Votre rapport, monsieur le président Lefas, était très attendu, car les décisions d'orientation sont un enjeu démocratique important. Aujourd'hui, les jeunes et les familles ne sont pas égaux devant celles-ci et il faut y remédier, car ces inégalités reflètent et aggravent les inégalités sociales.
Pour commencer, il faudrait revoir le système de notation sur lequel se basent les décisions d'orientation, point qui n'est pas abordé dans le rapport. Or on sait combien la notation est vécue comme une sanction contre-productive dès le plus jeune âge, et combien les notes sont corrélées à l'appartenance sociale et culturelle. Fonder des décisions d'orientation sur les notes, c'est maintenir le système éducatif en l'état et, au-delà, toute l'organisation sociale et économique.
Les écologistes sont en accord avec la majorité des recommandations émises par la Cour des comptes. Nous partageons le constat de faiblesse du système d'orientation actuel, qui renforce les inégalités et stigmatise l'échec. Pour favoriser des parcours choisis et construits, l'approche actuelle de l'orientation doit être revue. Celle-ci doit être le résultat d'un choix réfléchi et positif, ce qui rend essentielle une meilleure information préalable.
L'orientation ne doit pas non plus être déterminée uniquement par les résultats ou les stéréotypes de genre, encore trop présents dans les processus. C'est là un point sur lequel les écologistes sont particulièrement vigilants.
Nous soutenons pleinement la mise en place, prévue dans le projet de loi de refondation de l'école, d'un parcours individuel d'information, d'orientation et de découverte du monde économique et professionnel, qui sera désormais proposé en tronc commun et non plus aux seuls élèves en difficulté. Cela permettra à chacun de découvrir une partie du monde professionnel et de changer les regards sur les filières qui souffrent de discrédit.
Nous saluons également la volonté de ne plus enfermer trop tôt des élèves dans une filière. Ce changement d'approche et la suppression annoncée des dispositifs d'initiation aux métiers en alternance (DIMA) sont d'excellentes nouvelles. Nous nous réjouissons aussi que le gouvernement tourne le dos aux réformes de la précédente majorité, qui cherchait à orienter les jeunes de plus en plus tôt. Désormais, les formations d'apprenti seront exclusivement réservées aux jeunes de quinze ans et plus et devront poursuivre l'acquisition du socle commun. Bien évidemment, la recommandation n° 11 relative au recul de toute forme d'orientation à la fin de la scolarité obligatoire rencontre notre soutien.
Depuis longtemps, les écologistes se battent pour que tous les enfants de six à seize ans soient accueillis dans une école fondamentale, sans sélection ni orientation. Il s'agit par-là de rompre avec la culture de la performance, du résultat et du contrôle généralisé, cette logique sélective et concurrentielle qui fait décrocher et met en échec tant d'élèves. Nous souhaitons que, de la sixième à la troisième, la scolarité soit considérée comme un parcours continu et sans rupture. Le redoublement doit être exceptionnel et uniquement à la demande de la famille.
Nous tenons vraiment à cette vision de la scolarité comme parcours continu sans redoublement, tout comme au droit donné aux familles d'avoir la décision finale sur la voie d'orientation. Pour nous, il est impératif de rendre les élèves et leurs familles maîtres de leur orientation, comme le préconise la Cour des comptes. Pour que l'élève puisse être un acteur éclairé de son orientation, il faut retirer au chef d'établissement tout pouvoir de décision sur l'orientation. Puisque les commissions d'appel seront ainsi rendues inutiles, elles devraient, elles aussi, être supprimées. Le projet de loi sur la refondation de l'école ne va pas assez loin sur ce sujet en maintenant l'orientation sous la responsabilité du chef d'établissement.
Par ailleurs, nous espérons que le gouvernement aura la volonté de s'atteler rapidement à d'autres recommandations de la Cour des comptes, en particulier la n° 3 relative à la formation initiale et continue des enseignants, et les nos 13 et 14 sur la création de passerelles entre les voies de formation avec un accompagnement spécifique. J'insiste sur ce point, car le cloisonnement français est une spécificité dont il faudrait se défaire au plus vite. Ces mesures pourraient être prises très rapidement et auraient un coût très faible pour l'éducation nationale en étant incluses dans les réformes à venir.
Enfin, dans le cadre de l'acte III de la décentralisation, nous serons attentifs à ce que l'éducation nationale travaille en étroite collaboration avec les régions, qui seront chargées de l'organisation du service public de l'orientation tout au long de la vie. La recommandation n° 5 du rapport retient, à ce propos, toute notre attention.