Monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous voici donc appelés à débattre du dernier budget de la mandature pour la majorité actuelle, puisque le prochain durera jusqu’aux élections présidentielle et législative de 2017.
Mon premier constat sera de dire que la lucidité n’est, hélas ! pas au rendez-vous, avec des hypothèses macroéconomiques très exagérées. En effet, en prenant pour hypothèse de départ une croissance de 1,5 point, le Gouvernement a choisi de se donner de la marge pour optimiser les prévisions de recettes fiscales. Malheureusement, le Haut conseil des finances publiques, que vous avez-vous-même créé, n’est pas de cet avis, puisqu’il a relevé que « l’hypothèse d’une croissance de 1,5 % en 2016 ne peut plus être qualifiée de « prudente », comme elle l’avait été en avril dernier. ». Hypothèse imprudente, donc.
Rappelons que, sur la période de 2012 à 2014, la croissance moyenne a été de 0,3 % et que, depuis 2011, la France n’a jamais dépassé 1,5 % de croissance. Le volontarisme a ses limites.
À partir de cette base optimiste, vous calculez les impôts. Vous les avez tellement augmentés ces dernières années – les prélèvements obligatoires sont en effet passés de 42,6 % du PIB en 2012 à 44,9 % en 2014 – que vous avez cassé l’outil fiscal. Les conséquences en sont connues : une explosion de l’économie au noir, la fuite des travailleurs à l’étranger et un découragement généralisé de la France qui travaille. Un seul chiffre suffit à le démontrer : l’élasticité moyenne des recettes à la croissance a été de – 0,6 entre 2012 et 2014, alors que, depuis 2005, elle était toujours supérieure à 1.
Or, une élasticité négative signifie qu’une hausse de la croissance est susceptible de provoquer une variation à la baisse des recettes. Cherchez l’erreur ! Voilà pourquoi vous aurez en 2016 la double peine : une croissance probablement moins élevée que vos estimations et une croissance des recettes fiscales inférieure au taux de croissance du PIB.
La conséquence logique est que vous avez décidé, l’an dernier, un rétropédalage tardif, avec des baisses ciblées. Comme La Bruyère dans Les Caractères, vous vous êtes contentés de rendre au public ce qu’il vous avait donné. Vous prétendez donc baisser les impôts après avoir pressé le citron jusqu’à ce que les pépins craquent. Il n’en demeure pas moins que votre politique fiscale de gribouille porte le sceau de l’injustice.
S’il est vraisemblable que le taux de prélèvements obligatoires devrait rester stable, l’effort fiscal au titre de l’impôt sur le revenu a en effet été concentré sur les classes moyennes et supérieures. Les « gestes fiscaux » de ces deux dernières années n’ont eu pour effet que de diminuer le nombre de contribuables, puisque moins de la moitié des Français paient l’impôt sur le revenu.