Intervention de Anne Paugam

Réunion du 7 juillet 2015 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Anne Paugam, directrice générale de l'Agence française du Développement, AFD :

Sur ce point, c'est la directive européenne CRD 4 qui s'applique. Lorsqu'elle a été adoptée, un certain nombre d'institutions ont été inscrites sur une liste d'exemption : ainsi la KFW et la Caisse des dépôts, par exemple, ont-elles été exemptées. Le fait que l'AFD n'ait pas été inscrite sur la liste n'a pas donné lieu, à l'époque, à une discussion avec la direction générale de l'AFD – sans doute les implications stratégiques de cette décision n'ont-elles pas été perçues à ce moment-là. L'AFD était déjà soumise à la loi bancaire française, ce qui n'avait jusqu'alors posé aucun problème, et c'est donc très naturellement que l'on a entériné cette situation. Aujourd'hui, les choses mériteraient d'être rediscutées à la lumière des crises de 2007 et de 2008 et de leur effet sur les ratios de liquidités : en effet, si le calcul de ces ratios présente un intérêt pour les banques classiques, il n'a pas de sens pour nous ; de même certaines exigences relatives à la composition des fonds propres ne sont-elles pas adaptées à notre statut.

Si toutes ces choses pouvaient difficilement être anticipées, aujourd'hui, il serait justifié d'adapter la législation aux particularités d'une institution qui doit rester de nature bancaire et financière, comme la KFW et la JICA, mais dont la supervision pourrait s'effectuer, non par une institution supranationale – la BCE –, mais par une institution nationale chargée d'adapter le corpus réglementaire général à nos spécificités. Lorsque nous octroyons un prêt souverain, nous le faisons d'une manière particulière, en laissant par exemple les encours sur certains pays atteindre des pourcentages assez importants, ce qui ne pourrait pas être le cas si le prêt était consenti par une banque classique – si nous pouvons le faire, c'est parce que nous sommes un outil bilatéral.

Le réexamen de notre situation statutaire est assez compliqué sur le plan procédural car, dans la mesure où nous ne figurons pas sur la liste d'exemption, la seule façon de procéder semble être de réviser la directive CRD 4 elle-même. Cette question doit faire l'objet d'une discussion sereine avec le ministère des finances ; si nous ne devons pas perdre de vue que les règles bancaires sont protectrices pour l'Agence – d'où l'utilité pour notre institution de conserver son caractère bancaire –, l'adaptation du corpus réglementaire aux spécificités de l'AFD doit être envisagée sans tabous.

On entend dire aujourd'hui que les institutions de Bretton Woods – notamment la Banque mondiale et son fonds dédié aux plus pauvres, l'Association internationale de développement (AID) – devraient faire davantage levier sur les capitaux investis par les États membres, dont la France. Plusieurs initiatives ont vu le jour en ce sens : ainsi est-il prévu de mettre en oeuvre des programmes « AID + », ce dont il sera prochainement question à Addis-Abeba. Malheureusement, en l'état actuel des choses, il n'est pas permis à l'AFD d'agir sur le même modèle. Cette question mérite donc d'être examinée de près.

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