sympathie. Ainsi, toutefois, nous contribuons à désorganiser les structures de leurs pays d'origine. Je suis toujours inquiet de voir un médecin en provenance d'une région pauvre arriver en France pour répondre à nos besoins de présence médicale car il ruine le pays qu'il quitte.

Israël est un petit pays étonnant qui, en dix ans, vient d'accueillir entre 1 million et 1,5 million d'étrangers. Cela ne l'empêche pas de gagner tous les combats. Je me suis rendu très souvent dans ce pays et j'ai constaté que l'apport de l'immigration et le syncrétisme de toutes les cultures avaient permis d'y créer plus de start-up que dans toute l'Europe réunie. Il y a des malheurs en Israël et en Palestine mais nous avons des leçons d'intégration à prendre de leur part.

Nous devons formuler une réponse européenne. Je nourris beaucoup d'admiration pour l'Italie, qui subit actuellement un choc important, et beaucoup d'indignation envers ceux qui souhaitent la laisser seule. Là, ce sont des leçons d'humanité que nous avons à prendre. Nos amis allemands souffrent d'un affaiblissement de leur natalité : je me demande pourquoi ils n'accueillent pas d'autres populations qui souhaitent s'intégrer dans leur pays.

Aucune solution ne sera durable si nous ne trouvons pas, comme l'a fort bien dit M. le ministre, un équilibre entre la sécurité et l'accueil, entre les incompréhensions et l'humanisme que nous devons défendre devant nos concitoyens. Cela nécessite un codéveloppement avec l'Afrique dont nous sommes aujourd'hui fort éloignés. Nous ne montrons aucune détermination en la matière. J'admire l'action de notre ancien collègue Jean-Louis Borloo, que le Gouvernement soutient fortement. Il faudrait que ses initiatives soient mieux connues et que nous puissions l'entendre parler de ces sujets. Comme vous le percevez, monsieur le président, c'est l'humaniste en moi qui parle plutôt que le défenseur de la nécessaire sécurité de notre société. Les immigrés ont le droit de vivre. Ce sont des êtres humains comme nous.

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