Intervention de Bernard Accoyer

Réunion du 25 septembre 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer :

Mes interventions ici m'ont souvent fait apparaître comme le gardien du temple. Ce sera encore le cas aujourd'hui.

Prises dans leur ensemble, ces propositions me paraissent remettre en cause plusieurs grands principes de la Ve République, en particulier celui de la stabilité gouvernementale. Vous mettez en danger la capacité de nos institutions à surmonter les blocages en revenant sur le parlementarisme rationalisé, qui avait été la conséquence heureuse de l'échec, terrible pour notre pays, et peut-être pour le monde, des institutions de la IIIe puis de la IVe République.

En proposant la limitation des mandats dans le temps, nous nous illustrons une fois de plus en n'attendant même pas l'évaluation de la réforme précédente, celle de la fin du cumul des mandats. C'est là une maladie purement française.

Chacun souhaite naturellement qu'un ancien élu puisse se réinsérer dans la vie professionnelle. Mais il faut écouter ce que disent les Français. Il faut aussi se pencher sur certaines situations dérogatoires : ainsi, les fonctionnaires retrouvent automatiquement une place après la fin de leur mandat. La question se pose donc aussi d'obliger à la démission les fonctionnaires élus, quitte à faciliter pour tout le monde le retour à l'emploi après un mandat.

La grande affaire de ce rapport, c'est l'introduction de la proportionnelle. J'observerai que celle-ci n'est pas inscrite dans la Constitution. J'observerai surtout qu'à coup sûr nous en arriverions à une Assemblée comportant des partis charnières, c'est-à-dire à un déséquilibre entre la représentativité de telle ou telle famille politique ou de tel ou tel élu d'une part, et l'importance de ses votes de l'autre – c'était très souvent le cas sous la IIIe et la IVe République. En découleraient, de façon assurée, instabilité, blocage, paralysie.

L'autre proposition forte est celle de fusionner le Sénat et le CESE. Ce serait là une remise en cause du bicamérisme, qui est pourtant au coeur de nos institutions depuis le début de la République, et qui prévaut dans la plupart des démocraties. C'est aller trop vite et trop fort, alors que l'apport du Sénat dans les discussions parlementaires est essentiel. Nous légiférons de façon plus qu'imparfaite ici, à l'Assemblée nationale, et heureusement que le Sénat est là pour écouter les représentants des groupes d'intérêts – souvent honnis et pourtant indispensables : c'est ainsi que sont parfois sauvés des pans entiers de notre économie. Il vaudrait mieux insister sur le rôle du Sénat – mais aussi de l'Assemblée – dans le contrôle et l'évaluation.

Supprimer la limite du nombre de commissions, ce serait revenir à la situation de la IIIe et de la IVe République : on connaît les conséquences délétères d'une telle mesure. Quant à supprimer l'article 40 de la Constitution alors que nous avons plus de 2 000 milliards d'euros de dettes, je vous invite à réfléchir quelque peu !

Vous demandez enfin une modernisation de la procédure. Il faudrait commencer par mettre en oeuvre ce qui existe déjà dans notre Constitution et dans notre règlement. Ne jetons pas au panier la semaine de contrôle alors que nous n'usons pas des pouvoirs qui ont été inscrits dans la réforme de 2008, ce que je regrette énormément ! Si nous voulons mieux légiférer, il faut moins légiférer. Si nous voulons mieux remplir notre mission, il faut passer plus de temps à évaluer, à contrôler : ce n'est pas en supprimant la semaine de contrôle que nous y parviendrons.

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