Intervention de Jacques Rapoport

Réunion du 12 décembre 2012 à 16h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Jacques Rapoport :

Disons que l'on en parle beaucoup moins que du précédent. Qui qu'il en soit, l'exercice est compliqué puisqu'il s'agit d'arbitrer entre la circulation des trains et les travaux. Cela ne peut pas être un long fleuve tranquille ! Néanmoins, les conditions de 2013 sont, me semble-t-il, meilleures qu'en 2012.

Le PPU est-il contraire aux règles européennes ? Nous ignorons le contenu du quatrième paquet ferroviaire. Raisonnablement, on peut considérer que l'Europe fixera des obligations de résultat et, donc, un objectif de concurrence. Il appartient dès lors aux États membres de veiller aux moyens qu'ils mettent en oeuvre pour qu'elle soit effective. Je ne pense pas – hors quelques-uns, qui ont des arrière-pensées – qu'ils acceptent que l'Europe décide de l'organigramme des entreprises.

Le PPU risque-t-il de conférer un avantage concurrentiel indu à la SNCF ? Selon moi, ce n'est absolument pas le cas. Le PPU comprend deux grands « paquets » : le gestionnaire d'infrastructures et la gestion sociale.

En ce qui concerne le premier, une coordination et une grande cohérence s'imposent entre les techniques ferroviaires – équipements embarqués et au sol, traitement des incidents, respect des règle ferroviaires de conduite et d'utilisation du réseau – et l'entreprise ferroviaire. Certes, il faut que cela soit le cas avec toutes les entreprises ferroviaires mais ne perdons pas de vue que l'une d'entre elles est en charge de 98 % de la circulation. Je ne suis pas juge à la Cour européenne de justice mais je considère que la France peut défendre cette idée selon laquelle une bonne cohérence entre les installations fixes et le matériel roulant ainsi que des règles communes garantissant un bon fonctionnement du système est parfaitement conforme aux règles de l'Union européenne et n'induit aucune distorsion de concurrence.

En ce qui concerne la seconde, je ne vois pas en quoi les règles européennes empêcheraient que les 50 000 personnels du gestionnaire d'infrastructures et les 100 000 personnels de l'entreprise ferroviaire relèvent du même statut.

Le cadre social harmonisé, quant à lui, vise à faire en sorte qu'il n'existe pas de différences sociales créant un désavantage compétitif définitif au détriment de la SNCF dans la perspective de la concurrence. Il doit faire l'objet de négociations dont, là encore, on peut supposer qu'elles ne seront pas un long fleuve tranquille mais c'est ainsi, en particulier dans le secteur des transports où les traditions sociales sont fortes. L'objectif est bien de faire en sorte que les personnels soient placés sous des régimes de travail proches, avant l'ouverture à la concurrence. Après, les négociations d'entreprise quant aux spécificités de chaque métier joueront leur rôle.

La place des régions est devenue essentielle. Peut-on accroître leur champ de compétences vers d'autres activités dont, peut-être, le fret ? L'idée qui prévaut, à ce stade, est de leur conférer une compétence multimodale dès lors que les transports se complètent, ce qui est conforme à l'intérêt public, ou se concurrencent. Le développement territorial, l'aménagement du territoire, la protection des territoires fragiles constituent autant d'enjeux pour l'ensemble des services publics et doit être un critère de décision essentiel dans la définition des travaux prioritaires.

Serai-je candidat à la présidence du futur GIU ? Outre que la question ne se posera probablement pas en 2013 mais un peu plus tard, cela relève de la responsabilité des pouvoirs publics.

J'entends souvent citer l'Allemagne en exemple mais je ne suis pas du tout sûr que notre système ferroviaire soit moins performant. Il est vrai qu'il coûte cher, peut-être trop, mais il n'est là encore pas sûr qu'il soit plus cher que celui de notre voisin. Compte tenu de la densité des populations, de la pression et de la concentration du trafic, notre système atteint sans doute des niveaux de performance dont nous n'avons pas à rougir, ce qui ne signifie d'ailleurs pas qu'ils ne soient pas perfectibles. Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas de complexe à entretenir à l'endroit de l'Allemagne.

Je connais bien la RATP. Les débats entre cette dernière et la SNCF sur la ligne B du RER datent de la création de celle-ci. Mon expérience m'incite à penser que cette question est plus simple à poser et à résoudre sur le papier que dans la réalité. Les systèmes d'exploitation de la RATP et de la SNCF, en effet, diffèrent profondément, de même que la réglementation ferroviaire, la formation des personnels, la signalisation, les postes de commandes. Ce sont deux histoires qui se sont développées séparément. Si la mise en place d'un opérateur unique résolvait l'ensemble des problèmes, elle aurait été actée depuis longtemps. L'unification présente de réels avantages mais les difficultés sont tout aussi réelles. Chaque pays a ses dynamiques propres, chaque entreprise a son histoire : celle du métro a 110 ans, celle de la SNCF 170 ans. Nous savons fort bien, de surcroît, que le métro parisien a été construit pour s'opposer aux Chemins de fer, d'où un écartement des voies différent. Il n'est donc pas simple, humainement et techniquement, d'unifier l'exploitation de la ligne, ce qui ne signifie d'ailleurs pas qu'il ne faille pas le faire.

Je n'ai effectivement pas parlé de la recherche de façon explicite mais c'est elle que j'avais en tête lorsque j'ai évoqué la question de la modernisation. Dans le domaine ferroviaire, des technologies, des méthodes, des travaux de R&D mobilisent d'ores et déjà la SNCF et RFF. En outre, des instances communes à la profession ont été créées.

Charles-de-Gaulle Express est un vieux « serpent de mer ». L'idée qui a prévalu jusqu'ici est que l'on ne pouvait développer une ligne nouvelle à la tarification très élevée tant que la situation de la ligne B du RER serait aussi dégradée. Les transports publics, dans le cas contraire, souffriraient d'une mauvaise image. Même si elle est loin d'être au bout de ses peines, la ligne B s'est améliorée, le projet Charles-de-Gaulle Express est prêt, de même que les quatre entreprises publiques mobilisées. Problème : le bouclage du financement. « Normalement », Charles-de-Gaulle Express n'étant pas un service public au sens légal du terme, un autofinancement s'impose. Or, depuis une dizaine d'années, l'expérience montre que nous n'y parvenons pas, malgré une tarification élevée puisque réservée à la desserte aéroportuaire.

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