Intervention de Hervé Pellois

Réunion du 7 juillet 2015 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Pellois :

La loi d'avenir pour l'agriculture, l'agroalimentaire et la forêt accorde une place prédominante à l'accès à une alimentation de qualité et sécurisée pour tous. Il s'agit, comme l'écrit la rapporteure de la mission, de « donner à l'agro-écologie le tremplin dont elle aura besoin pour devenir un modèle de base de la production alimentaire ».

Parmi la cinquantaine de propositions très variées, certaines sont à mettre en place au niveau européen – la réorientation des aides de la PAC en vue de privilégier la création d'emplois plutôt que la taille des exploitations –, d'autres seraient applicables à l'échelon beaucoup plus modeste de l'entreprise, au regard de la RSE. Ces deux exemples témoignent de la transversalité de l'enjeu.

Je tiens à saluer l'esprit d'ouverture qui nous a conduits à procéder à de nombreuses auditions et déplacements sur le terrain. Nous avons ainsi beaucoup appris des particularités économiques et culturelles des territoires insulaires de Mayotte et de La Réunion. Éloignée de la métropole et soumise à la concurrence de pays tiers à l'Union européenne aux coûts de production très bas, la production agricole locale mahoraise et réunionnaise fait face à des obstacles de taille, tels que le dumping des importateurs qui inondent le marché local de produits de qualité médiocre. Ainsi, le poulet surgelé à La Réunion et les ailes de poulet congelées à Mayotte entrent en concurrence directe avec la production locale et en freinent l'expansion.

S'il faudra encore du temps pour organiser les filières à Mayotte et y promouvoir les circuits courts, la tendance observée sur le reste du territoire français, y compris à La Réunion, est encourageante. Selon un récent sondage, 72 % des jeunes intéressés par une installation en agriculture souhaitent utiliser les circuits courts. Les SAFER, acteurs clefs de l'installation et du maintien de l'activité agricole, ont donc un rôle à jouer, en lien avec les collectivités territoriales, pour faciliter l'installation d'agriculteurs ayant opté pour de tels circuits. C'est pourquoi je soutiens la proposition d'inscrire les projets d'installation d'agriculteurs promouvant les circuits courts parmi les objectifs prioritaires des SAFER.

Les projets alimentaires territoriaux, créés par la loi d'avenir pour l'agriculture d'octobre 2014, sont des outils très utiles aux circuits courts. Je suis, moi aussi, persuadé qu'il faut laisser une grande latitude aux acteurs locaux pour organiser leur stratégie alimentaire territoriale. Les projets alimentaires territoriaux se traduisent notamment par la mise en place d'un approvisionnement de proximité pour la restauration collective. La communauté urbaine de Bordeaux utilise ainsi 40 % de produits locaux. Toutes les collectivités devraient développer de tels projets en y associant très étroitement les établissements ayant une offre de restauration collective importante, mais aussi les consommateurs, les commerçants et artisans et les restaurateurs. À cette fin, l'obligation d'afficher l'origine des produits dans la restauration collective paraît judicieuse, car elle incitera les collectivités à développer des stratégies du mieux-disant, et donc à préférer les fournisseurs locaux.

Je suis tout à fait d'accord également sur la nécessité d'encourager les outils coopératifs de transformation, tels que les légumeries, les ateliers de découpe et les abattoirs poly-espèces de proximité, par le biais de soutiens publics à l'investissement et aux projets innovants. Nous avons pu constater, en visitant un atelier collectif de découpe de viande créé par une coopérative d'utilisation de matériel agricole à Nantes, l'intérêt qu'il y a à développer ce genre de structures, qui combine mutualisation des coûts et vente directe du produit.

J'insiste également sur la nécessité de mettre en place un cadre réglementaire adapté, simplifié et avantageux pour les exploitants en circuit court. Nous ne pouvons pas nous contenter des dérogations prévues par le droit européen qui ne sauraient constituer un cadre réglementaire digne de ce nom. Il s'agit de donner des garanties aux agriculteurs faisant ce choix vertueux, notamment en matière sanitaire. Les contrôles des services de l'État doivent tenir compte de la taille des exploitations et privilégier davantage le conseil.

Enfin, il convient de mentionner les initiatives pour créer des ateliers d'insertion en production et en transformation, pour venir en aide aux personnes en situation précaire et faire reculer le gaspillage alimentaire.

Avec la loi d'avenir, nous avons voulu soutenir une agriculture responsable et durable, dans le respect de son environnement. Les circuits courts y ont toute leur place. Il s'agit désormais de donner aux agriculteurs les outils adaptés pour se saisir de cette opportunité afin de répondre aux exigences sociales, économiques et environnementales de nos concitoyens, de plus en plus soucieux de la qualité de leur alimentation. Les initiatives en ce sens sont très nombreuses et très encourageantes.

Je n'ai pas vu, dans les propositions formulées par la rapporteure, de contraintes mais bien des ouvertures et un souci de diversification de notre politique agricole, aujourd'hui plus que jamais nécessaires.

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