Je ne répéterai pas ce qui a déjà été dit par mes collègues du groupe Les Républicains et par notre excellent président de commission, Gilles Carrez, et je me cantonnerai aux outre-mer.
Chaque année, j’ai l’occasion de reconnaître qu’en période de fortes contraintes budgétaires, les crédits destinés aux outre-mer sont constants, voire en légère augmentation. Toutefois, dans le cadre de ce débat d’orientation budgétaire, je tiens, dans un premier temps, à vous encourager à plus d’audace, plus d’ambition pour les outre-mer. Comme vous y a invité Gilles Carrez, take the bull by the horns !
En effet, je ne cesse de le rappeler, nos outre-mer sont confrontés à des handicaps structurels, qui minent l’emploi et la croissance de leurs entreprises. Entre mai 2014 et mai 2015, le taux de chômage dans les seuls départements d’outre-mer a augmenté de 24 % ; aujourd’hui, le nombre des demandeurs d’emploi atteint des records, frisant les 30 % à La Réunion. Le chômage touche largement les jeunes, même si, il faut bien le reconnaître, les choses ont eu tendance à s’améliorer ces derniers temps.
Le PIB de l’ensemble de l’outre-mer ne représente que la moitié du PIB national, inférieur à la région la plus pauvre de l’hexagone. Nos entreprises, souvent de petite taille ou de très petite taille, sont soumises à une concurrence régionale importante, quasi insurmontable.
Je tiens d’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, à vous faire part de mes inquiétudes, que partagent nombre de mes collègues, quant aux réserves émises par la Commission européenne sur l’octroi de mer, qui se voit adossé dorénavant au règlement général d’exemption par catégorie. Espérons que la décision de la Commission, que votre gouvernement a acceptée, ne sonnera pas le glas d’une manne financière essentielle pour le développement de nos territoires.
Monsieur le secrétaire d’État, nos outre-mer ont tant d’atouts : valorisons-les !
Le tourisme, d’abord. Ce secteur, en grande difficulté depuis le début des années 2000, frappé de plein fouet par la crise économique de 2008 – eh oui : elle a eu lieu chez nous aussi ! –, emploie près de 30 000 personnes dans les outre-mer. Dans certaines collectivités, comme Saint-Barthélemy et Saint-Martin, le secteur touristique représente respectivement 37 % et 28 % des emplois du secteur marchand.
Le tourisme doit être un levier de développement prioritaire pour nos outre-mer. Pour cela, il faut une action volontaire de l’État, que la Cour des comptes elle-même a appelée de ses voeux dans son rapport annuel de 2014. Quand l’État prendra-t-il la mesure du besoin de profond changement de l’économie de nos territoires d’outre-mer ?
Les dix mesures pour la croissance et l’emploi dont le Premier ministre avait fait la promotion lors de son déplacement dans l’océan Indien sont la preuve que nous continuons à appliquer une politique hexagonale, qui peine à faire ses preuves dans des territoires minés par les dysfonctionnements structurels et dont les spécificités sont à mille lieues de la réalité que l’on connaît à Cherbourg, Nantes ou Marseille.
Après ce constat en demi-teinte concernant les outre-mer en général, permettez-moi de m’attarder quelques instants sur la situation particulière des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et plus particulièrement sur les cas de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, que j’ai l’honneur de représenter.
Je souhaite profiter du temps de parole qui m’est imparti ce jour pour saluer quelques belles avancées pour ces collectivités. Je pense par exemple à la caisse de sécurité sociale qui prend forme à Saint-Barthélemy, ce qui répond à une demande forte de ce territoire si particulier. Je pense aussi à l’observatoire des marges, des prix et des revenus qui devrait voir le jour à Saint-Martin lorsque le projet de loi relatif à la modernisation du droit de l’outre-mer – rebaptisé projet de loi d’actualisation du droit des outre-mer –, que nous examinons en ce moment, aura été adopté. Je pense encore à la publication du décret relatif au taux de la réduction d’impôt applicable au secteur de la rénovation hôtelière à Saint-Martin, qui vient pallier la suppression du dispositif d’aide à la rénovation hôtelière prévue par la loi de finances pour 2015. Voilà pour le verre à moitié plein.
Quant au verre à moitié vide, nos collectivités attendent la concrétisation des engagements pris par le chef de l’État lors de son déplacement dans nos territoires il y a quelques semaines. Il en est ainsi du dossier épineux des dotations globales de compensation négative pour les deux îles et de la création d’un code NATINF pour les infractions routières dans la collectivité de Saint-Martin, question en suspens depuis des années et qui aurait dû être réglée pour le 15 mai dernier, sans oublier la création d’une chambre détachée du tribunal de grande instance de Basse-Terre à Saint-Martin et la remise en état du cadastre.
Permettez-moi de conclure mon intervention en insistant une nouvelle fois sur la nécessité de prendre pleinement en considération les spécificités des collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution. Celles-ci, en raison notamment de leur compétence fiscale, restent systématiquement exclues des dispositifs d’aide nationaux. C’est ainsi le cas du CICE, auxquelles nos collectivités sont inéligibles – mais la liste des exemples serait trop longue. Mon propos est simplement, monsieur le secrétaire d’État, de souligner qu’à la fracture existante entre les outre-mer et l’Hexagone, il ne faudrait pas ajouter une nouvelle fracture, entre les départements d’outre-mer et les collectivités d’outre-mer. Le pas vers plus d’autonomie est certes le choix de la responsabilité, mais il ne doit pas être un prix à payer unilatéralement.