Intervention de Gérard Cherpion

Réunion du 29 septembre 2015 à 15h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion, rapporteur :

Que nous soyons de droite, de gauche ou du centre, il nous faut reconnaître que la France vit un moment particulièrement difficile et se trouve à un tournant historique. Il nous faut parvenir à réduire enfin ce chômage de masse qui dure depuis des années, et dont la responsabilité est partagée. Il nous faut sortir de cette intolérable trappe à exclusion où sont enfermées plus de 5,7 millions de personnes.

Contrairement à ce que j'ai entendu, il ne s'agit pas de faire travailler plus dur les femmes, mais de faire qu'il y ait plus de femmes qui travaillent, même si c'est à temps partiel, quitte à compléter ce revenu partiel par les fonds de l'UNEDIC. Mieux vaut ne travailler qu'une partie du temps, mais rester dans le circuit de l'emploi, car c'est l'emploi qui permet de se tenir debout plutôt que de se replier sur soi-même et de ne plus être un acteur de la société. C'est une conception qui n'est pas dogmatique et que, je crois, nous pouvons partager.

Mme Khirouni nous dit que 50 000 emplois disparaissent chaque année, du fait de fermetures d'entreprises. Le nombre est en vérité plus élevé : ce sont entre 60 000 et 80 000 emplois qui sont ainsi perdus. Mais pourquoi ces entreprises ne trouvent-elles pas de repreneur ? Est-ce parce qu'elles sont dans des secteurs où nous perdons de la compétitivité, où nos produits ne correspondent plus aux demandes du marché, ou à cause de l'accumulation des règles financières, fiscales et sociales propres à notre pays ? Sur ce sujet aussi, nous pouvons avoir des divergences, mais nous avons tous péché. Aujourd'hui, l'occasion est belle de revenir sur un certain nombre de mesures prises dans les domaines fiscal et social.

La loi du 28 juillet 2011 pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels, qui m'est chère, avait inscrit les stages dans les cursus de formation. Il est excessif de prétendre que les stages ne sont que de l'emploi déguisé, abusif : cela a existé, cela existe peut-être encore, mais beaucoup moins depuis que le stage est inscrit dans le cursus de formation et que la convention doit être signée par le jeune, l'employeur et l'organisme de formation – qu'il s'agisse d'une université, d'un centre de formation des apprentis (CFA) ou d'un centre relevant de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA). Certes, il y aura toujours des employeurs ne respectant pas les règles, mais la formule du stage doit être préservée, car elle constitue une possibilité pour les jeunes d'entrer dans l'entreprise, pour une courte période d'abord, de façon éventuellement plus durable ensuite.

Je remercie Isabelle Le Callennec et Arnaud Richard, qui ont mis en évidence la nécessité de revenir sur un certain nombre de mesures contre-productives.

M. Liebgott a mis en avant le CICE, mais celui-ci ne fait que maintenir ce qui existait auparavant : il faut garder à l'esprit que, sur plus de 40 milliards d'euros d'impôts prélevés, une moitié seulement est restituée, qui ne va pas forcément là où il y a des besoins : il n'est que de citer le cas des grandes surfaces, ou même de La Poste, qui sont déjà bénéficiaires.

Bernard Perrut a bien mis en perspective l'ensemble des problèmes et souligné l'importance de revenir au bon sens.

Mme Bulteau nous reproche notre prétendue mauvaise gestion, mais ce n'est pas la question : ce dont il s'agit, c'est d'abroger un certain nombre de dispositions qui se révèlent contre-productives. Et, puisqu'elle nous accuse de prôner le « travailler plus pour gagner moins », je l'invite à assister demain matin à la réunion au cours de laquelle Isabelle Le Callennec et moi-même proposerons des mesures permettant, au contraire, de gagner plus.

Il est vrai que, malgré une légère amélioration, trop de femmes sont victimes du temps partiel subi, mais ce ne sont pas les lois votées depuis 2012 qui permettront de changer cet état de fait. Les aides à domicile en milieu rural (ADMR), par exemple, sont souvent des femmes qui travaillent le matin de bonne heure, puis en milieu de journée, puis le soir lorsque les enfants sont rentrés de l'école. L'objectif du plancher de 24 heures était bien, dans l'esprit de la majorité comme dans celui des partenaires sociaux, d'éviter ce temps fractionné, ce qui était louable, mais il a fallu ménager des dérogations qui ont vidé la mesure de sa substance.

Bernard Accoyer a raison : il faut identifier les freins, qui sont nombreux, afin de les desserrer, car il y a eu, en trois ans, 1,1 million de chômeurs supplémentaires, et l'on voit bien que la courbe n'est pas près de s'inverser.

Arnaud Robinet, enfin, a souligné à juste titre que notre démarche n'a rien de dogmatique ; il s'agit simplement de prendre la mesure de la réalité et des obstacles. Je vous concède, mes chers collègues, que notre proposition de loi ne va pas assez loin, mais nous ferons, dans les semaines à venir, d'autres propositions, témoignant de notre souhait que la valeur travail demeure une valeur largement partagée, car le travail crée l'activité, qui crée l'emploi en retour.

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