Le premier chapitre de notre rapport est consacré au projet Cigéo de stockage géologique profond. Comme vous le savez, le projet Cigéo a pour objectif la conception et, ultérieurement, la construction d'un stockage géologique des déchets radioactifs HAVL et MAVL qui sont inscrits au programme industriel de gestion des déchets (PIGD). Ses caractéristiques principales sont également bien connues : ce stockage doit être réalisé à une profondeur de 500 mètres, dans une couche d'argilite d'âge callovo-oxfordien (COx) d'une épaisseur d'environ 130 mètres, donc apte à confiner les radionucléides susceptibles de s'échapper des conteneurs de déchets. Ce stockage se situera en MeuseHaute-Marne, dans une zone appelée ZIRA, pour « zone d'intérêt pour une reconnaissance approfondie ».
Vous vous souvenez peut-être que, dans notre rapport précédent, nous avions attiré votre attention sur un risque de dérapage du dossier de demande d'autorisation de création (DAC) de Cigéo qui, selon la loi de 2006, devait être déposé en 2015. La nouvelle échéance pour le dépôt de la DAC est maintenant fixée à 2017. Dans son rapport, la Commission fait observer que, si ce report relâche un peu le calendrier, celui-ci reste toujours très serré. Elle souhaite qu'il soit désormais respecté, pour clarifier la gestion des déchets HAVL et MAVL.
À ce propos, la Commission se pose la questions suivante : comment concilier la précision exigée d'une DAC et la flexibilité de réalisation requise pour un ouvrage qui doit être exploité sur la longue durée, en restant réversible ?
En ce qui concerne les aspects scientifiques de ce projet, les études sur le comportement thermo-hydro-mécanique (THM) du COx ont conduit l'Andra à modifier de manière notable, par rapport à la phase d'esquisse, la configuration de la zone HAVL et son implantation au sein de la ZIRA. Il est apparu, à l'issue de ces études, que les critères THM ne devaient pas se limiter à des questions de température au voisinage des stocks de déchets. Ils doivent également prendre en compte l'état de contrainte engendré au sein du massif par la dissipation thermique qui peut, en certains endroits, générer des effets de traction susceptibles d'ouvrir, au moins localement, la roche. Des études et recherches sont encore nécessaires pour préciser le comportement THM du stockage, mieux définir l'extension des zones où le critère d'absence de fracturation du COx risque d'être violé et apprécier les conséquences d'une telle violation sur ses propriétés de confinement.
En conséquence, la Commission recommande à l'Andra de retenir dans la DAC un dessin d'architecture de la zone HAVL suffisamment prudent pour permettre le stockage de tous les déchets HAVL du PIGD dans le respect des règles de sûreté. Si une amélioration ultérieure des connaissances permettait une meilleure utilisation de l'espace souterrain, celle-ci pourrait éventuellement être proposée par la suite.
Un second point concerne les bitumes. Vous vous souvenez sans doute que, dans son rapport numéro 7, la Commission avait demandé à l'Andra et au CEA d'étudier très précisément le comportement des bitumes dans des conditions de température particulières, par exemple celles pouvant résulter d'un échauffement provoqué par un incendie. L'Andra et le CEA s'étaient engagés à déposer pour la fin de l'année 2014 les rapports conclusifs de ces études, ce qui a été fait en temps et en heure. La Commission a donc pu en examiner les résultats qui montrent, dans les conditions thermiques d'un incendie important, la tenue des colis de bitumes et l'inertie chimique des enrobés bitumineux. Ces nouvelles données dissipent les craintes liées aux incendies d'origine externe aux colis dans les installations de Cigéo. Néanmoins, la Commission estime que l'Andra devra poursuivre les études relatives à la stabilité chimique des enrobés bitumineux sur la durée d'exploitation du stockage, c'est-à-dire à peu près cent ans.