Il s'agit uniquement d'une question de scratch ! Sur le terrain, nos ingénieurs sont au contact des troupes et nous veillons à apporter toutes les améliorations nécessaires.
L'usine de Villeurbanne, qui représente un atout fantastique pour notre pays, est notre « coeur » industriel pour les freins d'avion, qui sont des freins dits « carbone ». En effet, si, dans l'automobile, on utilise des freins d'acier, pincés par des plaquettes et réalisés dans des matériaux résistants à la chaleur, on se sert dans l'aviation, pour gagner en masse, de disques de carbone pour lesquels on recourt à des technologies de tissage analogues à celles que met en oeuvre Albany. Les disques empilés sont pressés pour ralentir l'avion par frottement et parviennent à absorber la chaleur considérable qui se dégage alors. Pour cette technologie, à laquelle nous recourons depuis la fin des années quatre-vingt, nous avons des concurrents nord-américains mais nous sommes, même si c'est de peu, le premier acteur mondial. Plus de 5 000 avions volent avec nos freins et, dans cinq ans, il y en aura 10 000. Le coeur de la fabrication est à Villeurbanne mais, parce qu'on change régulièrement les freins, nous avons également une usine aux États-Unis. Nous en ouvrirons prochainement une troisième en Asie, ici encore pour être proches de nos clients.
Cette technologie procède directement de la force de dissuasion : elle provient des recherches menées dans les années soixante-dix sur les tuyères ou cônes d'échappement des moteurs des missiles balistiques. Ces matériaux très légers ont remplacé des métaux cinq à six fois plus lourds, tels que le tungstène ou le molybdène, et peuvent résister à des températures supérieures à 1 000 degrés. Leur mise au point ne s'est pas faite en un jour : depuis vingt-cinq ans, nous sommes copropriétaires d'un laboratoire du CNRS qui se consacre à des recherches quasiment fondamentales sur ces composites carbone-carbone.
Le moteur TP400 conçu pour l'avion A400M a été un défi réussi pour l'industrie européenne, même si les contraintes de délai nous ont exposés à des aléas. Il peut être fonctionnel dans un domaine de vol exceptionnellement étendu. Si nous espérons exporter l'A400M, donc indirectement son moteur, il est trop tôt pour annoncer d'autres applications pour un turbopropulseur de cette dimension. Cependant, pour le transport régional où l'on utilise souvent des avions volant plus lentement et moins haut que les avions à réaction, cette technologie permet de réduire de 20 à 25 % la consommation de carburant. Dans un contexte caractérisé par le coût élevé du pétrole et par la prise de conscience des enjeux environnementaux, il est par conséquent probable que l'on passera pour ce trafic du turboréacteur au turbopropulseur.
D'autre part, on observe actuellement une reprise des ventes d'ATR, dont les moteurs font 3 000 à 4 000 chevaux. Les ATR de cent places, donc un peu plus grands que les modèles actuels, que nous verrons apparaître dans quelques années, réclameront une puissance de 5 000 chevaux. Le TP400 en offre 11 000 !
Pour l'instant donc, nous n'avons pas d'application civile en vue, mais, s'il s'en présente, nous n'hésiterons pas.
Même si Safran produit un armement air-sol modulaire qui n'est pas très loin du missile, il n'a pas d'activité dédiée à cette fabrication. Je ne peux donc pas vous répondre sur la filière missiles européenne.
Nous estimons a priori que le pacte de compétitivité permettra à Safran de dégager une vingtaine de millions d'euros, que nous consacrerons probablement à l'investissement et à l'innovation.