On a calqué la répartition des rôles et des tâches dans toutes les sphères à partir de la complémentarité dans la procréation puis dans la cellule familiale. Si, à la Révolution, on a coupé la tête du roi, on n'a pas fait subir le même sort aux pères et aux frères, qui continuaient, dans le monde privé, à être « chefs de famille », terme qui ne figure plus dans notre droit depuis les années soixante-dix, mais que l'on utilise encore.
Il a fallu attendre une date récente pour que l'on ne puisse plus invoquer la provocation en cas de violence de la part du conjoint sur la conjointe, et pour que la violence du père sur l'enfant cesse d'être un droit. Ce modèle très asymétrique des rapports entre le père et la mère a été déconstruit par le législateur, mais l'inertie demeure dans la répartition des tâches ménagères et domestiques.
On parle beaucoup des nouveaux pères, mais, si les femmes ont gagné dix minutes de liberté par jour sur les tâches ménagères entre 1999 et 2010, c'est grâce, non pas à un meilleur partage des tâches entre les hommes et les femmes, mais aux produits surgelés ! La non-répartition des tâches dans la sphère privée a des répercussions dans la sphère publique, politique et économique. Elle explique par exemple que 30 % des femmes travaillent à temps partiel et qu'elles décrochent de l'emploi à partir du troisième enfant.
Il faut en revenir à l'idée que le privé est aussi politique, notamment parce qu'il a des répercussions sur la sphère publique.