L'amendement AC209 vise à donner une définition positive du domaine public. À cet égard, ce projet de loi est sans doute le véhicule législatif le plus approprié de cette législature.
Aujourd'hui, il n'existe aucune définition légale de cette notion. Qu'est-ce donc que le domaine public ? C'est tout simplement la culture libre, l'inspiration, c'est une quantité énorme de livres, de peintures, d'oeuvres musicales, de films, d'inventions, à la portée de tous, qui contribuent à la culture de tous, à l'inspiration d'oeuvres nouvelles.
La définition de ce domaine public permettra précisément d'assurer cette liberté de création que nous avons inscrite à l'article 1er du projet de loi. En effet, il est nécessaire d'utiliser les oeuvres du passé pour créer les oeuvres du futur. Cet amendement, je le précise, ne touche absolument pas au droit d'auteur. En revanche, il protège les oeuvres qui ne sont plus couvertes par le droit d'auteur et qui sont soumises à des droits dont ce n'est pas la vocation : le droit des marques – je songe notamment aux logos –, le droit des bases de données, etc. Par exemple, Les Misérables appartiennent à tous les Français, vous pouvez en faire ce que vous voulez. En votant cet amendement, vous empêcherez que quelqu'un ne dépose une marque « Jean Valjean » et ne s'en serve pour empêcher la distribution et l'adaptation de cette oeuvre mondialement connue. Il s'agit donc, en définissant le domaine public, de le rendre accessible sans crainte à tous les créateurs d'aujourd'hui et de demain. Cela permettra également d'interdire les pratiques dites de copyfraud, c'est-à-dire les revendications abusives de droits sur les oeuvres du domaine public, et d'empêcher que certaines institutions culturelles ou certaines personnes privées ne s'octroient des droits qu'elles n'ont pas, qu'elles ne fassent payer l'accès à des oeuvres du domaine public pourtant en libre accès depuis 100 ou 150 ans, quand ce n'est pas depuis 1 000 ans.
L'amendement AC210, quant à lui, est issu d'une préconisation du rapport Lescure. Il permet à un créateur, à un auteur, de renoncer à son droit d'auteur et de mettre de son vivant les oeuvres qu'il a créées dans le domaine public. Il ne s'agit nullement d'imposer une obligation à tous les auteurs, mais de permettre à ceux qui le souhaitent de donner, de leur vivant, leurs oeuvres à tous ceux qui ont envie de s'en servir pour en écrire une suite, en faire une parodie ou un film, en tirer une pièce de théâtre. Certains écrivains contemporains, tel Pouhiou, souhaitent offrir leurs oeuvres à la société. Or ils ne le peuvent pas, car notre législation, contrairement au droit anglo-saxon, ne prévoit pas cette possibilité.