Intervention de Anne-Yvonne Le Dain

Réunion du 8 juillet 2015 à 17h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne-Yvonne Le Dain :

- Nous avons travaillé sur la question des semences. Une semence est une graine. Dans le monde d'aujourd'hui, derrière les semences, il y a beaucoup de technicité, de technologie et de science.

L'audition publique a mis en lumière l'importance économique cruciale de la filière semencière française. Le dynamisme de la filière a permis à la France de se hisser au rang de premier producteur européen de semences et à celui de deuxième exportateur mondial, dans un environnement mondial pourtant très concurrentiel. Il s'agit d'un secteur stratégique, porté par l'innovation, et qui constitue une force économique pour la France. Il apparaît donc essentiel de contribuer à son développement, notamment grâce à une réglementation évolutive et adaptée à ses besoins.

En matière de protection de l'innovation, l'Union européenne a désormais opté pour le système du Certificat d'obtention végétale (COV) qui lui est apparu moins contraignant que le système du brevet, et plus compatible avec le maintien, la préservation et la valorisation de la biodiversité cultivée. En effet, le système du COV permet l'exemption du sélectionneur. Contrairement au brevet, le COV encourage donc l'innovation variétale. Par ailleurs, le COV prévoit une exemption de l'agriculteur, lequel est autorisé à reproduire ses propres semences sur son exploitation, pour sa propre utilisation, à condition de contribuer à l'investissement que représente la recherche par le paiement d'une redevance.

La capacité productive de la filière semences a été acquise de longue date grâce à ce cadre réglementaire adapté, avec des droits de propriété intellectuelle sur la création de nouvelles variétés végétales. Le système du COV – auquel la recherche publique se montre attachée – s'avère efficace car il permet d'assurer la pérennité des financements de la recherche variétale et du progrès génétique, et qu'il n'obère pas les évolutions futures en bloquant l'usage de tel ou tel “caractère d'intérêt” au bénéfice quasi-définitif d'un tiers. Enfin, il est important de prendre en considération les demandes de l'ensemble des acteurs de la filière et de parvenir à une solution équilibrée entre semences certifiées, telles qu'évoquées ci-dessus et semences dites « de ferme », afin que ces dernières puissent bénéficier d'une forme de reconnaissance scientifique et juridique des pratiques paysannes de production et d'échanges de semences et de plantes.

La France a son rôle à jouer dans la préservation de la biodiversité en matière de semences. À cet égard, il serait souhaitable qu'elle se dote d'un conservatoire national des semences scientifiquement référencé, à l'instar de ce que pratiquent un certain nombre de pays, comme les États-Unis et le Japon. Ces banques de conservation permettent un accès simplifié au matériel végétal, indispensable à la sélection qui permet d'adapter les plantes cultivées aux besoins locaux, agricoles et alimentaires, aux réalités et aux évolutions environnementales et au développement des nouvelles maladies. Compte tenu de la place prépondérante de la France, tant pour la production que pour l'exportation de semences, la création d'un conservatoire national ne pourrait qu'avoir des retombées positives sur l'ensemble de la filière et conforterait sa notoriété et son indépendance.

Par ailleurs, afin de contribuer au dynamisme de la filière, il apparaît également nécessaire de renforcer la formation de personnels qualifiés dans le domaine de l'évaluation. En effet, les modalités d'inscription au catalogue reposent sur deux grands concepts, les critères DHS (distinction, homogénéité, stabilité) et VATE (valeur agronomique, technologique et environnementale). La vérification de la conformité aux critères DHS et VATE mobilise donc de nombreux personnels spécialisés. Il serait souhaitable de renforcer ce capital de compétence et d'expertise et de le développer avec le réseau professionnel, en ouvrant des formations correspondantes à ces besoins, notamment de type technicien (niveau licence ou licence pro), dans les établissements scolaires et universitaires.

Enfin, il convient de préciser que les filières horticoles et fruitières sont concernées par ces questions, tout autant que les filières céréalières, légumineuses ou fourragères. C'est la raison pour laquelle, dans le précédent texte, je parlais de semences et de plants, plutôt que de plantes.

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