Intervention de Antoine Homé

Réunion du 8 septembre 2015 à 13h30
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Antoine Homé, secrétaire général de l'Association des petites villes de France :

L'APVF a décidé à l'unanimité de soutenir la journée nationale d'action organisée par l'Association des maires de France (AMF) le samedi 19 septembre afin de sensibiliser les citoyens sur les conséquences de la baisse des dotations et de la réforme territoriale, à condition que les actions en question restent locales et exemptes de la politique politicienne. Je constate malheureusement que ce n'est pas le cas dans mon département et j'avoue que cela m'énerve. Nous étions pourtant tous d'accord pour mener une action transpartisane. Certains sujets peuvent être traités au-delà des clivages politiques, même si chacun a ses propres convictions. Comment comprendre que l'on puisse manifester contre la baisse actuelle des dotations alors que l'on soutient ceux qui dans leur programme pour l'élection présidentielle proposent une baisse trois fois supérieure ? Ce genre de posture décrédibilise la politique. Je dénonce ce type d'attitude. Lorsque l'on aura compris qu'il faut y mettre fin, nous aurons beaucoup progressé. La baisse des dotations n'est pas un sujet polémique ou politicien mais une question d'intérêt général.

Les dépenses contraintes représentent une part très importante des budgets locaux. Ma petite commune de banlieue n'est pas riche : alors qu'elle consacre environ 4 à 5 millions d'euros par an à l'investissement, il faudrait qu'elle dépense 380 000 à 400 000 euros annuellement pour la mise en oeuvre de l'ADAP durant les neuf prochaines années. C'est énorme ! Personne ne conteste que la mise en accessibilité soit une juste cause. Seulement, il faut faire preuve de pragmatisme et éviter deux écueils : l'un consiste à tenir de beaux discours et à ne rien faire sur le terrain, l'autre à édicter de grandes règles impossibles à appliquer. Évitons de créer des dispositifs qui ne seront pas mis en oeuvre ! Je crains que de nombreuses communes ne déposent pas les dossiers ADAP, et je ne suis pas certain qu'elles seront contrôlées ou sanctionnées selon le territoire sur lequel elles se trouvent. Rien ne sert de voter des textes qui font plaisir aux associations si, dix ans plus tard, rien n'a bougé sur le terrain. En la matière tout est question de faisabilité et d'effectivité. Un tien vaut mieux que deux tu l'auras. Il arrive aussi que soient imposés des aménagements inutiles : le monte-charge qui a été installé sur le terrain de football de ma commune a coûté 180 000 euros et ne sert qu'aux jeux des jeunes des quartiers voisins qui le dégradent. Cependant, la plupart du temps, les équipements en question sont extrêmement utiles. Cela dit, au-delà des collectivités publiques, comment les commerçants pourront-ils garantir l'accessibilité lorsque l'entrée de leur magasin se fait par des marches, ce qui est systématique dans ma région ?

Parmi les dépenses contraintes, j'ai cité celles liées à la réforme des rythmes scolaires. Elles sont d'autant plus pesantes dans ma commune qu'au-delà de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), nous ne bénéficions pas de la « DSU cible ». À ce sujet, il faut en finir avec les effets couperets et mettre en place des systèmes logarithmiques de répartition des dotations. Les 50 euros qui me sont versés par élève dans le cadre de la DSU sont insuffisants. Cela me coûte bien plus cher de recruter des animateurs qualifiés et de financer des activités de qualité pour les enfants des quartiers populaires afin de favoriser la réussite scolaire. Dans les communes « huppées » de Mulhouse, les enfants ont toujours été occupés le mercredi ; dans la mienne 80 % des jeunes étaient livrés à eux-mêmes. Je suis fier du travail que nous avons accompli, mais nous avons dû y consacrer plusieurs centaines de milliers d'euros par an, ce qui a eu un impact fort sur notre budget de fonctionnement. Au passage, cela montre bien qu'il ne faut pas distinguer l'investissement, qui serait noble, du fonctionnement qui le serait moins.

Je n'ai pas parlé de la mise en oeuvre du Grenelle ou des nouveaux plans qui s'accumulent – actuellement, on nous impose des schémas contre le bruit. Tous les deux mois, de nouvelles règles sortent et nous sommes obligés de nous réunir à la préfecture, de prendre un cabinet d'études au niveau communal ou intercommunal. Nous devrions vraiment nous interroger davantage sur les conséquences des décisions prises et sur leur effectivité, au-delà des effets d'annonce.

Les propositions du Premier ministre relative à la TVA sur la grosse maintenance et sur l'élargissement de l'assiette vont dans le bon sens.

Je ne suis pas certain que les investissements diminuent en fonction des cycles électoraux. À vrai dire, aucun maire n'imagine vraiment qu'il va être battu, et les délais de réalisation sont tels que l'effet du calendrier électoral sur les investissements me paraît faible. Nous avons en revanche tous établi des programmes d'investissement sur la base de plans de financement qui anticipaient des recettes futures sans tenir compte du choc actuel. Pour ma petite ville, j'ai calculé que 4 millions d'euros manqueront en recette sur la DGF, avant que sa réforme ne change éventuellement la donne.

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