Nous avions compris que le Gouvernement, en même temps qu’il voulait engager – il s’agit d’un marqueur du mandat – des recrutements dans l’éducation nationale qui ne constituent assurément pas la bonne manière de redresser la qualité de l’éducation dans notre pays, avait trouvé une forme de compromis dans la stabilité globale des effectifs.
Alors pourquoi, en 2016, cette divergence ? Oui, il fallait modifier la mauvaise trajectoire que vous aviez tracée – Jean-François Lamour sera d’accord avec moi – dans le domaine de la défense. Oui, un certain nombre de missions sont prioritaires, y compris, parfois, par leurs effectifs.
Mais alors, comme gouverner, c’est choisir, il fallait redoubler d’efforts dans d’autres secteurs : or c’est un choix que vous ne faites pas. Et quand vous distinguez, apparemment et sous la contrainte des faits, des priorités nouvelles, elle s’empilent sur les précédentes. C’est affaire de bon sens. Chaque Français le sait : accumuler les priorités revient à n’en plus avoir aucune.
Alors, oui, un certain nombre de choses baissent, dans vos perspectives pour 2016, et c’est intéressant : le prélèvement pour l’Union européenne, par exemple, de plus de 1,1 milliard d’euros par rapport à la loi de programmation. Est-ce cela, la vertu budgétaire du Gouvernement et de la majorité ? Oui, des choses baissent, mais d’une façon qui fait penser à Marcel Aymé, l’auteur de La tête des autres : ce qui baisse, c’est les autres. C’est assez commode comme présentation. Cela peut tenir la séance mais cela ne fait pas la solidité d’une structure budgétaire et n’établit pas la crédibilité de notre pays.
Le prélèvement de l’Union européenne baisse donc de 1,1 milliard d’euros par rapport à la loi de programmation. La charge de la dette va également baisser, de plus de 3 milliards d’euros par rapport à cette même loi. Prenons acte – et vous avez raison de le faire – d’une baisse des taux d’intérêt au regard des prévisions. Mais vous savez aussi, cela ne vous a pas échappé, que les taux d’intérêt ont, ces derniers mois, fluctué.
Je l’ai évoqué lundi dernier lors de l’examen du projet de loi de règlement : nous savons bien, certes, que les décisions et les actes de l’Agence France Trésor ne sont pas caractérisables au même moment de l’année, avec un effet plein sur une année, mais il reste qu’une augmentation d’un point de ces taux aurait des conséquences importantes.
Prenons des chiffres simples concernant l’effet d’une telle augmentation : si elle devait advenir, au bout de dix ans, elle occasionnerait, au cours de la dixième année, un coût supplémentaire sur l’ensemble de la dette de 15 milliards d’euros. Son coût cumulé sur ces dix années s’élèverait à 100 milliards d’euros.
Les perspectives et l’orientation des finances publiques ne peuvent et ne doivent pas reposer sur la seule baisse de la charge de la dette.
S’agissant des transferts aux collectivités locales, je ne suis pas de ceux qui les dénoncent dans leur principe, parce que la réalité est que l’ancienne majorité l’avait évoquée, et que, si nous revenions demain aux affaires, nous le ferions aussi, probablement avec davantage de doigté et d’intelligence que vous n’y mettez.