Tout d'abord, les intercommunalités ont-elles une part de dotation plus importante que les communes ? Non, leurs marges de manoeuvre sont plutôt plus réduites que celles des communes en la matière. Je rappelle que la baisse de 56 % des dotations de l'État au bloc communal est supportée à hauteur de 70 % par les communes et à hauteur de 30 % par les intercommunalités. Elle est fondée sur la part des dépenses globales, dans laquelle on a intégré l'attribution de compensation, pour laquelle l'intercommunalité ne joue qu'un rôle de boîte aux lettres. Si l'on avait tenu compte de ce double compte, la baisse des dotations au bloc communal aurait été imputée à 77 % aux communes et à 23 % aux intercommunalités. Celles-ci ne sont donc pas gagnantes, bien au contraire.
Ensuite, je m'inscris en faux contre l'affirmation selon laquelle les difficultés des collectivités locales tiendraient à la réforme de la taxe professionnelle (TP). Il est un élément qui peut pénaliser les intercommunalités dans leurs projets d'investissement, ce sont les fluctuations de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). C'est pourquoi l'AdCF a formulé des propositions, ne serait-ce que la consolidation des cotisations au niveau des groupes au sens fiscal du terme, pour mieux répartir territorialement cette cotisation et éviter l'effet de yo-yo d'une année sur l'autre. Mais on ne peut pas dire que la réforme de la TP a pénalisé les communes par rapport aux intercommunalités et, plus généralement, l'investissement local. Je ne vois pas comment on peut soutenir cette thèse, chiffres à l'appui.
Je suis convaincu que les finances des intercommunalités et de leurs communes seront de plus en plus liées ; nous n'avons pas le choix. Je n'entrerai donc jamais dans la querelle qui oppose les unes aux autres. Nous sommes solidaires. Certes, il existe des fonds de concours, mais ce n'est pas essentiel car, si l'attribution de compensation est figée, les dépenses transférées aux intercommunalités, quant à elles, ne le sont pas. La règle qui s'applique, et elle me paraît bonne, impose un équilibre exact à la date du transfert. Les intercommunalités sont donc gagnantes dans certains cas, perdantes dans d'autres. Pour certaines compétences transférées, il est possible de réaliser des gains de productivité ou de baisser les dépenses ; pour d'autres, on observe une inflation de la dépense difficile à contenir. Nous sommes donc dans le même bateau, et nous connaissons les mêmes difficultés, lesquelles sont parfois même plus importantes pour les intercommunalités, qui sont plus sensibles aux dotations que les autres collectivités locales.
En ce qui concerne la mutualisation, ma conviction est que celle-ci aura un impact financier lorsqu'elle portera sur de gros bataillons. Prenons un exemple très concret. Mon intercommunalité est en train de mutualiser les fonctions support : le nombre des personnels mis à disposition par les communes n'est que de 25. En revanche, la mutualisation commencera à rapporter lorsqu'une fois que nous serons passés en communauté urbaine, elle concernera l'ensemble des services de voirie des 22 communes de l'intercommunalité. Au reste, la mutualisation rapporte de l'argent lorsqu'elle se fait, non pas entre région et département, mais au sein du bloc communal, qui emploie 85 % des fonctionnaires territoriaux. Mais cela prend du temps et, si l'on va plus vite que la musique, on risque de bloquer le système. Bien entendu, il existe des différences entre les territoires : contrairement à la Bretagne ou à l'Alsace, ma région, la région Centre, est très faiblement intercommunalisée : la mutualisation au sein des intercommunalités n'y est pas naturelle. Pour résumer, je dirais donc que l'on ne peut pas échapper à la mutualisation, qu'elle rapporte mais qu'elle prend du temps.
Par ailleurs, je suis, à titre personnel, farouchement hostile aux bonus de DGF. Celle-ci se casse la figure. En 2017, 400 des 2 133 communautés actuelles ne percevront plus un centime à ce titre. Si on continue d'utiliser cette dotation pour faciliter les politiques de l'État ou procéder à des incitations, il ne restera plus rien aux autres collectivités ! Ainsi, le passage d'un niveau d'intercommunalité à un autre ne doit pas s'accompagner d'un bonus de DGF. De même, c'est une erreur que d'avoir mis en place une incitation en DGF à la création de communes nouvelles, car cela produit un effet multiplicateur sur les autres. Arrêtons donc de jouer avec la DGF, stabilisons les règles et n'y touchons plus !