Intervention de Philippe Yvin

Réunion du 15 septembre 2015 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Philippe Yvin, président du directoire de la Société du Grand Paris :

S'agissant des délais, nous estimons, après avoir réalisé les études d'avant-projet de la ligne 15 Sud, qu'il faut neuf ans entre la réalisation des études et la livraison des lignes. Il s'agit d'un délai raisonnable pour des projets d'autant plus complexes qu'ils s'inscrivent dans des agglomérations denses et déjà urbanisées. Le calendrier nous paraît donc tenable.

Cela ne nous empêche pas, dans l'intervalle, de chercher à optimiser d'une part les coûts, et d'autre part les délais, en particulier pour les lignes 15 Sud et 16. Nous étudions notamment la cinématique des tunneliers, afin de voir si l'ajout de tunneliers à certains endroits permettrait de gagner du temps. Nous tâchons également de nous inspirer de l'histoire des lignes à grande vitesse, marquée par des gains de temps considérables entre les délais de construction des premiers TGV et les LGV d'aujourd'hui. Cela s'explique entre autres par l'amélioration des techniques, et nous pensons pouvoir bénéficier de gains équivalents pour la construction de nos lignes de métro, notamment en réduisant le temps de latence entre les travaux de génie civil, c'est-à-dire le creusement des tunnels et les travaux ultérieurs, c'est-à-dire la pose des rails et des systèmes automatiques. Ces deux opérations se déroulent aujourd'hui de manière consécutive ; nous pensons qu'elles pourraient être mieux phasées, ce qui permettrait des gains de temps considérables. Nous travaillons en ce sens avec nos maîtres d'oeuvre et nos maîtres d'ouvrage, les entreprises françaises qui vont intervenir dans les prochains mois, sachant – et il important de le rappeler dans la conjoncture actuelle – que, fin 2016, nous aurons attribué pour 3 milliards d'euros de marchés de génie civil. Il est primordial en effet, comme vous l'avez rappelé, d'être au rendez-vous des Jeux olympiques et de l'Exposition universelle en 2024 et 2025.

En ce qui concerne les financements, ils sont exclusivement franciliens : pas un euro du budget de la nation ne sera injecté dans ce chantier. Inversement, toutes les études économiques montrent que l'Île-de-France contribue pour 30 % au PIB national mais n'en consomme que 22 %. Les mécanismes de redistribution privés et publics font qu'une partie de la richesse produite en Île-de-France est redistribuée en province, ce qui signifie que toute augmentation de la richesse en Île-de-France demain bénéficiera mécaniquement au pays tout entier.

Ainsi qu'en a décidé le Parlement, les 500 millions d'euros par an de recettes fiscales affectées au projet proviennent exclusivement de ressources franciliennes, à savoir le produit de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux payée par les propriétaires de bureaux en Île-de-France, celui de la taxe spéciale d'équipement payée par les contribuables franciliens et enfin celui de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) à laquelle sont assujettis certains matériels roulants de la RATP.

À ces 500 millions d'euros viendront s'ajouter environ 200 millions de redevance d'exploitation du réseau, ce qui devrait correspondre à 8 % du coût du réseau, ainsi que des recettes commerciales propres, que la Société du Grand Paris tirera de la location de commerces ou encore des recettes publicitaires dont le montant devrait être de 60 millions d'euros environ. C'est précisément le fait que ces ressources échappent aux aléas budgétaires qui garantit la solidité de notre modèle financier, la pérennité de ces recettes permettant d'emprunter à très long terme.

S'agissant des taux d'intérêt, notre modèle a été bâti sur des taux de l'ordre de 5 %. Actuellement, nous allons négocier nos premiers emprunts sur quarante ans – uniquement auprès d'organismes publics puisqu'on prête rarement au-delà de vingt ans sur les marchés obligataires –, à environ 1,5 % pour la Caisse des dépôts – soit le taux du livret A augmenté de la marge que prend la Caisse – et à un taux fixe pour la BEI, fixé aujourd'hui à 1,85 %. Nous avons évidemment procédé à des projections de consolidation de ces taux sur quarante ans, ce qui les porte aux alentours de 3,5 %. Nous avons donc une marge confortable. J'ajoute que s'il nous fallait aujourd'hui faire appel aux marchés de capitaux, tous les contacts que nous avons pu avoir nous garantissent que nous aurions très largement de quoi couvrir nos besoins, car le projet, extrêmement solide, intéresse de nombreux investisseurs internationaux.

En matière d'urbanisation, il faut distinguer le foncier propre à la Société du Grand Paris, sur lequel nous allons, toujours en accord avec les maires, engager des opérations immobilières incluant logements, commerces, locaux d'activités et équipements publics, du foncier inscrit dans les huit cents mètres alentour – périmètre de référence considéré comme la distance raisonnable pour rejoindre une gare à pied. La mutation de ce foncier sera, elle, très variable selon les gares et l'endroit où elles sont implantées. Quoi qu'il en soit, les sociétés d'économie mixte et les établissements publics d'aménagement auront tout leur rôle à jouer dans ces opérations, notamment le nouvel établissement Grand Paris Aménagement.

Monsieur Yves Albarello, nous avons en effet conclu un accord avec le groupement de recherche Efficacity. C'est dans le cadre de cet accord qu'ont été identifiées les cinq gares de la ligne 15 Sud où nous savons d'ores et déjà que nous pourrons mettre en place des installations permettant de produire de la géothermie. Un bilan de ces recherches sera présenté à l'occasion d'une journée consacrée au développement durable du projet, en novembre prochain.

Les interconnexions, en particulier avec les réseaux desservant les départements limitrophes de l'Île-de-France, sont pour nous un sujet majeur. Nous l'abordons ligne par ligne : sur la ligne 15 Sud, nous avons ainsi passé des accords avec la RATP et RFF concernant l'ensemble des gares, et les travaux seront financés soient par la SGP, soit dans le cadre du contrat de plan État-région. Notre idée est de proposer à tous les usagers du Transilien – notamment les lignes K, H et D qui desservent la Picardie – les points de connexion au nouveau réseau les plus pertinents possible.

En ce qui concerne la circulation automobile, nous mettons tout en oeuvre pour éviter qu'elle augmente à proximité du coeur de l'agglomération en la redirigeant vers les extrémités du réseau, que ce soit au Mesnil-Amelot, à Noisy-le-Grand ou à Saint-Quentin-en-Yvelines. Nous prévoyons pour cela, en accord avec les collectivités locales et le STIF, la création de places de parking.

Pour la première fois dans le contrat de plan État-région Île-de-France qui vient d'être signé, plus de 60 millions d'euros ont été dégagés pour réaliser des travaux sur les autoroutes et les voies rapides afin de permettre la circulation de bus express. La société Vinci a déjà expérimenté ce système sur l'autoroute de l'Ouest, en mettant en place un parc-relais, qui permet aux voyageurs de laisser leur voiture pour prendre un bus vers Massy-Palaiseau. La société Keolis pourrait mettre en place des dispositifs identiques, notamment en liaison avec la ligne 17.

Le nouveau réseau sera naturellement entièrement accessible aux personnes handicapées, contrairement au réseau historique qui ne peut être modifié partout, compte tenu de sa configuration. Nous travaillons en étroite collaboration avec les associations, nous efforçant de trouver des solutions innovantes, en particulier dans le domaine du numérique.

S'agissant de la gouvernance du réseau, la loi a prévu qu'une fois construit il sera confié pour son entretien à la RATP, garante de la sécurité du réseau francilien dans son ensemble. Quant à son exploitation, elle sera assurée, à l'exception de la ligne 14, dont le tronçon initial est déjà exploité par la RATP, par des sociétés qui, pour la première fois, dans l'histoire du métro, seront désignées par le STIF à l'issue d'un appel à la concurrence.

Pour ce qui concerne l'articulation entre ce nouveau métro et la modernisation du réseau existant, la SGP participera à hauteur de 2,45 milliards d'euros à la modernisation du réseau existant, et ce aux termes de l'accord conclu d'abord en 2011 sous l'égide de M. Maurice Leroy, puis en 2013 sous celle de M. Jean-Marc Ayrault. Le plan de mobilisation de la région sera ainsi doté d'un montant de crédits record, puisque plus de 7 milliards d'euros seront consacrés à la modernisation du réseau existant, ce qui représente un effort considérable mais nécessaire pour les RER.

Le très haut débit sera installé au fur et à mesure de la livraison des lignes. Les 200 kilomètres du réseau seront équipés de fibre à très haut débit. Les options techniques restent encore à définir, compte tenu de la complexité de ces installations, qui n'existent encore dans aucun autre métro au monde, à l'exception d'une partie du métro de Séoul.

Nous travaillons depuis l'origine sur les questions de sécurité avec le préfet coordonnateur, qu'il s'agisse de la sécurité civile et en particulier du risque inondation ou de la sécurité publique. Nous nous acheminons vers un modèle très voisin de celui mis en place à la RATP. Les exploitants futurs auront l'obligation de se conformer au cahier des charges élaboré avec la préfecture. Par ailleurs l'ensemble du réseau, les gares comme les trains, sera équipé d'un système de vidéosurveillance.

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