Intervention de Laurent Gouzènes

Réunion du 9 juin 2015 à 18h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Laurent Gouzènes, membre du Conseil scientifique :

Il faudrait peut-être inclure des économistes dans la réflexion.

J'ai lu un article qui développait le concept intéressant selon lequel l'innovation créerait de la décroissance. Pourquoi ? Parce que finalement, l'innovation consiste, certes, à faire des choses nouvelle, mais, souvent, elle consiste à essayer de faire des choses moins chères. Or, si vous remplacez quelque chose que tout le monde a, par quelque chose qui est moins cher, vous faites diminuer le PIB. Alors, peut-être qu'aujourd'hui la France est un pays extrêmement innovant, avec sa petite croissance du PIB. Des problèmes économiques tout à fait intéressants se posent dans ces axes-là.

Prenons, par exemple, le remplacement du pétrole par de l'énergie renouvelable produite en France. Importer du pétrole ne génère pas d'emploi ; alors que si on fabrique des machines à énergies renouvelables, quelles qu'elles soient, plus d'emplois vont être générés. Alors, bien que l'énergie renouvelable paraisse a priori plus cher, le « système France » s'appauvrit en fait moins, parce qu'il n'y a pas de sortie de richesse.

Prenons un autre exemple, celui du véhicule intelligent. Aujourd'hui, les voitures sont en moyenne 95 % du temps à l'arrêt. Si vous avez des véhicules intelligents, alors, quand vous ne vous servez pas de votre voiture, quelqu'un d'autre peut s'en servir. On peut ainsi diminuer le nombre de véhicules considérablement. Sommes-nous prêts à faire une telle transformation économique, où l'on construira beaucoup moins de voitures mais qui seront plus intelligentes ?

On peut imaginer la même chose pour le transport par chemin de fer. Aujourd'hui, il faut une locomotive et un conducteur pour tracter des wagons. Mais aura-t-on toujours besoin de ça ? Technologiquement, rien ne nous empêche de faire rouler des wagons seuls, la nuit, sur des voies inutilisées. Maintenant, les empêchements sont peut-être d'ordre financier ?

Sommes-nous prêts, d'un point de vue économique, d'un point de vue technique aussi, à étudier ces solutions, qui sont des solutions radicales ? Je n'en suis pas certain, mais malgré tout, l'innovation pose tout de même des problèmes de PIB et de comptabilité de l'innovation. Il vaut mieux, à prix égal, choisir une innovation qui détruit moins la planète ; comment matérialiser cela ? Nous n'avons pas encore les concepts aujourd'hui pour appréhender cela.

Comment mettre en évidence ces innovations de façon à ce que, du point de vue de l'acceptation du citoyen, on puisse, sur le long terme, conduire ces transformations ?

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