Intervention de Sanita Pavluta-Deslandes

Réunion du 30 septembre 2015 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Sanita Pavluta-Deslandes, ambassadrice de la République de Lettonie en France :

C'est la tradition balte : avant l'arrivée des indo-européens, les pays baltes et nordiques étaient des matriarcats ; nous en gardons des traces… (rires)

Une remarque préalable sur le nucléaire. Comme vous le savez nous ne disposons pas de l'arme nucléaire, mais nous faisons partie de ceux qui ne réclament pas son interdiction. Je pense que la France nous a toujours considérés comme alliés et partenaires dans ce débat. J'ai brièvement évoqué le cyber comme élément de la guerre hybride, mais je laisserai à mon collègue estonien le soin d'évoquer ce sujet plus en détail.

Concernant la cyber-sécurité, il est vrai que la cyber-attaque contre l'Estonie a fait office de réveil pour nous tous et nous avons pris mesures en conséquence. Notre système fonctionne. Nous avons notamment pris des mesures avant de prendre la présidence du Conseil de l'Union européenne, puisque l'expérience des autres États ayant assuré cette présidence nous apprend que celle-ci constitue toujours une occasion d'augmentation de l'activité et des risques cyber. Mais tout s'est bien passé.

Sur les réfugiés, nous sommes tous concernés. Vous le savez, les négociations ont été très complexes, à Bruxelles comme dans chacun des États membres. Cela n'a pas été facile chez nous non plus car les opinions publiques sont ce qu'elles sont et le débat politique est ce qu'il est. Nous avons toujours un gouvernement de coalition, ce qui complique les choses. Toutefois, nous sommes parfaitement conscients du fait que la solidarité n'est pas à sens unique ; elle va dans les deux sens. Les décisions prises par les chefs d'État et de gouvernement et les ministres de l'Intérieur s'appliquent donc à nous et nous sommes tout à fait prêts à honorer nos engagements. Des préparatifs sont actuellement en cours notamment pour le déblocage de financements, la mise en place de lieux d'accueil, etc. En outre nous n'avons pas de tradition d'accueil de ce type de réfugiés, dès lors nous apprenons. Nous sommes de bons européens conscients de nos responsabilités.

La question du 16 mars m'est assez rarement posée mais elle est très pertinente. Pour mettre les choses au clair et même si cette expression est parfois reprise, notamment par la presse internationale, je tiens à préciser que cette journée ne s'appelle pas « Jour de la Légion Waffen SS ». Cette expression n'est pas utilisée en Lettonie. Il s'agit d'un jour de commémoration pour les soldats tombés en combattant du côté allemand. L'histoire de la Lettonie est très compliquée, comme celle de nombreux pays du reste, dont la France avec l'Alsace par exemple. Les combattants en question étaient de jeunes Lettons enrôlés de force en 1943 pour combattre du côté allemand, en infraction avec le droit de la guerre. Ils ont certes combattu dans des unités SS mais ils n'ont pas participé aux exactions commises par celles-ci. Le tribunal de Nuremberg a d'ailleurs reconnu que le fait d'appartenir à la SS ne constitue pas en tant que tel un crime de guerre. Pour les survivants, il s'agit de commémorer leurs camarades tombés.

En principe, il s'agit d'une commémoration paisible même s'il est vrai qu'elle est souvent instrumentalisée au travers de contre-manifestations et dégénère parfois, notamment pour « faire le show » devant les caméras de télévision. Le gouvernement ne la soutient pas et n'y participe pas. En tout état de cause nous sommes un pays démocratique et tant qu'il n'existe pas de trouble à l'ordre public ou d'infraction à la loi, il n'est pas possible d'interdire cette manifestation. C'est une page très complexe de notre histoire. Mais je souligne une fois encore que le fait que ces jeunes gens aient combattu du côté allemand n'en fait pas automatiquement des criminels de guerre. Je rappelle par ailleurs que dans de nombreuses familles lettonnes, certains ont été enrôlés de force du côté allemand tandis que leurs frères ou leurs pères combattaient au sein de l'Armée rouge, ce qui démontre la complexité de la question.

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