Intervention de Hervé Drouet

Réunion du 13 décembre 2012 à 9h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Hervé Drouet, directeur de la CNAF :

Dans son rapport, la Cour des comptes souligne une fragilisation des équilibres financiers de la branche en raison, d'une part, du brouillage de sa structure de financement et, d'autre part, de l'accélération du rythme de progression des charges. Notre analyse n'est pas tout à fait celle-là. Selon M. Bertrand Fragonard lui-même, président du Haut Conseil de la famille, le mécanisme d'équilibre joue à long terme dès lors que la dynamique des dépenses est liée aux évolutions démographiques, même si les aides sont concentrées sur les enfants de moins trois ans. En effet, les recettes étant indexées sur la richesse nationale et les prestations sur l'inflation, le différentiel entre le rythme naturel de progression des charges et le rythme naturel de progression des dépenses permet à la branche famille de rester structurellement excédentaire à dépenses constantes. En réalité, ce qui pèse sur le solde de la branche aujourd'hui, c'est l'affaissement des recettes dû à la crise économique, mais surtout l'affectation de dépenses nouvelles en vertu des choix des pouvoirs publics, qui ne correspondent pas forcément aux priorités qu'aurait souhaitées le conseil d'administration de la CNAF pour la branche.

Depuis l'origine, la politique familiale de notre pays est caractérisée par une grande continuité. Selon nous, elle doit s'appuyer sur un financement stable pour pouvoir s'inscrire dans la durée et jouer sur la structuration des comportements – le choix d'avoir un enfant est un choix structurant dans un modèle de vie.

Une des caractéristiques de la sécurité sociale est de bénéficier de recettes affectées : historiquement les cotisations, auxquelles s'est ajoutée en 1991 pour la branche famille la CSG, ressource très dynamique assise majoritairement sur les revenus d'activité. Or cette force de notre modèle de financement est mise à mal par le développement d'une fiscalisation forte mais fragmentée de la branche au travers d'une multiplication de recettes d'appoint peu lisibles et, surtout, dépendantes d'assiettes assez fragiles, dont certaines ont même vocation à disparaître. Il en résulte qu'il faut se reposer chaque année la question de la réaffectation de nouvelles recettes. Cette situation est préoccupante au regard de la stabilité nécessaire au financement de la branche famille.

C'est la raison pour laquelle la pertinence de l'éternel débat sur le financement de la politique familiale par le budget de l'État m'échappe. En effet, si l'on considère que cette politique doit être conduite dans la durée et bénéficier de financements pérennes et suffisamment dynamiques, son financement par dotations budgétaires impliquerait chaque année un débat et un vote en loi de finances sur le montant des ressources de la branche famille, ce qui conduirait à les fragiliser. Pour la CNAF, comme pour la direction de la sécurité sociale (DSS), qui partage notre analyse, l'affectation de recettes est plus sécurisante pour le financement de la politique familiale, mais également plus responsabilisante pour les opérateurs en termes de pilotage.

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