Intervention de Thierry Mandon

Séance en hémicycle du 19 décembre 2012 à 15h00
Création de la banque publique d'investissement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Mandon :

Monsieur le ministre délégué, je me permettrai d'adapter librement mon propos à l'intervention de l'orateur précédent.

La création de la BPI est une réforme essentielle. Ce nouvel établissement prendra une place importante dans la nouvelle palette des outils de financement des entreprises. Il s'adressera à tous les acteurs de l'économie, dont les TPE : c'est explicitement mentionné dans le texte. Cet outil est même en grande partie destiné à ces TPE, ainsi qu'aux PME, aux PME industrielles et aux entreprises de taille intermédiaire. Tous ces acteurs ont des besoins spécifiques de financement de leur croissance et de leur développement.

Cette banque publique doit être une banque différente, exclusivement dédiée à ces acteurs et au financement de leur croissance. Cette banque différente répond à une nécessité, que vous devez déjà rencontrer sur le terrain. C'est la raison pour laquelle on peut s'interroger sur le sens de votre vote. En effet, que disent les entreprises ? Qu'elles n'arrivent pas à obtenir des acteurs bancaires classiques des financements suffisants, qu'il s'agisse de prêts, de cautions, d'apport en fonds propres… Cela s'explique par des foules de raisons, qui tiennent à la réorganisation du système bancaire, à la préparation des réformes de liquidité et de solvabilité des banques plus connues sous le nom d'accords de Bâle III. Dès à présent, les banques se réorganisent selon cette perspective. Bien souvent, donc, la porte des banques est fermée aux entreprises.

Ce sont autant d'opportunités de croissance d'entreprise dans les territoires, de développement de l'emploi, qui disparaissent faute de financements. Cette BPI répondra-t-elle à tous les problèmes ? Évidemment non, personne ne le prétend. Elle est toutefois indispensable du fait de sa puissance financière. Vous balayez d'un revers de main cet argument en disant que, finalement, 35 ou 40 milliards d'euros, c'est peu de chose. Mais, tout d'abord, il faut comprendre que cette somme permettra de faire jouer un effet de levier, qui porte la capacité d'investissement de la BPI à 70 milliards d'euros. Il faut rapprocher ce chiffre du financement global des PME, qui est de 185 milliards d'euros. Le texte dont nous discutons propose donc la création d'un outil qui représente, pratiquement du jour au lendemain, un apport de financements nouveaux d'un peu moins de 50 % des aides disponibles pour le tissu industriel et économique.

Deuxième justification de la création de la BPI : les modalités de son intervention. D'abord, cet outil est simple. Simple, car il s'agit d'une structure unique. Vous retournez cet argument en disant que c'est un monstre, un paquebot. Mais en réalité, cela permet le regroupement dans un seul et même outil de différentes aides qui sont à l'heure actuelle complètement éclatées, désarticulées, désorganisées, sans aucune coordination. Surtout, cet outil traitera l'ensemble des financements dont les entreprises ont besoin : prêts, garanties, financements de l'innovation et à l'exportation.

Cette banque aura une autre spécificité : elle sera profondément insérée dans les régions. Elle a pour objectif d'être plus qu'un guichet passif de distribution d'aides, de garanties ou de prêts. Elle jouera également un rôle actif de conseil et de soutien aux entreprises ; cela reste à mettre en place en relation avec les Régions. Bref, la BPI sera une banque différente par sa nature.

Elle sera aussi différente par sa gouvernance, qui est extrêmement simple : une structure de tête réunit de manière paritaire l'État et la Caisse des dépôts et des consignations, qui chapeaute des filiales spécialisées dédiées. Un conseil d'administration national est garant de la stratégie économique, du pilotage du réseau et de la gestion des risques. Il est secondé, pour ce qui concerne la dimension opérationnelle, par un conseil national d'orientation, qui a la particularité d'être une structure agrégative réunissant l'ensemble des acteurs de l'économie : les partenaires sociaux, les entreprises, les secteurs d'investissement prioritaires, les Régions ; bref, un conseil qui sera en prise directe avec l'économie réelle et les forces vives du pays. C'est la première fois qu'un outil bancaire est aussi largement composé, y compris dans le secteur privé.

J'insiste sur la volonté d'exemplarité de cet outil, tant en matière de rémunérations – nous sommes tous conscients de la nécessité de limiter les dérives en matière de rémunérations dans les banques – qu'en matière d'interdiction des conflits d'intérêts. Cela implique aussi l'interdiction d'un certain nombre d'activités spéculatives, notamment concernant les opérations de marché pour compte propre.

Vous dites que vous avez participé avec assiduité au débat parlementaire. Il se trouve quand même que les bancs de l'opposition étaient vides la plus grande partie du temps !

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