Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes appelés aujourd’hui à nous prononcer sur le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. Ce texte embrasse trois grands thèmes relatifs à la culture, trois thèmes qui auraient mérité autant de textes distincts, tant ces trois sujets – le statut des artistes, le patrimoine et l’architecture – sont complexes et exigeants.
Cela étant, ce texte a le mérite d’exister, car il importe d’offrir à la culture toutes les possibilités de sa préservation, de son épanouissement et de son rayonnement.
La culture n’est-elle pas ce qui définit l’évolution des sociétés au cours des siècles ? La malmener, l’ignorer, c’est enfermer, c’est entraîner vers l’oubli, c’est compromettre l’avenir, c’est asservir.
Il suffit pour cela de se référer à cette volonté macabre et obstinée de certains d’enfermer les hommes dans la peur en leur ôtant leur culture afin de les soumettre, de les bâillonner. Je pense ainsi à la destruction de mausolées à Tombouctou, au Mali, à celle de la cité antique de Hatra, en Irak, et bien sûr à celle du temple de Bel et de l’arc de triomphe de Palmyre en Syrie.
Un texte sur la culture est donc soumis aujourd’hui à notre approbation et je m’en réjouis car, comme le rappelle très justement l’exposé des motifs du projet de loi, la culture « rend possible l’émancipation individuelle et la citoyenneté. Facteur de cohésion sociale, de transmission, de partage et d’innovation, la culture contribue au projet de notre République ».
La relation intime entre liberté et création est d’emblée affirmée dans l’article 1er du présent projet de loi. La création et la liberté sont en effet interdépendantes, indissociables. « La liberté, c’est l’indépendance de la pensée », écrivait Épictète.
L’article 2 du projet de loi, par les différents points qu’il énonce, porte la volonté de protéger la liberté de création dans la production artistique. Il vise également à garantir la formation des artistes, la transmission des savoirs, l’éducation à la culture dès l’école.
Concernant toujours cet article 2, je tiens à saluer ici l’ajout, par un amendement adopté en commission, de la notion d’implication des artistes dans les actions d’éducation artistique et culturelle « à destination de toutes les personnes, notamment de celles qui sont les plus éloignées de la culture, des publics spécifiques, ainsi que des jeunes ».
Par ailleurs, le projet de loi clarifie les conditions d’emploi et de rémunération des artistes, règles essentielles pour leur permettre de créer, et aux entreprises qui les produisent de subsister. L’équilibre doit absolument se faire dans le respect des uns et des autres. C’est ce à quoi tend ce texte.
Concernant les pratiques amateurs, le groupe RRDP ne peut que se satisfaire de la place que vous avez souhaité leur donner, madame la ministre. Cette reconnaissance leur était due.
Le projet de loi traite enfin de la question du patrimoine et de l’archéologie préventive. Je souhaiterais rappeler ici que le patrimoine n’est pas fondé sur la notion du passé seul. Il permet d’observer notre temps contemporain, de se projeter dans l’avenir.
Concernant l’archéologie préventive, c’est avec grande satisfaction que ma collègue Gilda Hobert et notre groupe ont été écoutés sur le rôle de son opérateur public, l’INRAP. Ainsi, un amendement que nous avions déposé à l’article 20 en commission, puis en séance publique et repris par notre collègue Marie-George Buffet, a été adopté. Il dispose que les dépenses engagées dans le cadre des contrats de fouilles archéologiques prévus à l’article L. 523-9 du code du patrimoine n’ouvriront pas droit à un crédit d’impôt.
Il nous paraissait essentiel de protéger le travail de l’opérateur public d’archéologie préventive, eu égard à la mission de service public dont il est investi. La question était d’autant plus importante que les opérateurs privés pouvaient bénéficier du crédit d’impôt recherche, ce qui leur donnait les moyens de tirer les prix vers le bas et de placer l’opérateur public de recherches archéologiques préventives face à un véritable dumping social et scientifique.
Enfin, et puisque « l’essentiel est invisible pour les yeux », comme l’écrivait Antoine de Saint-Exupéry dans Le Petit Prince, son oeuvre universelle, un amendement du rapporteur, analogue à celui que nous avions proposé, permet la reconnaissance du patrimoine culturel immatériel au sens de l’article 2 de la Convention internationale pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. C’est là un point essentiel auquel nous étions particulièrement attachés.
Voilà, madame la ministre, l’essentiel de ce que je voulais vous dire sur ce projet de loi que le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste approuvera d’une manière des plus matérielles – par un vote positif, donc.