Intervention de Guillaume Larrivé

Réunion du 21 octobre 2015 à 21h00
Commission élargie : finances - lois constitutionnelles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Larrivé, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour l'administration pénitentiaire :

Je voudrais en quelque sorte être un porte-parole ce soir, après ce que j'ai vu au cours de ces dernières semaines sur le terrain, dans les prisons, s'agissant de la situation des personnels de l'administration pénitentiaire. J'ai rencontré des personnels de grande valeur, très solides, des équipes de direction courageuses et très motivées, mais aussi des agents exprimant un vrai malaise quant aux missions qui leur sont assignées et aux difficultés de leur exercice. Il est important qu'au-delà des chiffres, le Gouvernement entende ce malaise et dirige l'administration pénitentiaire pour mobiliser pleinement les personnels qui y travaillent.

Sur le fond, j'ai souhaité concentrer cet avis budgétaire sur la question de l'adaptation de l'administration pénitentiaire à la menace terroriste, voire, pour reprendre les termes employés par le chef du Gouvernement, à la guerre contre le terrorisme islamiste radical dans laquelle notre pays est engagé.

Dans ce rapport, je fais une vingtaine de propositions aussi opérationnelles que possible. Je souhaite, ce soir, concentrer mon propos sur deux d'entre elles, pour que nous ayons, madame la garde des sceaux, un véritable échange.

Mon premier sujet de préoccupation porte sur le regroupement ou non, et selon quelles modalités, des détenus terroristes identifiés par l'administration pénitentiaire comme étant les plus dangereux.

Le Gouvernement a engagé un programme qui consiste à identifier, puis à répartir ces détenus dans cinq lieux de détention. Le cinquième, celui de Lille-Annoeullin, a vocation, à compter de janvier prochain, à accueillir vingt-huit détenus identifiés comme étant les plus dangereux, au terme d'un processus d'évaluation pensé en amont.

Alors que je me suis rendu sur place, j'ai compris que ce qui était engagé était lourd de nouvelles menaces. Je voudrais que vous en preniez, les uns et les autres, pleinement conscience.

Ces vingt-huit détenus seront regroupés dans deux unités de quatorze détenus, unités étanches l'une par rapport à l'autre et par rapport au reste de la prison, ce qui est une bonne chose. Mais au sein de chacune de ces unités, les communications seront possibles, notamment au moment des promenades ou des activités sportives.

La conviction que j'ai acquise au fil des auditions, et notamment lors d'échanges avec des patrons de services de police impliqués dans ce domaine, c'est que vous êtes en train, si vous ne changez pas l'architecture de ce projet, de créer les conditions de la renaissance de cellules de combat dans cette unité de Lille-Annoeullin. L'intérêt général commanderait d'envisager une autre solution consistant à isoler du reste du monde pénitentiaire, mais aussi les uns par rapport aux autres, ces détenus identifiés par vous comme étant les plus dangereux.

En ce qui concerne ma seconde proposition, il me semble nécessaire, madame la garde des sceaux, que vous engagiez avec nous une réflexion sur la durée des peines, c'est-à-dire le quantum prononcé, mais aussi les modalités de réduction ou d'aménagement, s'agissant de détenus condamnés pour des actes de terrorisme. La société a le droit de se protéger contre ces individus qui veulent la détruire, ce qui suppose de trouver les moyens juridiques d'une mise à l'écart durable, voire perpétuelle, de certains d'entre eux au sein de l'administration pénitentiaire. Certains magistrats, et notamment le président du tribunal de grande instance de Paris lui-même, ont engagé publiquement une réflexion à ce sujet. L'Assemblée nationale doit, elle aussi, se saisir de cette question. Si nous voulons mieux protéger les Français dans la durée, nous devons, j'en suis convaincu, modifier, ajuster le quantum et les modalités d'aménagement des peines en matière de terrorisme.

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