Intervention de Frédéric Gagey

Réunion du 15 juillet 2015 à 10h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Frédéric Gagey, président-directeur général d'Air France :

Je résumerai la situation en une phrase : Air France a progressé et progresse, dans le cadre du plan Transform 2015 lancé par Alexandre de Juniac. Je vous dirai quels éléments marquent les progrès réalisés entre 2011 et 2015, quelle est la situation actuelle et ce que nous attendons du plan Perform pour la période 2015-2020.

Le plan Transform 2015 avait pour objectif de faire évoluer la compagnie, qui accusait depuis 2009 des pertes opérationnelles, en agissant dans plusieurs directions.

La décision a ainsi été prise de restructurer l'activité cargo, qui recouvre le fret chargé en soute et les avions « tout cargo ». Notre flotte d'une dizaine de Boeing 747 « tout cargo » étant déficitaire, nous l'avons réduite à deux avions, avec un recentrage sur le fret en soutes, qui ont été optimisées à cet effet. Le transport de marchandises bénéficie de la sorte de l'étendue du réseau « passage » de la compagnie. Cette stratégie a été suivie par d'autres compagnies, dont KLM, avec un peu de retard sur Air France. Les deux compagnies continueront d'être très présentes sur le marché du cargo, en se concentrant sur le transport de marchandises dans les soutes.

Le plan Transform 2015 visait aussi à modifier l'offre d'Air France pour les vols moyen-courriers. Outre que la compagnie était absente du marché low cost dans ce segment, l'organisation du réseau domestique était complexe et l'on constatait des pertes très importantes sur les réseaux d'approvisionnement du hub de Roissy-Charles de Gaulle pour les passagers en correspondance. L'accord passé avec le principal syndicat de pilotes de la compagnie, limitant à 14 appareils la possibilité de croissance de la flotte de Transavia France, a été renégocié, dans la douleur, en 2014. Il résulte de cette négociation qu'Air France peut porter progressivement la flotte de Transavia France à 40 appareils ; à l'été 2015, Transavia France et Transavia Pays-Bas pourront ainsi faire voler, ensemble, une flotte d'une soixantaine d'avions, ce qui n'est pas négligeable. Transavia France est désormais la première compagnie low cost au départ de Paris-Orly, avec une force de frappe équivalente, en nombre de vols et de destinations, à celle de Ryan Air au départ de Beauvais.

Le plan prévoyait également la restructuration de l'activité court-courrier en deux étapes. Dans un premier temps, les filiales Regional, Britair et Airlinair ont été fusionnées sous la dénomination commerciale unique de « Hop ! ». Puis, suivant les recommandations d'un groupe d'experts, tous les moyens opérant pour le court-courrier domestique ont été regroupés en 2014 sous la bannière « Hop ! Air France ». Cette nouvelle entité économique – business unit – du groupe Air France unifie et optimise la flotte régionale, les A320 desservant le réseau domestique et le réseau des escales de province et de Paris-Orly.

Le plan Transform 2015 a aussi conduit à la refonte complète de l'activité moyen-courrier et de l'approvisionnement du hub de Roissy-Charles de Gaulle, avec la rénovation des cabines d'une partie de la flotte moyen-courrier. Nous allons poursuivre cette amélioration avec l'installation de nouveaux sièges, un nouveau service de catering et une révision de la grille tarifaire pensée pour offrir une flexibilité complète aux passagers de classe économique.

Ces restructurations stratégiques majeures, engagées en 2014 et menées à terme au début de cette année, ont conduit au renouvellement de notre offre court et moyen-courrier et à une présence accrue du groupe Air France sur le marché du low cost – d'abord au départ d'Orly, mais nous avons vocation à étendre cette activité au départ de certaines villes de province, comme c'est déjà le cas au départ de Nantes et de Lyon.

Tout au long du plan Transform 2015, nous avons poursuivi le développement de nos activités de maintenance et de catering. Air France Industries KLM Engineering & Maintenance a enregistré au Salon aéronautique du Bourget quelque 800 millions de dollars de commandes. Nous réfléchissons à des évolutions structurelles permettant à Servair de participer à la restructuration du secteur mondial du catering.

La période 2011-2014 a aussi été celle de la montée en gamme progressive de nos vols longs courriers, avec l'installation des nouvelles cabines BEST en classe affaires et des améliorations notables en classe économique et en classe La Première.

Ces transformations ont eu pour effet l'amélioration progressive de nos résultats, qui aurait dû se traduire par le retour à l'équilibre opérationnel au terme de l'exercice 2014 : hors les événements de septembre 2014, notre marge opérationnelle aurait été de quelque 140 millions d'euros ; cela ne s'était pas produit depuis 2008. Ces résultats ont été rendus possibles par l'effort des salariés et des partenaires sociaux qui, en accompagnant les réformes, ont permis ce retour potentiel à l'équilibre. Le chiffre d'affaires de la compagnie est resté stable pendant toute la période d'application du plan Transform 2015 : il était de l'ordre de 16 milliards d'euros en 2011, et de 16 milliards en 2014. La transformation n'a donc pas négligé les facteurs de croissance là où nous avions la compétitivité, le savoir-faire et la capacité à croître – nous n'avions pas pour intention de faire disparaître Air France ou de réduire l'ampleur de notre groupe.

Il nous revient maintenant de poursuivre cette stratégie avec ténacité, persévérance et constance, pour redonner à la compagnie des résultats à la hauteur de son importance. C'est l'objet du plan Perform 2020 annoncé aux salariés d'Air France et de KLM au printemps 2015. La trajectoire tracée pour Air France devrait conduire la compagnie à dégager une marge opérationnelle de l'ordre de 740 millions d'euros en 2017. Les mesures contenues dans le plan ont été discutées lors de plusieurs comités d'entreprise ; nous avons expliqué qu'une entreprise dont le chiffre d'affaires est de 16 milliards d'euros ne peut se satisfaire du seul retour à l'équilibre de ses comptes. C'était une étape extrêmement importante et je pense que les comptes seront encore à l'équilibre en 2015, mais il nous faut faire mieux. Pour cela, nous devrons poursuivre les stratégies engagées dans le plan Transform 2015 et les accentuer pour les long-courriers. Notre offre manque encore de compétitivité sur ce segment caractérisé par un environnement hautement concurrentiel, des surcapacités et des acteurs extrêmement agressifs. Notre objectif est de faire passer progressivement de 50 % à 80 % la proportion de lignes long-courrier rentables. Nous entendons d'une part poursuivre la montée en gamme, d'autre part engager une réflexion sur notre compétitivité-coût. Nous devons pour cela nous appuyer sur les deux piliers que sont la maîtrise et l'amélioration des coûts unitaires d'une part, d'autre part le développement des savoir-faire, de la qualité du service et de la qualité opérationnelle en vol et au sol. En résumé, le plan Perform 2020 vise la maîtrise des coûts, l'amélioration de nos produits et l'optimisation de nos performances commerciales pour nous permettre de rester présents sur un marché extrêmement concurrentiel.

Lors de la dernière réunion de l'Association internationale du transport aérien (IATA), il y a quelques semaines, il a été fait état du bouillonnement que connaît notre industrie : des compagnies sont en cours de restructuration, d'autres sont en extrême difficulté, les redéfinitions stratégiques, les baisses de capacités et les redimensionnements de réseaux se multiplient. Air France doit tenir compte de ces évolutions. Parvenir à un résultat opérationnel de 740 millions d'euros en 2017 signifie que nous sommes capables de réinvestir et d'assurer notre croissance tout en poursuivant notre désendettement.

Nous poursuivons donc notre montée en gamme. Après avoir équipé notre flotte de Boeing 777 de cabines BEST, nous voulons améliorer les cabines des Airbus A330 puis celles des Airbus A380. Dans le même temps, nous avons engagé avec les partenaires sociaux une discussion tendant à définir comment aligner progressivement nos coûts sur ceux de nos concurrents, notamment les compagnies qui se développent dans les pays du Golfe et en Asie, ou du moins à faire qu'ils ne soient pas trop différents, pour être capables de poursuivre notre développement.

J'ai prévu un rendez-vous à ce sujet à l'automne avec les syndicats de personnels navigants commerciaux et techniques. Il s'agit de déterminer comment, en faisant évoluer les conditions de travail, contribuer à rendre les coûts unitaires compatibles avec la poursuite de la croissance, notamment sur le réseau long courrier au départ de notre hub de Roissy-Charles de Gaulle. Air France, énorme pourvoyeur d'emplois, joue un rôle majeur sur le marché de l'emploi en région parisienne, tant par le nombre de ses salariés que par celui de ses sous-traitants et partenaires. Poursuivre ce qui a été engagé par le plan Transform 2015, centrer les efforts sur la croissance du long courrier, défendre la situation financière d'Air France : c'est ce que nous engageons par le plan Perform 2020 présenté à nos partenaires sociaux et déjà discuté avec eux de nombreuses fois. Poursuivre dans cette voie avec ténacité, persévérance et constance est le seul moyen de faire progresser une compagnie à laquelle les Français sont très attachés et qui joue un rôle moteur dans l'économie de notre pays.

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