Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 26 mai 2015 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Lellouche :

Permettez-moi de vous féliciter pour le record de ventes d'armes. Il est doux à nos oreilles d'entendre des hommes de gauche valider les thèses que nous défendions jadis, qui étaient critiquées au nom des marchands de canons et fauteurs de troubles impérialistes ! Et il est bon de voir la gauche atterrir dans la géopolitique du monde réel et en plus réussir – aidée, il faut le dire, par votre talent et quelques changements au Moyen-Orient.

Plusieurs questions se posent au sujet de ce texte, qui nous est parvenu très tard.

D'abord, l'essentiel des 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires porte sur l'après 2017. Il s'agit donc d'un chèque tiré sur le prochain Gouvernement ! On aurait pu espérer que davantage d'effort soit fourni sur la période qui nous sépare de l'élection présidentielle de 2017, vu l'urgence.

Pour l'année 2015, nous avons tous mesuré un besoin de financement, que vous attribuez uniquement aux REX. Mais il faudrait ajouter aussi les reports de crédits, le montant d'1,2 ou 1,4 milliard consacré aux OPEX et le coût de l'opération Sentinelle, que je souhaiterais que vous nous précisiez. Si ce besoin est comblé, merci de nous préciser en quoi, et de nous dire par quoi vous allez remplacer les 2,2 ou 2,4 milliards de REX. J'avais cru comprendre qu'il ne devait pas y avoir de loi de finances rectificative : vous nous dites maintenant qu'il y en aura une, ce qui est une bonne nouvelle – nous la demandions. Mais d'où proviendront ces fonds de remplacement ? Par ailleurs, qui va financer le surcoût des OPEX, par rapport aux 450 millions d'euros budgétés, ainsi que l'opération Sentinelle ? Au total, il me semble que le « trou » pour l'année 2015 avoisine plutôt les 3,5 à 5 milliards d'euros que les 2,2 milliards des REX.

Comment sera financé le dédommagement sur les navires Mistral ? Quand aura-t-il lieu et qui paiera ?

S'agissant de la doctrine d'emploi des forces armées de terre sur le territoire national, est-il pensable de former des soldats à des opérations de police dans les aéroports ou devant des lieux de culte ? Est-ce leur mission ? Cette question mérite un vrai débat.

Concernant les OPEX, dans le dispositif actuel, nous sommes amenés à voter une fois, au plus tard quatre mois après la décision d'engagement, puis il n'y a plus vraiment de suivi. Or Sangaris est plus une opération de gendarmerie coûteuse et difficile qu'une opération militaire ; au Mali, si l'opération Serval est terminée, on n'a toujours pas d'accord de paix ; l'opération Barkhane est une intervention de présence longue, qui peut, notamment s'agissant de l'attitude à l'égard de la France, avoir des conséquences problématiques.

Votre texte soulève donc des questions de doctrine importantes sur la configuration de nos armées compte tenu de la menace intérieure, une question substantielle sur la nature des OPEX et une série de questions financières redoutables pour l'année 2015, jusqu'en 2017 et au-delà. Pour l'instant, nous sommes très sceptiques sur ce que nous entendons, à savoir des engagements chiffrés très forts et, derrière, une réalité difficile à appréhender clairement.

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