La fondation IFRAP a, à plusieurs reprises, pris position en faveur de la baisse de la dépense publique, qu'il s'agisse des dépenses de l'État, des dépenses sociales ou des dépenses locales. Nous n'avons pas de tropisme particulier à l'encontre des collectivités locales : nous avons écrit que nous souhaitions une répartition équitable de la baisse de la dépense sur l'ensemble des acteurs.
La baisse des dotations de l'État est un sujet crucial, surtout pour le bloc communal puisque c'est à ce niveau qu'elle est, en proportion, la plus importante.
Nous avons constaté, au cours de ces dernières années, une hausse importante – en moyenne de 3 % par an – des dépenses de fonctionnement et de la masse salariale au sein des communes stricto sensu comme des établissements à fiscalité propre. Nous avons modélisé cette évolution et nous pourrons vous communiquer tous nos documents. Parallèlement, si l'on prend une tendance moyenne et en partant d'une base 100, on constate que les investissements suivent à peu près la même courbe, même si l'on constate, pour certaines années, une baisse importante suivie d'une hausse.
Nous sommes convaincus que la baisse des dotations de l'État oblige à un choix. Une modélisation montre que nous risquons de passer, dans les prochaines années, hors remboursement de la dette, de 33 milliards d'euros d'investissements à environ 26 milliards. L'investissement est en effet susceptible d'être la variable d'ajustement de la baisse des dotations. L'autre terme de l'alternative consisterait à baisser la dépense de fonctionnement – pas n'importe laquelle : la dépense de personnel, dont l'évolution est la plus dynamique. On voit que, pour les communes comme pour les intercommunalités, la mutualisation n'a pas vraiment fonctionné, elle n'a en tout cas pas donné lieu à des économies sur la masse salariale.
Si l'on souhaite que l'investissement public local, notamment celui des communes et des intercommunalités, se maintienne à 33 milliards d'euros par an, il faudra trouver l'économie correspondante – qui portera donc notamment sur la masse salariale. Nous avons chiffré un certain nombre de possibilités en la matière, mais qui exigent une tout autre gestion que celle qui a prévalu ces dernières années. En tout état de cause, nous n'affirmons pas que tous les dirigeants, les élus, les directeurs généraux des services n'ont pas tenté de réaliser des économies, au contraire : certains essaient, au quotidien, de mieux gérer, de fusionner des services d'achats, des services informatiques, des services financiers, etc. Reste que de nombreuses communes et intercommunalités maintiennent des services qui doublonnent.
Nous ne sommes pas les seuls à constater cet état de fait. Un rapport de la Cour des comptes sur la maîtrise de la masse salariale constate que, dans de nombreuses collectivités locales, les 35 heures hebdomadaires, à savoir les 1 607 heures annuelles, ne sont pas appliquées. En tant que fondation extérieure à l'administration, mais qui cherche à collecter des données publiques, nous nous heurtons à une vraie difficulté pour connaître le nombre d'heures légales travaillées dans les communes, les intercommunalités, les départements et les régions. Nous avons également du mal à obtenir davantage d'informations sur les régimes indemnitaires et sur leurs écarts. La plupart des éléments dont nous disposons proviennent des rapports des chambres régionales des comptes et non des bilans sociaux des communes, des régions et des départements, sur lesquels nous avons beaucoup travaillé dernièrement.
La question des économies que l'on pourrait réaliser sur le temps de travail effectif des agents n'est de fait jamais abordée. Un bref calcul, au caractère scientifique approximatif faute de données précises, permet d'évaluer à environ 14 000 équivalents temps plein travaillé (ETPT) économisés si communes et intercommunalités faisaient travailler leurs agents 1 607 heures par an. Ce n'est pas énorme, mais c'est une piste. On peut très bien, en outre, pour peu qu'on gèle en valeur les dépenses de fonctionnement dans les prochaines années, imaginer ne pas remplacer les départs à la retraite – or on compte 35 000 à 37 000 départs par an rien que pour le bloc communal. Cette démarche, qui suppose évidemment de mutualiser, de fusionner, ne saurait naturellement être isolée ; elle doit aussi pouvoir être accompagnée.
Se pose ici la question d'un lien logique entre dotation globale de fonctionnement (DGF) et bonne gestion. D'ores et déjà, les communes sont incitées à fusionner avec à la clef la conservation de la DGF et même, au départ, un bonus de 5 %. Le but serait d'encourager les mutualisations, les fusions, les réorganisations, non pour bénéficier d'un effet d'aubaine, s'entend, mais dans le cadre d'une vraie démarche de fond.