Souhaitant aller plus loin, j'ai demandé au sénateur Alain Duran de mener une mission spécifique sur ces protocoles de ruralité pour qu'ils soient suivis avec toute l'attention qu'ils méritent.
Madame Maud Olivier, je vous remercie de m'avoir interrogée sur la stratégie mathématiques qui a pu passer inaperçue alors qu'elle est très importante. Notre pays produit des scientifiques absolument excellents qui remportent tous les prix possibles, et pourtant nos jeunes – et en particulier les filles – sont peu attirés par les mathématiques et les sciences. L'an dernier, nous avons lancé une stratégie nationale qui connaît déjà quelques applications concrètes dans les nouveaux programmes de mathématiques pour la scolarité obligatoire. L'utilisation du numérique permet de rendre ces matières plus attractives pour les élèves ; de nouvelles ressources pédagogiques ont été produites ; les sciences ont une part plus importante dans le nouveau brevet avec l'ajout d'épreuves de physique et de science et vie de la terre (SVT) à celle de mathématiques. Nous subventionnons aussi – à hauteur de 400 000 euros cette année – des partenaires de qualité qui interviennent dans les écoles pour promouvoir la culture scientifique et qui éveillent bien des vocations. Des associations telles que La main à la pâte, qui sont dans le « faire », apportent une autre vision des sciences.
J'ai été étonnée d'entendre M. Dino Cinieri et d'autres affirmer que l'augmentation du nombre d'enseignants n'a pas produit de résultats puisque nous sommes toujours aussi mal positionnés dans les classements internationaux. Vous savez bien, pourtant, que l'éducation produit des résultats dans la durée ! Vous n'espériez tout de même pas, parce que nous augmentons le nombre d'enseignants depuis 2012, en voir les résultats sur des enfants testés à l'âge de quinze ans sur leur scolarité entière. D'ailleurs, pour que tout le monde s'y prépare, je vous préviens que la prochaine évaluation PISA sera sans doute aussi désagréable que les précédentes. Il ne faudra pas venir expliquer que c'est la faute de ce Gouvernement : ce sont des données qui portent sur toute la scolarité d'enfants de quinze ans. L'éducation se déroulant sur un temps long, nous ne verrons les effets de nos réformes et recrutements que dans dix ou quinze ans dans ce type d'enquête. Nous ferons d'autres évaluations sur la fin de l'école primaire pour avoir des données plus rapides, mais nous n'en auront sûrement pas dès cette année. Il faut donc avoir conscience du temps et se garder de tirer des conclusions trop hâtives.
S'agissant de l'augmentation du nombre d'enseignants, j'aimerais aussi souligner un phénomène que vous n'avez pas forcément en tête : elle permet aussi d'accompagner la démographie, car le nombre d'élèves augmente. D'ailleurs, sur les bancs de la gauche, d'aucuns pourraient nous reprocher de ne pas faire davantage de « Plus de maîtres que de classes » ou de préscolarisation. La réalité, c'est que nous avons aussi dû faire face à une augmentation démographique. Nous recrutons autant d'enseignants, non seulement pour accompagner l'éducation prioritaire, mais aussi pour renforcer le premier degré. On ne peut pas dire en permanence, notamment dans la presse, que tout se joue à l'école primaire et qu'il faut porter tous les efforts à ce niveau-là, et nous reprocher ensuite de recruter des enseignants pour renforcer ce premier degré.
Vous m'avez aussi interrogée sur les professeurs détachés qui manqueraient à l'éducation. Rappelons que les enseignants détachés ne sont pas payés par le ministère de l'éducation nationale. Pour ce qui est de leur nombre, le ministère accorde de moins en moins facilement ces détachements et il les recentre dans certains domaines. Par exemple, en éducation artistique et culturelle, un enseignant peut être détaché auprès de la Comédie française pour monter des partenariats avec cette institution culturelle.
Enfin, vous avez évoqué les décharges horaires dont bénéficient notamment les directeurs d'école, estimant qu'il s'agissait d'un manque à gagner. Ce n'est pas le cas. D'ailleurs, s'intéressant à la situation des directeurs d'école, votre collègue Siré a plaidé pour un accroissement de ce nombre d'heures de décharge dont ils bénéficient pour jouer leur rôle : assumer les tâches administratives, conseiller les enseignants, être en relation avec les familles.
Mme Marie-Odile Bouillé est intervenue sur l'éducation artistique et culturelle, un domaine où une innovation importante est à noter : le référentiel commun. Désormais, tous les professeurs et les autres acteurs – les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) ou les associations d'éducation populaire – connaissent les grands objectifs fixés aux élèves. Ce parcours d'éducation artistique et culturelle comporte trois axes : la transmission des savoirs culturels ; la pratique d'un art ; la rencontre avec des artistes et des oeuvres. Ce programme est évalué et conduit de façon cohérente tout au long de la scolarité.
La formation des enseignants est également renforcée, notamment par le biais de partenariats entre les ESPE et les institutions culturelles. Enfin, le projet d'école de chaque établissement comportera bientôt la signature d'un partenariat avec l'institution culturelle du territoire concerné.
J'ai souhaité que les pratiques artistiques collectives – la chorale, le théâtre, la danse – soient renforcées dans les établissements scolaires, et nous avons dégagé 8 millions d'euros à cet effet. Près d'un million d'enfants participent à des chorales scolaires et, l'année dernière, la première édition du concours de chorale a rencontré un très beau succès. C'était un vrai plaisir de voir les gagnants se produire à Paris.
Monsieur Jean-Claude Mathis, j'ai cru comprendre que vous considériez comme une hérésie de créer des postes supplémentaires et qu'il faut cesser ; je tâche de trouver une réponse qui puisse vous être utile. Peut-être pourrais-je vous révéler quelque chose qui passe trop souvent inaperçu : le statut des enseignants a été revu, et le décret de 1950, qui n'avait pas été repensé pendant des décennies, n'est plus en vigueur. Depuis août 2014, au terme de négociations et de « groupes métiers » qui ont duré des mois, ce statut a été rebâti de sorte que des missions que les enseignants pouvaient remplir sans pour autant être rémunérés ou reconnus davantage ont été valorisées. C'est ce que l'on appelle aujourd'hui les indemnités pour mission particulière. Par exemple, dans un établissement, le référent en charge de la lutte contre le décrochage, qui va être, en quelque sorte, le tuteur des enfants qui vont mal, percevra une indemnité pour cette mission particulière. Il me semble que c'est là une façon de valoriser l'engagement et l'investissement des enseignants dans l'établissement.
Monsieur Siré, oui, les directeurs d'école ont besoin d'être soutenus. C'est ce que nous faisons avec les contrats aidés, dont 15 000 environ servent à décharger les intéressés de tâches administratives. Ils bénéficient aussi de décharges horaires, notamment pendant la période de rentrée scolaire, ainsi que d'améliorations indemnitaires prévues par les « chantiers métiers » que j'évoquais, qui ont permis de revoir les missions, le statut et les rémunérations de nos professionnels.
Mme Lang m'a interrogée sur les missions des personnels de santé. C'est un sujet sur lequel nous avons beaucoup travaillé, notamment pour préciser le statut des visites médicales. Un arrêté doit être publié prochainement, prévoyant que tous les enfants de l'âge de six ans feront l'objet d'un bilan de langage pratiqué soit par un médecin de l'éducation nationale, soit par leur médecin de famille. Ce travail partenarial permet d'associer aussi le ministère de la santé. Il vise à dépister les troubles spécifiques du langage et à y répondre. C'est l'occasion de rappeler que l'école se mobilise beaucoup pour les enfants présentant des troubles « dys », en particulier grâce au plan d'accompagnement personnalisé. La circulaire en date du 22 janvier dernier précise ce qu'est ce plan : un dispositif d'accompagnement pédagogique s'adressant aux élèves ayant besoin, dans leur classe, d'adaptation et d'aménagement pédagogiques. C'est un outil de suivi de l'élève, notamment au moment de la liaison entre l'école primaire et le collège ou entre le collège et le lycée.
Monsieur Pierre Morel-A-L'Huissier, les 58 000 AVSI qui suivent et accompagnent les élèves en situation de handicap effectuent un travail de qualité. Je sais que des inquiétudes s'expriment au sujet des compétences de ces personnes en contrat aidé. Je répète qu'elles reçoivent une formation d'une soixantaine d'heures, à l'issue de laquelle elles sont parfaitement à même d'effectuer leur tâche. Reste que nous devons travailler pour offrir un véritable parcours professionnel à ces AVSI, en particulier, au-delà de l'éducation nationale, dans le secteur de l'accompagnement des personnes dans lequel les besoins sont extrêmement importants.
Madame Sylvie Tolmont, la loi pour la refondation de l'école a fait du redoublement une procédure exceptionnelle. Vous-même ne l'avez pas fait, mais j'entends parfois dire qu'il a disparu. C'est faux : il est des cas où il s'impose et se justifie parfaitement – par exemple, lorsqu'un élève a été absent de façon très prolongée en raison d'une maladie ou pour une autre cause. En revanche, du point de vue pédagogique, il est reconnu aujourd'hui que le redoublement n'est pas suffisamment efficace, et qu'il est préférable de traiter les problèmes le plus tôt possible plutôt que d'attendre un an pour tout reprendre à zéro.
Plusieurs moyens sont désormais disponibles pour accompagner les élèves en difficulté au sein même de la classe. Dans l'enseignement du premier degré, cela passe par le dispositif « Plus de maîtres que de classes », par les stages de remise à niveau de quinze heures organisés pendant les congés scolaires pour les élèves en difficulté de CM1 et de CM2 ou par l'aide apportée par les RASED. Dans l'éducation prioritaire, l'accompagnement éducatif en dehors des heures de cours, par exemple pour l'aide aux devoirs, se développe grâce aux moyens débloqués. Là où ils existent, les programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE) jouent aussi leur rôle. Dans le second degré, la réforme du collège, avec l'accompagnement personnalisé ou le travail en petits groupes, a précisément vocation à remettre à niveau les élèves en temps utile afin de leur éviter le redoublement.
Les calculs de M. Lionel Tardy m'étonnent. Il considère que nous consacrons cette année moins d'argent au numérique que l'année dernière, alors que nous finançons le plan numérique à hauteur de 192 millions d'euros, somme qui s'ajoute aux 10 millions de crédits ouverts dans le PLF 2014. Il n'y a pas de doute sur le fait que ces crédits progressent.
Madame Barbara Pompili, l'avenir de la médecine scolaire constitue un véritable enjeu. L'attractivité du corps des médecins de l'éducation nationale est très faible, disons qu'elle est moindre que celle d'autres corps proposant des missions de même nature. Ce problème d'attractivité est d'autant plus important que de nombreux médecins scolaires prendront leur retraite dans les cinq prochaines années. Dans le cadre de la modernisation de l'action publique, une mission conduite par plusieurs inspections générales est en cours afin de voir comment rendre ces missions plus attractives. À partir des conclusions qui nous seront remises au mois de février prochain, nous travaillerons avec les ministères concernés, notamment celui des affaires sociales, afin d'améliorer le déroulement de carrière de cette profession et la revaloriser.