La réponse réside dans la mutualisation. Cette dernière répond à une nécessité que personne ne nie ; en effet, tout le monde sait que l'intercommunalité s'est développée depuis 25 ans et la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République (ATR), dite loi Joxe, car elle représentait à l'époque le seul moyen d'inciter les élus à coopérer pour l'exercice de compétences dépassant le cadre de leur commune. L'Union européenne (UE) comprend 28 pays, mais 42 % de ses communes se situent en France. Dans notre pays, la population moyenne d'une commune ne dépasse pas 1 700 habitants, alors ce niveau dépasse 50 000 personnes dans cinq pays de l'UE ; la Constitution néerlandaise dispose qu'une commune doit compter au moins 25 000 habitants. Seule la République tchèque montre une moyenne proche de la nôtre. La loi Chevènement constituait donc une réelle avancée et elle avait d'ailleurs été approuvée par 80 % des parlementaires, alors que l'Assemblée nationale et le Sénat disposaient de majorités politiques différentes.
Aujourd'hui, le regroupement intercommunal est davantage contraint, et il convient d'aller au-delà de la mutualisation car on ne la conçoit que pour le personnel. Or les contraintes géographiques s'imposent dans des intercommunalités à la superficie gigantesque : dans le Lot, département de moyenne montagne, le préfet avait présenté un schéma – refusé par les élus – qui prévoyait l'existence de sept intercommunalités pour ce territoire de 5 250 km2, soit une superficie moyenne de 750 km2 par communauté ! On ne peut pas demander aux agents d'effectuer 100 kilomètres en voiture tous les jours.
Il convient de développer la mutualisation des achats. Le domaine du management dans lequel les collectivités accusent le plus grand retard sur les entreprises – même si celles-là ne doivent pas avoir les mêmes objectifs que celles-ci – est celui des achats. Au moment de la crise des années 1970, les entreprises se sont rendu compte qu'elles ne disposaient pas de la force commerciale de leurs fournisseurs ; dans le monde public, ce manque s'avère encore plus flagrant car aucune communauté humaine n'exerce autant de métiers qu'une commune, compte tenu de son budget et de son personnel. Or la fonction achat est limitée au code des marchés publics ; un règlement de consultation est d'ailleurs très épais, alors qu'un cahier des charges ne dépasse pas une page et demie et se contente souvent, non par collusion mais par paresse, de reproduire les spécifications du fournisseur. La mutualisation appliquée aux achats repose sur la spécialisation des communes membres d'une intercommunalité. Les agents feront du sourcing, c'est-à-dire qu'ils s'approprieront la culture technique des fournisseurs pour comprendre la structure des prix et demander à bénéficier d'une partie des gains de productivité que les entreprises réalisent. Cette mutualisation des achats peut également s'opérer entre le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) et le parc de l'équipement, ou entre plusieurs départements – comme en atteste l'expérience conduite dans la région Centre – ou entre un département et de grosses intercommunalités.
En outre, il n'existe pas aujourd'hui, sauf exception, de plan d'investissement intercommunal dans une entité composée d'une ville ou d'un bourg-centre et d'autres communes. En novembre 2012, j'avais suggéré à M. Serge Morvan, alors directeur général des collectivités locales, de mettre en place le coefficient de mutualisation, et j'ai proposé à Mme Lebranchu il y a un an de l'élargir à l'investissement car rien ne justifie que les investissements ne soient pas portés en commun.