Soit, mais je ne crois pas que l'augmentation annuelle moyenne du reste à charge des assurés améliore l'efficience du système. En 1989, lors de la négociation des conventions médicales, le président de la Confédération des syndicats médicaux français de l'époque nous demandait de « responsabiliser les patients » autrement dit, d'augmenter le ticket modérateur pour réguler par la demande ! Certes, le problème de la demande existe et la prise en charge des soins n'est pas toujours cohérente. Comment prétendre, toutefois, que le système est aujourd'hui régulé de manière responsable ?
Le dérapage budgétaire n'est pas lié au secteur hospitalier. Chacun connaît les mouvements de création des groupements hospitaliers, de rationalisation – qui a provoqué la fermeture des structures les moins performantes, qu'il s'agisse de maternités ou de petits blocs opératoires – et de restructuration des services d'urgences. Tout cela est poli, et vaut aussi pour la médecine de ville. Le président de la Fédération de l'hospitalisation privée dénonçait récemment le projet de loi de Mme Touraine – comme, en son temps, le projet de loi dit « HPST » fut dénoncé par les médecins hospitaliers – en prétendant que l'on sauverait le système en donnant davantage de liberté aux médecins. Il n'y a pourtant pas de liberté sans responsabilité : nous avons fait le choix d'une maîtrise médicalisée de la dépense. De ce point de vue, un amendement pourrait, je l'espère, être déposé pour donner au Gouvernement la base légale lui permettant de sécuriser des conventions de régulation démographique, ou d'en conclure avec les professions qui n'en ont pas encore passé.
Dans ces conditions, nul ne saurait prétendre que l'on peut réguler un système fondé sur le libre choix de l'installation, de la prescription et du médecin par une opération du Saint-Esprit – en l'espèce, un tiers payeur. La Cour des comptes nous demande s'il sera possible de garantir la maîtrise de la dépense dans un contexte où les territoires ruraux sont sous-médicalisés tandis qu'ailleurs existe une « surdémographie » médicale qui explique la croissance de la dépense. De même, on entend souvent dire que l'on prescrit trop de médicaments, mais l'augmentation de la dépense en médicaments n'est pas tant liée au volume qu'au coût du panier, même si certains pharmaciens jouent le jeu du générique, dont le prix est parfois moitié moindre que celui d'un médicament breveté.
En clair, il faut conclure des contrats de régulation avec les professions de santé. Certes, l'enjeu se politise à l'approche d'élections, comme en ce moment, et ce n'est pas nouveau. S'il advenait néanmoins que l'opposition actuelle redevienne majoritaire en 2017, elle se trouverait dans la situation qui a été la nôtre lorsqu'il a fallu faire évoluer la loi « HPST », et elle s'inscrirait dans la droite ligne de la future « loi Touraine » – dénoncée par les médecins – car elle ne parviendrait pas à stabiliser le système autrement qu'en diminuant le taux moyen de prise en charge, ce qui entraînerait un transfert vers les mutuelles et susciterait une inégalité devant les soins.
Le transfert vers la branche ATMP d'une couverture « accidents du travail » pour les établissements et services d'aide par le travail, madame la rapporteure générale, représente environ 0,1 million d'euros en 2016. Je confirme d'autre part que le transfert à la CADES de la dette gérée par l'ACOSS respecte le plafond, puisque la loi l'impose. Les résultats actuels de la CADES, qui sont bons, permettent de reprendre cette dette – capital et intérêts – par anticipation tout en maintenant la date d'extinction à 2024. Je l'ai dit au président de la CADES : si la trajectoire est respectée, il restera à l'ACOSS une dette de 29 milliards d'euros que nous ne pourrons transférer en l'état actuel des choses à la CADES et qui, si elle devait être transférée en 2019, représenterait 0,24 point de la CRDS.
J'insiste sur un point : pour la première fois, la dette sociale diminue en 2015 – et cette tendance devrait se confirmer en 2016. Autrement dit, l'amortissement réalisé par la CADES est supérieur à la dette produite par les régimes sociaux. Elle perçoit en effet 16 milliards d'euros de recettes annuelles ; le déficit atteindra 10 milliards, mais la CADES pourra en rembourser 13 milliards, soit une réduction nette de 3 milliards de la dette sociale – qui reste néanmoins importante.
Dernier point : je comprends les interrogations exprimées au sujet de l'arrêt de Ruyter et du montant de 250 millions d'euros par an qu'il implique pour notre budget. De deux choses l'une : soit ce montant est remboursé et, dans ce cas, une recette ou une économie supplémentaire doit être réalisée, soit il ne l'est pas. La situation financière inciterait plutôt à conserver ces fonds.