Intervention de Denis Baranger

Réunion du 25 septembre 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Denis Baranger :

En lisant le rapport, je suis à la fois soulagé et reconnaissant : soulagé parce que, n'ayant rendu ma contribution qu'hier soir, je ne me sens pas trop, ce matin, désavoué par la synthèse et par le consensus ; reconnaissant, car ce travail s'est fait sous le signe de la liberté et du réalisme. Il faut se rendre compte que le rapport Vedel, en 1993, représentait cinq pages du Journal officiel. Les rapports qui ont suivi – ceux de la commission Balladur ou de la commission Jospin – étaient très intéressants, mais, présentés sous forme de synthèse, ils ne permettaient pas de savoir ce que les membres pensaient individuellement – c'est pourquoi Dominique Rousseau avait milité en faveur d'une opinion dissidente. Dans notre cas, la liberté est totale : toutes les interventions publiques figureront dans le tome II du rapport, tous les enregistrements sont retranscrits. Quel que soit le contenu de ce rapport, je peux d'ores et déjà dire qu'il me convient, puisque nous avons eu la possibilité de dire ce que nous pensions.

J'ai parlé de réalisme : nous ne demandons pas l'impossible, nos propositions sont assez vraisemblables, bonnes et plausibles, et ne remettent pas en cause le noyau dur de stabilité de la Ve République. Je suis moins inquiet que le président Accoyer : le noyau dur des institutions n'est pas remis en question, et les modifications proposées peuvent présenter un certain intérêt. Je dirai, après Giuseppe Tomasi di Lampedusa, qu'il faut que tout change – un peu – pour que rien ne change.

La représentation proportionnelle n'a pas les mêmes conséquences selon qu'elle porte sur 10 %, 20 % ou 50 % de l'Assemblée. Monsieur le président Bartolone, vous avez, dans votre livre, proposé entre 10 % et 20 % ; le rapport Jospin proposait 10 %. La représentation proportionnelle est nécessaire pour faire taire l'argument de la non-représentativité, mais il ne faut pas se priver de la possibilité de constituer des majorités. Si j'ignore où placer exactement le curseur, je sais que 50 %, c'est trop, et que 10 %, ce n'est pas assez. Selon la proportion retenue, les propositions sont très différentes.

J'avoue avoir un doute sur la question des référendums d'initiative populaire. Je ne suis pas contre l'initiative populaire, mais le référendum reste toujours une technique médiatisée.

J'appelle votre attention sur un point technique. Dans la proposition n° 4, il est écrit au second paragraphe : « perfectionner la procédure prévue au premier alinéa de l'article 11 de la Constitution en élargissant son champ pour en faire un véritable référendum législatif ». La formule me gêne un peu, car, d'un point de vue technique et juridique, le référendum prévu à l'article 11 est d'ores et déjà un véritable référendum législatif. Le Conseil constitutionnel a même jugé dès 1962 qu'il manifestait l'expression directe de la volonté nationale. Je comprends la vision politique qui pousse à écrire que cette mesure le transformerait en un véritable référendum législatif, mais c'est déjà le cas : une loi adoptée en application de l'article 11 est une loi ordinaire de la République, au même titre qu'une loi adoptée par le Parlement, à la différence qu'elle ne fait pas l'objet d'un contrôle du Conseil constitutionnel.

S'agissant de la proposition n° 7 sur l'inversion des calendriers, qui me séduit assez, une jurisprudence du Conseil constitutionnel précise qu'il est conforme à l'esprit des institutions que le Président de la République soit élu avant l'Assemblée nationale. Cette proposition, qui me plaît politiquement – au sens de politique constitutionnelle et non de politique partisane –, signifie le retour de la dissolution. Un président embarrassé par une majorité insuffisante voudra dissoudre. Veut-on le retour de la dissolution ? Pour le moment, elle est heureusement entrée en désuétude, car ce qui s'est passé en 1997 a montré que cela pouvait être dangereux.

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