Intervention de Serge Bayard

Réunion du 29 septembre 2015 à 16h30
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Serge Bayard, président de la Banque postale collectivités locales :

Quant à savoir quel scénario, de la fiscalité ou de la tarification, l'emportera à l'horizon 2020, je pense que ce sera un peu tout. Pour moi, le premier arbitrage se fera sans doute sur le renouvellement, et le deuxième sur les subventions : c'est ce qu'il y a de plus facile, jusqu'à une certaine limite. Ensuite, il faudra actionner le levier de la fiscalité, ce qui est un peu douloureux, puis celui de la tarification, qui est encore plus douloureux : une augmentation de 20 % du prix de la cantine, cela se voit. Ce sera donc un mix de tout cela, sachant malgré tout que le compte n'y sera pas. S'il faut investir 20 milliards d'euros sur les réseaux numériques, personne ne sait aujourd'hui comment les financer.

Prenons-nous en compte le risque ? À La Banque postale, oui. Mais je vais vous livrer un grand secret : entre la collectivité dite la plus risquée, c'est-à-dire celle notée 7 chez nous, et la moins risquée, la différence de prix est de 0,2 %. Ce n'est pas beaucoup parce que, comme l'a dit Jean-Sylvain Ruggiu, le monde public français n'est pas structurellement risqué. Les emprunteurs à gros risque, dont il est peu probable qu'ils puissent rembourser ? Nous ne leur prêtons pas. Notre politique n'est pas de faire des surendettés, et nous ne misons pas sur l'intervention du préfet en cas de difficultés. En outre, nous voulons d'autant moins nous fâcher avec une collectivité à cause d'un impayé qu'il y a sans doute un bureau de poste dans les parages. Il ne s'agit donc pas de financer des collectivités dont les perspectives financières sont très sombres.

Pourquoi dit-on que cette activité n'est « pas rentable » ? Je vous confirme qu'elle ne l'est pas, et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, elle n'est pas très risquée, or le coût du risque a une certaine rentabilité. Quelqu'un qui prend des risques demande une rentabilité plus forte. Deuxièmement – et c'est, je pense, la raison essentielle –, les collectivités ne sont que des « moitiés de client ». Une SEM ou un bailleur social déposent leur argent, font traiter leurs virements, leurs prélèvements, leur monétique, leurs cartes bleues dans une banque ; la collectivité, elle, ne fait que de la dette. L'activité n'est pas rentable parce qu'elle n'amène ni dépôts ni autre activité, et ce ne sont pas les dépôts des collectivités qui financent les crédits aux collectivités. Le principe du fonctionnement bancaire est pourtant que les dépôts financent les crédits. Ce sont les dépôts de mes clients, dont beaucoup sont des particuliers, qui servent à financer les crédits. Ce point devient d'autant plus sensible avec la mise en place des ratios, notamment de liquidité, au niveau de la Banque centrale européenne. Celui de La Banque postale est sympathique, donc nous n'avons pas de problèmes – jusqu'au moment où nous en aurons, parce que quand on rentre 10, 15 ou 20 milliards de crédits tous les ans, tout confondu, on mange de la liquidité.

En ce qui concerne le bloc communal, je ne saurais vous répondre. Aujourd'hui, ce que l'on voit, c'est que les groupements investissent de plus en plus et les communes de moins en moins. La somme des deux traduit quand même une baisse de l'investissement global, mais c'est logique compte tenu de la répartition des responsabilités.

Enfin, les 37 milliards dont je vous ai parlé renvoient aux investissements d'entretien du parc existant de toutes les collectivités confondues : départements, régions, bloc communal. Je pense que les 10 milliards d'euros évoqués par Jean-Sylvain Ruggiu concernent plutôt le bloc communal.

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