Intervention de René Dosière

Réunion du 7 juillet 2015 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRené Dosière, rapporteur :

Pour être technique, ce texte n'en est pas moins d'une grande importance politique pour la Nouvelle-Calédonie. En effet, il touche au corps électoral ; or dans ce que l'accord de Nouméa nomme le « processus de décolonisation pacifique de la Nouvelle-Calédonie », le principe de sortie démocratique a été accepté par tous les partenaires, y compris les Kanaks. Les années précédentes, le Gouvernement avait eu la tentation de faire de la Nouvelle-Calédonie une colonie de peuplement en mettant les Kanaks en minorité par rapport aux Européens. C'est pourquoi les Kanaks ont souhaité, tant dans les accords Matignon que dans l'Accord de Nouméa, restreindre le corps électoral aux seuls Calédoniens directement concernés, qui justifiaient d'une période de résidence d'au moins dix ans au moment du vote. Toutefois, si tous les partenaires ont accepté le principe d'un corps électoral restreint, certains estimaient que celui-ci devait être glissant – au bout de dix ans, on retrouvait le droit de vote – alors que d'autres soutenaient qu'il devait être gelé à la date du vote sur l'Accord de Nouméa, le 8 novembre 1998. Après quelques péripéties, en 2007, le Parlement, par révision constitutionnelle, a opté pour la seconde solution.

Depuis, certains Français, que cette disposition privait du droit de vote lors des élections provinciales, ont pu être inscrits sur les listes, ce qui a suscité des contestations. Ce problème, que le texte examiné laisse de côté, a été acté par les partenaires du comité des signataires et fera l'objet d'une étude politique ultérieure. Le projet de loi organique ne porte que sur la consultation finale de l'Accord de Nouméa, qui décidera de l'éventuel accès à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie. Cette consultation n'interviendra vraisemblablement qu'en novembre 2018, mais le Gouvernement s'est attaché à la rendre inattaquable en établissant rapidement cette liste électorale particulière. Contrairement aux listes spécifiques aux élections provinciales, la composition de la liste de sortie n'a jamais fait l'objet de contestation ; mais il faut l'élaborer assez tôt pour qu'un maximum d'électeurs puissent y être inscrits d'office, conformément à la décision du comité des signataires. S'il faut encore veiller à améliorer le fonctionnement des commissions électorales, on doit se réjouir que le contentieux électoral soit d'ores et déjà réglé.

L'Accord de Nouméa prévoyait que si la première consultation de sortie était négative, une deuxième devait avoir lieu ; si celle-ci était à nouveau négative, il en fallait une troisième. En établissant la loi organique en 1999, nous avions estimé possible de s'arrêter à deux consultations, mais le Conseil constitutionnel en a jugé autrement, considérant qu'il fallait respecter les termes de l'Accord de Nouméa. Suivant sa demande, le Gouvernement a rétabli cette disposition.

Le domaine étant éminemment politique, l'Assemblée nationale peut ratifier le texte approuvé par les partenaires locaux. Pourtant, si en l'occurrence une ratification paraît souhaitable et conforme à l'Accord de Nouméa, l'Assemblée aura tout loisir de retrouver son pouvoir d'initiative à l'occasion d'autres dispositions relatives à la Nouvelle-Calédonie sans avoir à consulter systématiquement le comité des signataires qui, et c'est heureux, n'est pas compétent dans tous les domaines touchant au fonctionnement de ce territoire.

Je vous invite, à l'instar des sénateurs, à adopter ce texte en l'état.

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