Intervention de Axel Poniatowski

Réunion du 8 septembre 2015 à 14h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAxel Poniatowski :

Pour examiner ce projet de loi, nous devons porter notre attention essentiellement sur les aspects financiers, techniques et juridiques, ainsi que vient de le faire excellemment Pierre Lellouche. Mais, au-delà, la réalité de cette affaire pitoyable, c'est un formidable gâchis politique et, finalement, une dégradation de notre politique étrangère depuis maintenant trois ans. Nous en avons eu la démonstration hier lors de la conférence de presse à l'Élysée : il est tout de même extraordinaire d'entendre le Président de la République adopter sur la Syrie un point de vue qui est exactement l'inverse de ce qu'il nous avait expliqué il y a un an ! Comment croire qu'il puisse avoir raison en ce qui concerne nos relations avec la Russie, lorsque, à l'évidence, il prend le contre-pied de ce qu'il a dit et fait jusque-là sur la Syrie ?

Je vois dans cette affaire, je le répète, un formidable gâchis politique. Selon moi, nous avons complètement tort depuis le début dans notre relation avec la Russie. Nous n'avons pas fait ce que nous aurions dû faire. Notre diplomatie n'a pas été assez active ni assez pragmatique au début de la crise, au moment des événements en Crimée, voire avant. Nous aurions pu mener des actions diplomatiques pour éviter ce qui s'est passé par la suite, en particulier dans l'est de l'Ukraine. Nous avons laissé faire, nous nous sommes contentés d'être des témoins dans cette affaire, alors que, lors de la crise géorgienne, nous avions pris des initiatives qui avaient évité le pire. Nous assistons à une dégradation continuelle de notre relation avec la Russie. Ceux qui pensent que cette relation n'est pas conflictuelle se trompent de manière patente.

Qui plus est, dans toute cette affaire, la France aura finalement été la principale si ce n'est la seule victime de l'embargo. Aucun pays anglo-saxon n'en a subi les conséquences, ou si peu ! Mais le plus grave, c'est l'impact sur notre image aux yeux du monde : la signature de la France est aujourd'hui profondément dégradée. Vu notre attitude à l'égard de la Russie, qui peut croire que nous tiendrons nos engagements ? Tout cela nous amènera soit à rejeter le projet de loi, soit à nous abstenir.

Pour que nous ayons une vue complète de ce dossier, monsieur le secrétaire général, il faut que vous nous disiez quel est l'état des discussions en cours avec un certain nombre de pays – on entend beaucoup de choses à propos du Brésil, du Canada, de l'Égypte, de l'Arabie saoudite – et quelles sont les perspectives en ce qui concerne la revente de ces bâtiments. Vous nous avez dit, brillante démonstration à l'appui, que cette opération ne coûterait rien à la France. Mais cela pourra lui coûter assez peu comme cela pourra lui coûter 1 milliard ! Car plus le temps passera, plus ces bateaux perdront de la valeur.

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