Intervention de Frédéric Aussedat

Réunion du 30 septembre 2015 à 16h15
Commission des affaires économiques

Frédéric Aussedat, CFE-CGC :

Vous avez soulevé la question des cinq technologies basées en France – leur avenir et leur articulation entre les sites.

Sur l'articulation entre les sites, nous n'avons pas de visibilité aujourd'hui. Je ne peux donc pas vous répondre.

Sur l'avenir de ces technologies :

Il est clair que la 5G est l'avenir des télécoms. Il faut donc s'y mettre. Plus personne, dans Alcatel, ne travaillait sur ce qui a trait aux spécifications techniques au niveau mondial. Nous étions donc absents. Le fait de revenir avec Nokia nous permettra de participer aux spécifications de cette nouvelle génération. Nokia s'est engagée à ce qu'il y ait des développements en France. Aujourd'hui, les ressources existent. Nous devons les faire évoluer au niveau des compétences sur des fonctions qui n'existent pas encore. Ce ne sera pas facile à lancer rapidement. Il n'empêche qu'il est prévu d'embaucher des jeunes, et de faire migrer des équipes sur le sujet.

S'agissant des small cells, nous nous heurtons à un problème dont on a parlé dans notre introduction. Aujourd'hui, au niveau de la fiscalité, les grandes et les petites antennes sont taxées de la même manière – 1 500 euros par antenne posée. Une small cell couvre à peu près 300 mètres, alors qu'une grande antenne peut couvrir jusqu'à 30 km. Le calcul que font les opérateurs est très facile : le prix de la small cell est beaucoup plus bas que celui d'une grande antenne, mais à 1 500 euros par antenne posée, au-delà de 30, ils basculent sur une grande antenne. L'avenir de la small cell va donc dépendre de l'évolution de la fiscalité sur les antennes, qu'il faut réadapter à la vie et à l'écologie d'aujourd'hui. Et c'est à vous d'intervenir. Vous êtes directement concernés. Si on ne peut pas développer les small cells parce que l'on n'en vend pas, c'est un cinquième du travail qui sera basé en France qui disparaîtra.

Maintenant, quel est l'avenir des faisceaux hertziens ? Ceux-ci sont essentiellement utilisés dans les pays où il y a peu d'infrastructures linéaires stables, des pays en fort développement où l'instabilité économique fait que l'on y vole très facilement le cuivre – bien plus qu'à la SNCF. Mais l'activité restera assez stable, plutôt tournée vers l'entretien, et on ne peut pas prévoir un grand développement. Dans d'autres pays, on utilise aussi des câbles hertziens, dans des situations très particulières. On peut déployer des câbles pour relier des îles, parce que c'est ce qui coûte le moins cher. Mais cela se fait sur des distances qui ne sont pas extrêmement longues.

Avec les plateformes de gestion de réseau IP, on est dans le futur. C'est typiquement un domaine qui va se développer. Nous y sommes présents au niveau Bell Labs, mais beaucoup moins au niveau technologie pure. Reste que s'il y a effectivement une force croissance à attendre, il faut que les investissements suivent. Nokia a annoncé que des plateformes de gestion seraient installées sur les sites, et accessibles à la fois aux clients et aux startups. Nous pourrions travailler avec eux. Je pense que c'est un point positif qui ne peut que favoriser l'emploi.

J'en viens à la cybersécurité, qui est aujourd'hui un enjeu stratégique. On pense qu'elle va se développer énormément. La prochaine guerre ne se fera pas avec des armes, elle sera électronique. Le jour où l'on embête la Chine, elle fait tout « tomber » : pas de télécommunications pendant trois mois, l'économie française est morte et la France à dépecer.

Il faut donc se préoccuper de la cybersécurité – ne serait-ce qu'au coeur des réseaux. Les Américains l'ont bien compris puisqu'ils interdisent un certain nombre de produits au coeur de leurs réseaux – c'est-à-dire tous les produits qu'ils ne maîtrisent pas. En revanche, l'Europe accueille à bras ouverts, ce qui risque d'être dommageable en cas de combat économique gravissime. On sait déjà que certains pays se sont spécialisés dans les attaques. C'est le cas des Russes. C'est le cas des Américains qui en ont lancé dans certains pays dont ils n'appréciaient pas les orientations – en particulier en matière nucléaire.

Aujourd'hui, ni l'Europe ni la France ne consacrent de moyens spécifiques pour se protéger. Nous restons des naïfs qui pensent que le monde est bon. Le jour où nous recevrons une claque, cette claque ne nous permettra pas d'apprendre, elle nous mettra définitivement à terre.

L'avenir est donc d'investir dans la cybersécurité. Certains pays, comme Israël, le font – officiellement ou non. Et quand je parle de cybersécurité, je parle aussi de cybersécurité offensive. Malheureusement, ce n'est pas un sujet auquel les législateurs européens et français sont sensibles. De leur côté, les opérateurs n'étant pas soumis à des contraintes en matière de cybersécurité, celle-ci n'est pas leur priorité. Leur priorité, c'est le rendement – d'où leur préférence pour les produits chinois, qui sont moins chers.

À propos des Bell Labs, fleuron d'Alcatel et fleuron en matière de R&D, des engagements ont clairement été pris. C'est très important, mais je n'ai pas une vision très spécifique du sujet. Enfin, en matière de transmission optique, je ne suis pas un grand spécialiste. Je vais donc passer la parole à mes collègues.

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