Intervention de Philippe Chalmin

Réunion du 8 juillet 2015 à 18h00
Commission des affaires économiques

Philippe Chalmin, président de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires :

Je ne veux pas vous vendre ma salade, mais prenez la peine de feuilleter notre rapport. Vous y trouverez une mine d'informations qui n'a aucun équivalent. De grâce ne me dites pas que nous manquons de transparence. Nous ne pouvons pas aller plus loin. Il y a des différences d'une enseigne à l'autre, mais nous sommes tenus par le secret statistique. La France possède un extraordinaire outil statistique qui fonctionne bien – je veux parler de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), du service statistique du ministère de l'agriculture, de FranceAgriMer – et qui n'a pas d'équivalent en Europe. M. Daniel a parlé de la filière du cuir. C'est ce qu'on appelle le cinquième quartier. Dans le rapport précédent, nous nous étions penchés en détail sur la valorisation du cinquième quartier. Son impact n'est pas énorme, il ne modifie pas les grands équilibres.

Là où vous avez raison, c'est que nous raisonnons en moyenne. Chaque exploitation agricole est une histoire différente des autres. La notion de prix de revient moyen cache des réalités totalement différentes. Mme Beaumeunier dit à juste titre que, dans nombre de cas, les agriculteurs pourront y trouver leur différence. Les modèles de vie évoluant, sans aller vers le gigantisme ni remettre en cause le modèle de l'agriculture familiale qui, sur la longue période, est le seul modèle qui tient bien, on peut tendre vers des modèles beaucoup plus associatifs qui ne sont pas uniquement des GAEC père-fils.

Ce qui me frappe, c'est que beaucoup de gens pensent que si le prix payé par le consommateur augmente, c'est le producteur qui en bénéficiera. Mais ce n'est pas ainsi que cela fonctionne parce que le marché des produits agricoles est totalement indépendant, qu'il s'ajuste sur l'offre et la demande à un moment donné. C'est là que le bât blesse. Il n'y a pas de juste prix. Parfois, le prix sur le marché est inférieur au coût de production.

Le document que je vous ai remis comporte une actualisation des prix des produits laitiers. Au vu du prix actuel du lait, les Néo-Zélandais s'en sortent. C'est moins vrai des agriculteurs français. Nous savons très bien qu'actuellement une centrale d'achat de la grande distribution achète le lait en Allemagne et en Espagne. Comment l'en empêcher ? Nous faisons partie de l'Europe. Il y a quelque part une relative indépendance entre les prix agricoles et les prix alimentaires. L'exemple le plus frappant est celui du pain. La baguette INSEE est un mélange entre la baguette traditionnelle du boulanger et la baguette de la grande distribution. Dans le quartier où nous nous trouvons actuellement, une baguette doit coûter entre 1 euro et 1,20 euro, contre 40 à 50 centimes dans la grande distribution. La baguette moyenne doit être à 80-90 centimes. Le prix de la farine en représente 10 à 15 % maximum. Le prix du blé est totalement indépendant du prix du pain. Et ce n'est pas parce que vous paierez la baguette de pain plus cher que l'agriculteur aura une rémunération plus grande sur le prix du blé qu'il produit.

Le lait sera sans doute le prochain grand souci de M. Amand. Sur ce dossier, on va dans le mur. Mme Le Loch estime qu'il faut davantage de régulation. C'est un mot que l'on emploie aussi bien en anglais qu'en français. Mais en anglais, cela veut dire que les règles du jeu sont respectées en matière d'offre et de demande. En français, le mot régulation est synonyme de stabilisation.

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